Chapitre 20

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Je sens que la voiture s'arrête. Je crois qu'Arone met le frein à main. Donc on s'arrête pour de bon, ce n'est ni un stop ni un feu rouge. Je sens Arone gigoter à côté de moi. Une portière s'ouvre, puis se ferme. Quelques secondes après, ma portière s'ouvre. Je sursaute lorsqu'il m'attrape les avant-bras. Il me fait sortir de la voiture, et la seule chose que j'entends c'est les oiseaux, le vent dans des arbres, et sa respiration.

"Ne bouge pas.
-Tu veux que j'aille où? Je ne sais même pas où l'on est.

Il me quitte. Je crois qu'il ouvre le coffre de la voiture et qu'il en sort des choses. Je ressens qu'il s'active, mais je ne saurais dire ce qu'il fait. Mon coeur loupe un battement lorsqu'il entoure mon poignet de sa main.

-Tu es tendue.
-Tu crois?
-Jaime quand tu es sarcastique.
-Ça tombe bien, c'est ma passion.
-Aller, viens.

Il m'entraîne, me faisant faire quelques pas. Cinq ou six. Il passe ses mains sur le noeud de la cravate et le défait. Mon regard s'habitue à la lumière, puis se pose enfin sur ce que fabriquait Arone. Il a laissé le coffre de sa voiture ouvert, et il contient un pique-nique. Tout est bien posé. Je me tourne vers lui.

-C'est... Je... Ouais. Je ne sais pas quoi dire. C'est étrange.
-Je n'ai pas l'habitude d'emmener des gens pique-niquer.

Je lève la tête et c'est alors maintenant que je remarque que nous sommes en lisière de forêt, au bord d'une route qui semble peu empruntée.

-Où m'as-tu emmené? C'est magnifique...
-C'est un peu loin de Boston, je sais.
-Mon frère sera jaloux lorsque je lui dirai. Il aurait adoré.
-Tu l'aime beaucoup, pas vrai?
-C'est mon super-héros. Je ne vois pas ma vie sans lui.

Je détourne le regard, mal à l'aise. Qu'est-ce qu'il m'arrive? Je ne suis pas quelqu'un de sentimentale, et là je deviens nostalgique.

-On mange?
-J'ai une faim de loup.

Nous nos asseyons sur le rebord du coffre, et Arone m'offre de merveilleux sandwichs.

-Sinon j'ai de la salade. Vu que je ne connais pas tes goûts, j'ai demandé à Anne de mettre un peu de tout.
-Qui est Anne?
-La gouvernante.
-Je suis allergique au lactose...
-C'est vrai?
-Je peux manger l'intérieur des sandwichs, ne t'embête pas.
-J'aurais dû te demander.
-Pendant huit ans j'ai pris des lactoses alors que j'étais allergique, et mes parents pensaient que mes réactions étaient fait exprès.
-Pendant huit ans tu as gonflé?
-Pendant huit ans j'ai respiré convenablement tous les deux jours.
-J'aurai voulu voir ça!
-Tu n'as rien loupé. Jusqu'au jour où j'ai fait une crise d'urticaire. C'était horrible.
-Je ne veux pas faire de cauchemars, garde les détails pour toi!
-Petite nature.

Je mache, sans réelle envie, une feuille de salade. Parfois je me demande si je me nourris assez. Mon regard se perd sur l'épaisse forêt. Elle est splendide. Attirante et effrayante.

-Tu es sûre que ça va Margaret?

Je tourne vivement la tête vers Arone en fronçant les sourcils.

-Oui. Pourquoi dis-tu cela?
-Tu pleures.

Je passe le bout de mes doigts sur ma joue. Ils écrasent une larme, humidifiant toute ma joue. Qu'est-ce qu'il m'arrive? Je pleure sans m'en rendre compte maintenant.

-J'ai une poussière dans l'oeil.

Je fais mine de vouloir m'en débarrasser. Même si je voudrai plutôt me débarrasser de ce mensonge.

-C'est mal de mentir. Qu'est-ce qui se passe? Dis-moi.
-Je ne sais pas. Je n'en sais rien. Je ne mettais même pas rendue compte que je pleurais. C'est peut-être la lumière, ou le fait d'avoir parlé de mon frère. Je ne sais pas...

Il m'observe sans rien dire. Ses yeux se baladent sur mon visages, comme une caresse. Comment notre relation a pu passer de la haine à un pique-nique?

-Est-ce-que tu es heureuse?

C'est quoi cette question!? Non mais sérieusement! Je suis sensée faire quoi? Il pose sa main sur la mienne, ce qui me perturbe extrêmement. Soit il joue, soit il est sincère. Mais avec Arone, on ne sait jamais. Je plonge mon regard dans le sien. Je respire profondément.

-Je crois que non.
-Pourquoi? Qu'est-ce qu'il te manque?
-Beaucoup de chose. Le repos, et l'amour. Ça me manque.
-Tu manque d'amour?
-Mes parents, mes amis, ma vie sentimentale, si elle existe.
-Stella? Ton frère?
-Stella ne voit que Noah. Et mon frère... C'est moi qui veille sur lui, c'est moi qui va l'embrasser le soir. Je le protège, et en échange il me donne la place de second lors de ses missions.
-Personne n'est là pour toi. Je comprends.

J'esquisse un sourire en me voyant au parc, Hugo sur le dos, à jouer le vaisseau spatial, puis croiser le regard d'Arone.

-Et toi? Es-tu heureux?
-À cet instant précis, oui.
-Et dans ta vie?
-Pas vraiment.
-Et pourquoi?
-Je suis seul. Et la solitude n'apporte que la tristesse.
-Je sais. On a vraiment l'air bête. On se morfond sur l'absence de nos parents et d'affection dans nos vies.
-On a le droit de se plaindre de temps en temps!
-C'est vrai. Puique l'on ne le fait jamais.
-Exactement. Et c'est pourquoi nous allons faire aujourd'hui tout ce que nous ne faisons jamais.
-Et par quoi on commence?
-Une danse?"

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