Chapitre 27 _ La fin d'une ère

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Ofelia avait réussi à réveiller Sophia. Malgré la douleur que ressentait cette dernière, l'espagnole était parvenue à la tirer hors de son lit d'hôpital, et à l'emmener de l'autre côté de l'île. L'odeur du vent salin commençait à peine à chatouiller leurs narines. Elles avaient marché un petit moment, mais la française faiblissait de plus en plus.

- Je n'en peux plus... soupira-t-elle en s'effondrant. Ma tête...

- Allez, Sophia, un petit effort... l'implora Ofelia. Nous ne sommes plus très loin. Regarde ! Les falaises ! Le port n'est plus très loin.

- Elle me parle... suffoqua Sophia. Elle me dit...

La française poussa un long cri de douleur, se tenant la tête.

- Qui est là ?? hurla-t-elle tout d'un coup en se redressant subitement.

Ofelia sursauta, et recula vivement. Elle n'arrivait pas à comprendre ce qui arrivait à son amie. D'un pas craintif, elle osa s'approcher d'elle de nouveau, et essaya de lui murmurer d'une voix douce :

- Sophia, je suis là, c'est moi... Ofelia.

- Ofelia ? réalisa tout à coup Sophia.

- Tu... Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu n'arrivais même plus à te lever ces derniers jours... Et là, tu...

- Tu dois t'en aller ! cria-t-elle en toute réponse. Tu dois partir ! Pars ! Pars !!

Elle hurla de nouveau. C'était un spectacle déchirant. Ofelia ne savait pas du tout quoi faire. Elle guetta la Palestre, à peine visible de leur position ; les ténèbres étaient en train de les rattraper.

- Nous devons partir ensemble, s'obstina-t-elle le plus doucement possible. S'il te plaît...

- Elle est là... Elle arrive... C'était elle depuis le début ! C'était elle qui me faisait si mal !

- Qui ça, « elle » ? Sophia, de qui parles-tu ?

Mais Sophia ne répondait pas. Elle continuait de parler, mais elle commençait à devenir totalement incohérente dans ses propos, probablement à cause de la fièvre. Seules ces idées là revenaient constamment ; une présence qui lui avait fait du mal pendant tout ce temps, et qui était sur le point d'arriver. Alertée, Ofelia se résigna à tirer son poignard, en songeant à Dante. Si seulement il était là... Lui, ou n'importe quel Chevalier Sacré !

Persuadée que la « présence » dont parlait Sophia était la même qui était en train d'attaquer la Palestre, Ofelia surveilla le passage qu'elles avaient dû emprunter. Elle guetta également la voie des airs, dans le cas où leur ennemie aurait des ailes... Ce n'était pas impossible. Les Juges des Enfers en avaient bien...

- Sophia, il faut reculer jusqu'à l'embarcation... murmura Ofelia par peur d'être entendue. S'il te plaît.

Aucune réponse. Même les cris avaient subitement cessé.

- Sophia ?

Toujours rien. Ofelia, prise d'un doute immense, se retourna lentement, et poussa un cri d'horreur en voyant que son amie était étendue sur le sol. Elle se précipita sur elle, abandonnant son poignard par terre, et la souleva comme elle le pu.

- Non, non... Sophia, ce n'est pas drôle...

Elle la secoua un peu, chercha sa respiration, mais rien... C'était comme s'il n'y avait plus de vie en elle. Ofelia, déboussolée, ne su pas du tout quoi faire. Les ténèbres se rapprochaient. Sophia ne se réveillait pas. Elle était tout à fait incapable de se rendre seule jusqu'au bateau. Elle était perdue.

- Sophia, ouvre les yeux, je t'en supplie !

Elle pleura. Elle cria. Elle implora les Chevaliers Sacrés de l'aider. Mais rien ne se passa. Alors elle serra son amie contre elle, le plus fort possible, et elle continua de pleurer. Elle ne pouvait plus s'arrêter. Elle se répétait que les Chevaliers allaient arriver, qu'ils allaient les sauver, une fois de plus...

Mais c'était trop tard.

Elle le comprit lorsqu'elle senti une vive douleur dans son dos. C'était une douleur acérée, comme la pointe d'une lame. Comme la pointe d'un poignard. Tétanisée, Ofelia ne trouva pas la force de bouger. En une fraction de seconde, mille pensées d'incompréhension s'accumulaient dans son esprit, tandis que des fleurs de sang douces et chaudes étaient en train d'éclore dans son dos. Et, l'instant d'après, elle bascula en arrière, s'écrasant durement au sol.

Sophia s'était redressée. Elle n'avait pas prit la peine de garder le poignard. Il était resté figé dans le dos d'Ofelia. Cette dernière, encore consciente, gardait les yeux grands ouverts sur son amie, qu'elle ne reconnaissait plus.

- Mourir... murmura Sophia en observant ses mains comme si elle les découvrait pour la première fois. Puis... Renaître. Mort et renaissance.

Elle baissa lentement son regard vers Ofelia. Ses yeux noisettes... Non, ses yeux noirs et mauves dardaient sur l'espagnole une expression à la fois terne et cruelle. Elle se pencha vers elle, et l'attrapa par les cheveux, pour la soulever un peu. L'espagnole poussa un cri de douleur strident qui s'éleva au-delà des hauteurs des falaises.

- L'élue de l'Empereur des Mers. Sans ton dieu, que vaux-tu, exactement ?

- Sophia... bredouilla l'espagnole. Qu'est-ce que tu fais ?

Elle avait du mal à parler. Elle avait l'impression qu'à chaque mot qu'elle prononçait, le poignard s'enfonçait un peu plus.

- Tu aurais mieux fait de rester aux côtés de la divinité qui est tienne, au lieu de traîner là où tu ne le devrais pas. Tu as échoué. Non... Tu as été un échec.

La main droite de Sophia sembla se charger d'une énergie noire effrayante qu'Ofelia n'avait jamais vue auparavant. Si... En fait, elle avait déjà vu quelque chose de similaire. Le pouvoir de Thanatos, par exemple... Ou encore celui de Loki.

Ofelia leva un regard suppliant vers son amie. Non... Ce n'était pas son amie. Elle ne l'était plus. Mais Sophia était forcément là, quelque part...

- A quoi s'est résumée ta misérable existence, élue de l'Empereur des Mers ? demanda Sophia tandis qu'une sphère parfaite se formait dans sa paume. Ce que tu as connu... Ce que tu as engendré...

Une fois la sphère achevée, Sophia la plaqua doucement contre la poitrine d'Ofelia, lui arrachant un hurlement de douleur poignant. Et, à mesure que la sphère pénétrait son corps, Ofelia sentait que tout en elle était en train de se déchirer. Elle sentait que chacune parcelle de son être était en train de se craqueler. Et ce n'était pas forcément faux ; des marques semblables à des fissures se dessinèrent sur sa peau, la parcourant toute entière. Elle hurlait toujours, et Sophia s'en délectait. Puis, le corps d'Ofelia sembla exploser dans une lumière noire et mauve. Cette lumière aveugla momentanément Sophia qui, lorsqu'elle pu rouvrir les yeux, réalisa qu'il ne restait plus aucune trace de l'élue de l'Empereur des Mers. Elle se mit alors à rire, avant de sombrer dans l'inconscience la plus totale. Une femme, d'un âge assez jeune, la rattrapa au dernier moment.

- Mère... soupira-t-elle. Vous avez puisé trop de vos forces. Vous venez à peine de vous réveiller... Ce n'était pas raisonnable de votre part de vous occuper de cette élue toute seule !

L'inconnue prit le corps de Sophia dans ses bras, et regarda son visage paisiblement endormi avec tendresse.

- Je vous ramène à la maison, Mère... murmura-t-elle en posant sa tête contre la sienne. Nous rentrons chez nous... Nous rentrons à Asgard. 

Ce chapitre est le dernier du tome 3 (enfin, depuis le temps ! 🤣). Je n'ai pas encore commencé le tome 4, mais pour celles et ceux qui me suivent et qui aiment l'histoire, rassurez-vous ; toutes mes idées sont en place ! Il me manque juste le temps pour l'écrire... Donc au plaisir de vous retrouver dans ce futur tome encore inexistant, et merci d'avoir pris le temps de lire mon histoire jusque là 😘

Les Héritiers des Dieux _ Tome 3 _ Le retour des Forces du MalOù les histoires vivent. Découvrez maintenant