Eclats d'Amour

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« Il y a comme la mélodie d'un piano dans le ciel »

Une radio ancienne qui grésillait légèrement. Une chanson joyeuse qui rappelait ces romances, naissantes et adolescentes. Une bande d'amis, du moins en apparence. Des liens profonds, fragiles, tangibles, tacites. Des regards qui se croisaient puis qui fuyaient. L'embrasement de quelques cœurs serrés. Un feu de camp qui luisait dans la nuit. Une fumée opaque qui s'envolait tout là-haut. L'immensité ébène rien qu'à nous. Des points lumineux pour veiller et pour nous permettre de rêver. L'infini ténébreux, l'immensité silencieuse, lieu de promesses et de souhaits d'éternité. Une espérance, un éclat lumineux, un tracé merveilleux, la révérence de notre Majesté à nos paroles capturées.

Reine lunaire, celle de la moitié d'une journée. Partenaire du jour, de l'astre solaire, auquel elle est inlassablement enlacée, la nuit nous berçait dans la fleur de notre adulescence. Impénétrable, interminable, son silence et son firmament offraient des souvenirs qui s'encrent, qui nous traversent, qui nous transpercent.

À y regarder de plus près, ma peau pourrait renfermer leurs vestiges, leurs mémoires, leurs rêves. Cette main douce contre ma paume. Ces bras forts entourant mes frêles épaules. Ces doigts délicats parcourant chaque centimètre de ma peau nue. Ces mots tendres murmurés au creux de mon oreille. Ces yeux noisette croisant les miens, en attente des siens.

Il s'engouffra dans les ténèbres un instant. Mon cœur loupa un battement, se demandant où il était passé. Tout le monde chantait, une douce symphonie des cœurs. Celle qui réchauffe, celle qui t'entoure d'une aura chaleureuse, celle qui couvre toutes les blessures. Ses yeux brillèrent au loin, à la lueur du feu de camp. Son corps apparut tout entier quelques secondes plus tard, comme s'il sortait d'un rêve obscur. Une guitare à la main, il s'apprêtait à nous jouer son morceau préféré.

Applaudissements frénétiques de nos compagnons de fête. Un vacarme dans la mélodie des cieux, annonciateur de l'arrivée de la tempête. Le vent guida les nuages vers le nord. Les premiers accords nous donnèrent l'envie de bouger nos corps. Instinctif, incorporé, une symbiose entre les sons et les mouvements. Toute la bande virevolta, de gauche à droite, de droite à gauche. Des rires éclatèrent, bruyants mais sincères, francs mais éphémères.

Chacun partageait cette joie immense, débordante, comme une effusion lyrique et d'amitié. Il me regarda intensément et des frisons parcoururent mon échine, cherchant une issue de secours. Ma bouche ? Certainement, un gloussement étouffé. Mes yeux ? Assurément, un éclair furieux jaillissant. Mon cœur ? Évidemment, un tambourinement sourd.

Dans ce firmament étoilé, des tâches grisâtres s'amoncelaient progressivement. La pression atmosphérique diminuait. L'air se rafraichissait au point de déclencher un frisson à l'arrivée des premières bourrasques. Le ciel était en dépression, prêt à déverser ses premières larmes sur nous. Fragile, instable, il fut désormais accompagné de nuages qui gonflaient lentement, flouant la vue de la nuit. Je crus sentir une première goutte de pluie sur le front. Celle-ci s'évapora presque instantanément par la chaleur dégagée du feu de camp.

Quelques notes de piano plus aiguës, plus pointues. La chute d'hallebardes interrompit notre spectacle chantant dans une cacophonie excessive et directive, nous empressant de se réfugier au plus vite. Les vents halés de la campagne avaient laissé place à l'odeur du pétrichor, fraiche et sucrée, s'échappant du sol calciné par l'été.

Rescapés de la tempête qui se déchainait à l'extérieur, nous aménageâmes l'intérieur du gymnase auquel nous avions accès grâce aux doubles des clés d'un de nos compagnons de soirée. Il y avait du bon à avoir de bonnes connaissances, dont le fils d'un professeur d'éducation physique. Des coussins confortables, des couvertures, des tapis pour que le tout soit agréable. Nous fûmes ravis de finalement changer d'ambiance et d'atmosphère.

Recueil de nouvelles | 2018 à 2020Où les histoires vivent. Découvrez maintenant