Chapitre 16 - 🎶 Interrogations & Mauvaise rencontre

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RAINA

Il est mortel après tout. Oui, j’ai eu une réponse à une autre de mes nombreuses interrogations concernant Cameron. Il commence enfin à réagir comme je l’ai tant espéré depuis le début. Faut dire qu’une fille aux réactions énervantes l’a enfin insupporté.
Je me demandais sans cesse comment il faisait pour passer au-dessus de mes sautes d’humeur et du retour de ma froideur lui étant uniquement réservée. Et bien j’ai eu ma réponse, il est comme tout le monde et ne cache aucun secret d’homme éternellement patient. Il a lâché de la bride.
Et, comme il me l’avait avancé dans un premier temps, je ne le croise plus. Je ne sais pas trop comment le prendre, mais je suis dans l’obligation d’admettre que ça me fait bien chier. Et devoir l’admettre aussi. Et oui, je ne suis pas si différente de toutes les filles.
Une fois que j’ai eu ce que j’ai tant voulu, bah je regrette de ne pas y avoir réfléchi à deux fois avant de me conduire en véritable conne.
Pourquoi sommes-nous comme ça, d’ailleurs ?! Pourquoi lorsque les choses se passent enfin comme nous le souhaitons, nous désirons revenir sur nos paroles en nous disant que finalement, avant ce n’était pas trop mal ? Je ne me comprends pas moi-même, alors comment un homme pourrait parvenir à décrypter mes envies, les vraies ?
Cela dit, j’ai beau me contredire, je suis aussi plutôt contente de la tournure des choses. J’ai besoin de souffler. Il faut que je reprenne le dessus sur cette histoire de lettre qui m’a profondément chamboulée. Je dois à tout prix arrêter de donner assez d’importance à cette dernière qui paraît détenir la clé de mes terreurs nocturnes.
Bien entendu, Cameron n’y est pour rien, mais si je le tiens autant à l’écart à nouveau c’est que j’ai des raisons de le faire. Ces dernières étant que dans l’état psychologique où je me trouve depuis la lettre, je ne veux pas de sa proximité. Il se montre tellement attentionné et cruellement gentil avec moi et mes amis que, plongée dans cet état, j’aurai vite fait de me laisser emporter dans une tornade émotionnelle avec cet homme.
Je me serai laissée aller en m’appuyant sur ses épaules, en m’ouvrant entièrement à lui. Et s’il décidait par la suite de continuer sa route sans moi à ses côtés, que deviendrai-je ? J’aurais tout donné à cet être et une fois qu’il en aurait marre de ma personne, qu’en serait-il de moi ?
L’ombre de ma mère m’apparaît clairement comme seule réponse. Et quand je dis « ombre », je pèse mes mots parce que c’est exactement ce qu’elle était devenue lorsque mon père nous a lâchement abandonnées. Même si cela valait mieux et qu’elle était déjà cette ombre aux yeux perdus.
Nous retrouvant toutes seules avec l’impossibilité de rentrer chez mama ru’au parce que cette dernière avait interdit à ma mère de partir avec mon père des années plus tôt et dont j’ignorais l’existence. Évidemment ma mère avait choisi cet homme ingrat sans une once de scrupules à nous laisser derrière lui après l’avoir mise enceinte et m’avoir connue les trois premières années de ma vie.
Elle avait choisi l’amour de sa vie et je savais où ça l’avait menée. Désormais, je n’ai qu’un endroit où me recueillir pour me sentir proche de maman, parce qu’il ne me reste rien d’elle, pas même son corps qui s’est embrasé en même temps que notre maison.
Bien entendu, Cameron n’est pas mon père, mais il reste un homme et je dois me méfier. Ceux qui ont entouré ma mère après le départ de mon père n’ont été qu’un ramassis de ratés desquels je devais sans cesse me cacher. Ils étaient devenus mon cauchemar et ma mère n’avait plus les mots ni les gestes d’une mère avec sa fille, pour lui donner sa protection, pour son épanouissement… Au fond, elle était perdue et peut-être déjà morte.
Je ne peux pas dire me souvenir exactement d’elle en dehors de ce que j’ai connu en sa compagnie. Mama ru’au a représenté plus une mère pour moi que ma grand-mère, une fois qu’elle m’a récupérée grâce à mon papa ru’au5. Mais je ne peux régresser ce sentiment d’affliction pour cette jeune fille qu’avait été ma mère.
Cette jeune fille qui a commis la seule erreur d’aimer plus que sa vie, plus que la mienne, la mauvaise personne qui l’a menée au désarroi le plus total. Cette personne s’étant foutue de mon existence en ne faisant de moi qu’un dommage collatéral à ses yeux. Il s’agissait d’un homme. Un homme beau tel un Dieu d’une des légendes de mon île, comme Ruāhatu6, venu de la mer et reparti en emportant le cœur de ma mère au fond de l’océan en ne me laissant plus rien d’elle hormis son indifférence.
C’était un fichu homme.
Un homme.

The sin #half of my soul (Terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant