Déploie tes ailes

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La brise légère me réveille lentement. Je suis couché sur une pelouse, aux herbes hautes. Le parfum subtil des fleurs vient me délivrer de mes songes. Étrangement, je me sens lourd. C'est même une sensation loin d'être agréable. Je me sens meurtri. Quelque chose au fond de mon cœur brûle, avec insistance. C'est encore elle.

J'ai l'air de m'être endormi en plein milieu d'une randonnée. Je suis encore recroquevillé sur moi-même, un sac de rando entre les bras. Je me détends légèrement et j'entends certains de mes os craquer. Mes mains caressent les longues brindilles vertes qui auraient pu s'élever jusqu'au ciel. Un vert doux, calme, reposant, qui dénote totalement de l'état dans lequel je suis.

Instinctivement, je tourne ma tête à gauche, puis à droite. Mes mains inspectent mon visage comme pour me convaincre que tout ceci n'est pas un rêve. Je me relève doucement en m'appuyant sur le sol recouvert d'une fine pellicule de terre et de sable. Le paysage doré par le soleil est somptueux.

Debout, mes mains parcourent les hautes herbes qui arrivent jusqu'à ma taille. J'avance lentement, sans vraiment savoir où je vais. Ma première réaction est de me rendre compte que je n'ai pas mes chaussures aux pieds. Je sens la panique s'emparer de mon être. [Où sont-elles ?]. Je me décide d'avancer pour essayer de voir si je ne les aurais pas laissées quelque part, par inadvertance.

Le soleil est entrain de se coucher et les nuances d'orange teintent le ciel d'un magnifique dégradé. J'entends le sifflement du vent dans l'herbe et le chant des criquets. J'ai l'impression de m'être réveillé à la fin d'une journée estivale. Les nuages sont rares. [Où est mon sac à dos ?]. L'atmosphère est agréable et m'enveloppe tendrement, comme si elle tentait de me faire un câlin. Une chaleur qui se différencie de celle qui brûle à l'intérieur de mon cœur. Son souvenir me fait frissonner. Tous mes poils se hérissent, comme si l'air venait de se refroidir tout à coup.

Les rayons du soleil faiblissent. Le spectacle orangé se décline vers le mauve. Les points lumineux commencent à apparaitre dans l'immensité des cieux. La mélancolie me prend à la gorge. [Où suis-je ?]. Mon cœur palpite. J'ai l'impression qu'il y a un fantôme qui me hante. Une personne qui m'appelle. Soudain, je distingue une ombre quelques mètres plus loin, sur un plateau rocheux. Je plisse les yeux, mais rien à faire, l'obscurité m'empêche de discerner la silhouette qui me fait signe.

Je suis pris d'une envie folle de courir, même si c'est loin d'être mon point fort. Un sentiment me prend à la gorge, comme si le début de la nuit pouvait m'empêcher d'atteindre le passage sinueux qui me mènerait à elle. Le vent s'intensifie et est plus insistant. Il souffle dans mon dos, comme pour me pousser à m'aventurer tout là-bas. Je me lance dans une espèce de course poursuite, à en perdre haleine. Je sens mes joues rougir et mes membres tomber lourdement au sol. J'entends des sifflements provenir du fond de ma gorge, signe que mes poumons n'arrivent pas à suivre la cadence.

Durant cet effort surhumain, je grimpe avec difficulté tout en vérifiant que chacune de mes prises est suffisamment solide pour ne pas me faire tomber. [Mais qu'est-ce qui se passe ?]. La roche est froide, sans vie. Tantôt lisse, tantôt âpre. L'air est plus vivifiant et m'aide à retrouver mon souffle. L'astre solaire est entrain de tirer sa révérence, s'effaçant derrière l'horizon pourpre.

Je passe ma main sur mes muscles froissés et peu habitués à autant d'exercice physique intense. C'est alors que je remarque cette plaie sur ma peau, à l'endroit du cœur. Mon index parcourt cette blessure qui ne semble pas s'être refermée. [C'est cela qui me fait si mal ?]. Elle suinte légèrement, mais rien de bien inquiétant, à première vue. Peut-être s'est-elle ouverte durant cette course, suivie de cette redoutable ascension ? Qui sait ?

Recueil de nouvelles | 2018 à 2020Où les histoires vivent. Découvrez maintenant