Recueil de nouvelles | 2018 à 2020

Une étoile est née

— Poussez Madame, m'annonce Nicole, la sage-femme, en tapotant ma jambe gauche posée sur l'étrier. Encore, encore, encore, m'encourage-t-elle alors que mes forces m'abandonnent.

— Allez Elodie, reprend Maxime, je suis avec toi !

Je le sais bien, idiot. D'ailleurs, je suis certainement en train de te broyer la main. Même si ça ne doit être qu'une fraction de tout ce que j'endure, malgré la péridurale. Cependant, ton regard doux et passionné me donne la force nécessaire. Je vais y arriver, ma petite Stella, ils sont tous là pour célébrer ton arrivée.

— Je vois la tête du bébé, se réjouit Nicole, il ne reste plus qu'une dernière poussée et on pourra accueillir Stella parmi nous. On y retourne quand vous êtes prête !

Je vois ce pouce en l'air et j'imagine le sourire tendre de Nicole derrière son masque. Allez Elodie, une dernière fois ! Je prends une grande inspiration, je sens la contraction, c'est maintenant ou jamais. Enfin, « jamais », non. Bref, je me comprends. Maxime, prépare-toi, parce que là, tu vas avoir besoin d'une bonne dose de glace pour ta main droite...

— Maintenant, crie-je tout en serrant la main de Maxime et l'accoudoir droit de mon lit.

— C'est très bien Madame, me félicite la sage-femme, voilà stop, c'est bon !

C'est à ce signal là que j'ai senti mon corps tout entier se relâcher. Je vois ce petit être arriver dans mes bras. Mon petit bébé. On me félicite tout en la posant sur un drap propre. Je lui caresse la tête et les larmes perlent au coin de mes yeux. Je craque face au florilège d'émotions qui me submerge. Elle est magnifique. Je suis dans un état second. La fatigue mélangée à l'euphorie ne m'aide pas à comprendre ce que je viens de réaliser. Maxime pose ses lèvres contre mon front, une fois, deux fois, trois fois. Nos regards se croisent et je ressens son amour si profond.

— Vous voulez couper le cordon, monsieur ? Propose une autre infirmière à mon mari.

— J-je préfèrerai qu'une professionnelle s'en occupe, balbutie-t-il avec un air partagé entre la surprise et la gêne, si ça ne vous dérange pas, rajoute Maxime avec un sourire.

— Pas de souci, bravo à tous les deux, nous félicite Nicole qui s'empare de la paire de ciseaux.

« Quelque chose ne va pas... »

Soudain, j'ai cette petite voix qui me fait remarquer que Stella n'a pas encore poussé son premier cri. Très vite, le personnel médical autour de moi s'en préoccupe également.

— On va prendre votre petite, il faut qu'on désobstrue rapidement le liquide qui est présent dans ses poumons, pour l'aider à respirer, m'explique Nicole qui prend Stella dans ses bras. Je reviens vous donner des nouvelles dès que j'en ai, m'assure-t-elle sa main sur mon épaule.

* * * * *

Plusieurs minutes qui me semblent être des heures passent. Je suis seule, un peu angoissée, même très angoissée pour être honnête. Maxime est parti prendre des nouvelles auprès des infirmières et du pédiatre. La porte s'ouvre, je vois Nicole revenir. Elle n'est pas seule, elle a un petit chariot qui l'accompagne. Je comprends très vite qu'il s'agit en réalité de ma petite Stella.

— Je vais devoir hospitaliser votre petite, m'annonce-t-elle, elle a beaucoup de mal à respirer donc on va devoir la monter en réanimation et effectuer des examens complémentaires.

Cette nouvelle me brise le cœur. Je n'arrive pas à réaliser exactement ce qui se passe. C'est comme si tout à coup, le ciel me tombait sur la tête et que je devais gérer un ensemble de facteurs incompréhensibles. Elle voit bien que je réponds « D'accord » avec une forme d'appréhension. Je sais que ça va être dur pour Stella. Ce n'est visiblement pas encore gagné. Elle est là, derrière cette vitre en plexiglass. Instinctivement, je pose ma main dessus alors que Nicole continue à expliquer la procédure. Je remarque que Maxime est bien là, l'épaule contre le coin de la porte. Il a cette moue inquiète qu'il n'arrive jamais à cacher. La situation est plus compliquée qu'on ne l'aurait souhaité...