Les Héritiers des Dieux _ Tome 3 _ Le retour des Forces du Mal

Chapitre 22 _ Prière

Assis dans ses quartiers privés, le Chef des Diacres patientait tranquillement, un livre en main, que l'heure vienne. Lorsqu'il aperçu à travers sa fenêtre le soleil se coucher, il ferma son ouvrage et se leva. Il était temps pour lui de se préparer.

Enfilant ses plus beaux apparats, Blaine rejoignit le dernier temple du Zodiaque d'Or, et, encore une fois, il attendit. Ce ne fut que lorsque le ciel fut noir que le Chevalier d'Or du Sagittaire entra, le regard ferme et déterminé.

- Kévin s'est échappé hier soir, déclara Blaine sans laisser le temps au Sagittaire de s'exprimer. Comme je m'en doutais... Les Chevaliers d'Or ont-ils quelque chose à voir avec cela ?

- Non, Monsieur.

- Alors c'est certainement son ami, le Chevalier Sage... Quelle déception. Moi qui espérais tant du fils du Chevalier d'Or du Capricorne. Il avait un bon avenir.

- Ce n'est pas lui non plus, Monsieur.

Blaine afficha un air surpris. Il parut réfléchir un moment, mais il ne parvenait à comprendre.

- Ce ne peut être Ofelia, je la fais activement surveiller depuis... Alors c'est donc sa mère ?

- C'est possible.

- Ah, misère... Dire qu'elle est repartie en direction de la Palestre...

Le Chef des Diacres se tourna vers le trône du Grand Pope, malheureusement encore vide. Le temple lui-même semblait moins imposant sans sa présence...

- Tu es bien le seul parmi les douze en qui je peux avoir confiance, Aiolos... soupira-t-il. Mais je suis tout de même déçu que tu n'ais pas anticipé la fuite de Kévin.

- Ce n'était qu'un renégat. Sa fuite ne devrait pas vous poser de problème.

- En effet... Bien. Tu peux disposer. Merci de ton rapport.

Aiolos inclina légèrement la tête, et s'en alla. En fermant les portes derrière lui, il obliqua légèrement la tête en arrière, le regard sévère. Il avait senti une autre présence, à l'intérieur du temple... Mais il ne pouvait faire demi-tour pour s'assurer de l'identité de cette personne. Quoiqu'il en soit, il était persuadé que Blaine ne marchait plus dans son jeu. Il doutait de lui. Cela se voyait ; il devrait donc être plus prudent par la suite... Ce fut sur cette pensée que le Sagittaire regagna son temple, ignorant de ce qui était en train de se dire.

En effet, Blaine avait attendu que le Chevalier d'Or s'en aille pour faire signe à l'ombre qui s'était terrée dans l'obscurité. C'était Ptolémy, le Chevalier d'Argent de la Flèche, l'un de ceux qui s'étaient fidèlement rangés à ses côtés faute d'autorité religieuse au sein du Sanctuaire. Ce dernier affichait un air grave.

- Où étais-tu, hier soir ? demanda le Chef des Diacres avec tranquillité.

- J'obéissais aux ordres.

- Tu vas donc tout me dire. Qui a libéré le renégat ? Qui lui a permis de fuir mon jugement ?

Ptolémy, malgré tout le respect qu'il ressentait pour Blaine, hésita un moment.

- Je l'ignore. Il faisait noir. Je n'ai rien vu.

- Et ton Cosmos n'a rien senti non plus, j'imagine ?

- ... Non.

Le Chef des Diacres poussa un long soupire. Il était exaspéré de la situation. Finalement... Rien n'allait comme prévu.

- Ce maudit renégat s'en est donc sorti ! s'épouvanta-t-il avec lassitude. Et je ne sais pas qui a osé trahir l'autorité du Sanctuaire, que je représente en toute légalité... Cela est absolument impardonnable.

- J'ignore qui a aidé Kévin, mais j'ai réussi à le suivre malgré tout, intervient le Chevalier.

- Où est-il allé ? Il est encore temps de le rattraper, et de montrer à tous ceux qui m'ont défié en le libérant ce qu'il en coûte de trahir le Sanctuaire !

- Vous ne le rattraperez pas.

- Comment cela ?

Ptolémy parut de nouveau hésitant, mais il expliqua en essayant de paraître le plus neutre possible :

- Je connais le danger que représente le fils du Chevalier d'Or du Lion. Il a été touché par les pouvoirs du dieu de la discorde, on ne sait pas à quel point il peut être imprévisible. Et son comportement n'a pas aidé à arranger les choses...

- Continue.

- Le simple fait de l'autoriser à fouler le Sanctuaire... Je trouvais déjà que c'était beaucoup. Mais je n'ai rien dis, par respect envers la hiérarchie.

- Tu respectais trop tes pairs et l'Ordre des Chevaliers d'Or pour dire quoique ce soit.

- ... Oui.

- Mais ?

- Mais en tant que Chevalier d'Athéna, il est de mon devoir de la protéger. Le renégat aurait pu facilement revenir, même des années plus tard. Je n'ai pas hésité longtemps avant d'en finir avec lui.

Blaine écarquilla de grands yeux surpris.

- Tu l'as exécuté ?

- Non, murmura Ptolémy. Je n'en n'avais pas reçu l'ordre. Je n'ai visé aucuns de ses points vitaux. S'il a de la chance, il survivra aux tumultes de la mer. Sinon...

- Je vois... soupira Blaine. Très bien. J'en sais assez. Tu peux disposer.

Ptolémy acquiesça, avant de disparaître aussitôt. Le Chef des Diacres poussa un long soupire, avant de s'asseoir dans le trône du Grand Pope. C'était une chose qu'il avait prit l'habitude de faire pour prier la Déesse, non pour assouvir son autorité. Et il pria. Longtemps. Il pria pour le rétablissement de la Déesse, il pria pour que Kévin ne revienne jamais au Sanctuaire, il pria pour que l'élue de Poséidon disparaisse à tout jamais de leur vie. Il pria pour que la paix revienne enfin au Sanctuaire de la Déesse.

Puis, il se leva, et passa derrière le rideau blanc. D'ordinaire, il n'en n'avait pas le droit. Mais depuis qu'Athéna était dans le coma... Il lui rendait souvent visite. Il la trouva, comme chaque fois, allongée dans son lit, les yeux clos, le visage serein marqué par sa douceur et sa gentillesse naturelle...

- Votre Altesse... soupira-t-il en s'agenouillant à côté d'elle. Je ne sais si vous pouvez m'entendre, mais aujourd'hui encore j'ai besoin de me confier à vous. J'ai commis un acte odieux pour parvenir à mes fins, et je le regrette... J'ai fais assassiner l'un de mes plus fidèles prêtres.

Il se tut. C'était la première fois qu'il prononçait ces mots, et cela lui brisait le cœur.

- J'accepterais mon châtiment, quel qu'il soit. Je vous implore de vous réveiller, Dame Athéna... Le Sanctuaire a besoin de vous. Je suis... Je suis incapable de le défendre seul. Mon autorité ne suffit pas. Je ne suis pas écouté, pourtant je m'évertue de faire le bien.

Encore une fois, son discours s'accompagna d'un long silence troublant.

- Mais j'ai failli à mon devoir en commettant l'irréparable. J'ai voulu éloigner l'élue de l'Empereur des Mers d'ici, j'ai voulu éloigner le Chevalier atteint de la malédiction du dieu de la discorde... Et pour ce faire, je n'ai eu d'autres choix que de faire tuer ce fidèle. Je ne l'ai pas assassiné, mais son sang est sur mes mains... C'est une chose d'exécuter les criminels. C'en est une autre de tuer un innocent...

Il espéra une réponse de la Déesse, mais ce fut vain. Alors il ferma les yeux, et pria à son chevet jusqu'à ce que l'aube vienne.