Chapitre 32 - 🏝 Marcher sur des œufs & Instant tendresse

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RAINA

Lorsque je rentre de Papara après avoir également fait un rapide saut chez les parents de Tanetoa, mon cher ami catcheur, acteur et incrusteur à ses heures perdues, l’après-midi touche presque à sa fin. Quand je m’engouffre chez moi je ne trouve pas Cameron jusqu’à l’apercevoir assis sur ma pierre favorite, les pieds pataugeant dans le lagon.
J’ai la surprise de voir un début de fabrication de ponton. Il a sorti les quelques planches de bois que l’ancien propriétaire avait gardées de côté pour cette occasion et a commencé à ériger les premiers piliers. Une émotion nouvelle nait en moi : la fierté. Je suis secrètement fière de son envie de m’aider pour améliorer mon quotidien, dès lors que je me trouve chez moi. À ses nombreuses qualités s’ajoute l’altruisme, même si je le savais déjà, mais c’est un fait qui le confirme une fois de plus.
J’approche de lui, mes pieds nus foulant la courte pelouse naturelle de l’arrière de mon jardin. Je me sens légèrement intimidée de lui faire face après la soirée et la nuit que nous avons passées. Je ne l’ai pas appelé une fois de la journée car j’ai tout simplement omis mon téléphone sur la table de ma cuisine. Et puis, même si je l’avais pris je ne lui aurais probablement pas passé un coup de fil.

─Hé, fais-je afin de le prévenir de ma présence et de le saluer en même temps.

Il se tourne vers moi et se lève. Ses yeux se rivant aussitôt aux miens, brûlants d’un feu sauvage qui se reflète en moi tel un baume d’amour. Il m’approche lentement en laissant quelques secondes le brasier de ses prunelles s’égarer sur l’ensemble de mon corps qu’il embrasse de son regard ardent.
Reportant ce dernier dans le mien, il le sonde afin de sûrement décrypter mes pensées.

─Salut, répond-il en s’arrêtant à quelques pas de moi.
─C’est très gentil à toi, merci, dis-je en faisant référence au début de ponton, d’un signe de tête vers celui-ci.
─Pas de quoi, répond-il dans un haussement d’épaules. J’ai vu que les autres propriétés en été dotées et en faisant le tour du jardin j’ai remarqué la petite remise avec tout ça et un plan. C’était écrit en tahitien, mais les dessins étaient assez bons et ton voisin d’en face s’est gentiment prêté à mon soutien dans l’élaboration de ces travaux.
─On n’en apprendra jamais assez des anciens, lâchai-je dans un soupir désolé car les usages des ancêtres s’éteignent peu à peu et en faisant référence au plan ancien.
─Je trouve ça dommage.
─C’est justement quelque chose qui fait polémique ici. Les usages anciens se perdent. Aux Marquises, ils sont très sensibles au savoir-faire des doyens. Nous le sommes moins et petit à petit cela se perd.

Je soupire en haussant les épaules et laissant tomber le sujet, tandis qu’il m’observe toujours attentivement. Il a l’air indécis, sans doute parce qu’il ne sait pas comment prendre ma façon d’être, comme de ne pas lui avoir sauté dans les bras dès mon retour. L’idée m’a effleuré l’esprit, je dois bien me l’avouer, mais la gêne m’a retenue. Après tout, c’est tout nouveau pour moi.

─Alors, comment s’est passée cette journée auprès de ta grand-mère ? m’interroge-t-il en continuant sur un sujet neutre.
─Bien. Très bien. Et instructive. J’ai appris pas mal de choses concernant le passé, notamment combien ma grand-mère est enveloppée de tristesse, confié-je en m’asseyant à ma place habituelle sur la pierre qu’il occupait plus tôt.

Il prend place à mes côtés tandis que je fixe l’horizon.

─Tu veux en parler ? me propose-t-il. Je sais qu’on s’est mis d’accord sur le principe de nous laisser du temps, mais je sais être une oreille attentive si tu le souhaites. Rien ne me ferait plus plaisir.

Je tourne le visage vers lui et lui adresse un petit sourire reconnaissant avant de reporter mon attention au large du lagon en lâchant un profond soupir.

The sin #half of my soul (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant