Alors que je fume une cigarette sur le petit balcon de mon appartement en cette nouvelle matinée, Alec m'appelle pour organiser une séance de sport aujourd'hui.
-Vers 21 heures ? Ça te convient ? me demande-t-il alors que j'entends à peine ce qu'il baragouine tant il y a du bruit derrière lui.
-Putain mec t'es où ? J'entends que dalle.
-Je suis dans un magasin. 21 heures, ça te convient ?!
Bien évidemment, j'accepte.
-Parfait.
Avec tout ce que j'ai envie de fuir ces temps-ci, je ne refuse pas une heure et demie de répits, et il raccroche à la seconde même où j'approuve. Et toute la journée, je n'attends qu'une chose, que le temps passe plus vite. Je suis si impatient, que lorsqu'arrive vingt heures, je suis déjà dans ma caisse pour rejoindre la salle.
Après quelques tours inutiles, où j'ai décrassé ma voiture, j'arrive vingt minutes à l'avance. Je me décide à commencer mes échauffements sans lui, histoire de ne pas perdre mon temps. Il débarque cinq minutes en retard, et s'excuse avant de s'échauffer à son tour, tandis que j'ai déjà fait plusieurs enchainements.
-Désolé mec, j'ai couru partout toute la journée.
-On va bien s'amuser alors !
-Épargne-moi un peu, je suis épuisé ! se plaint-il en gémissant comme un gosse.
Une fois ses échauffements terminés, je me plante face à lui, déterminé.
-Mec, on se fait un round dans la salle de boxe ?
Ses épaules s'affaissent, et il les roulent pour les détendre, visiblement déjà fatigué par ses exercices.
-Putain, je suis déjà claqué au bout de quinze minutes, et tu veux me faire monter sur un ring ? Ménage-moi un peu, j'ai une semaine de travail acharné dans la tête.
-Et moi une semaine de boulot dans les pieds. Reprends toi mec, tu n'as pas soixante ans !
Il lève les yeux au ciel, néanmoins, il me suit. Après avoir enfilés nos gants, nous commençons par nous chauffer contre des sacs de frappe, histoire de se remettre dans le bain.
-Qu'est-ce que t'as fait aujourd'hui ? j'engage tout en envoyant la première droite sur mon sac.
Il se met à faire de même, tout en me répondant :
-J'ai profité de ma journée sans me prendre la tête avec le boulot. Et merde, ça fait du bien!
-Il te malmène encore ? je demande alors, en contournant mon sac et donnant quelques coups.
-Qui donc ? réplique-t-il en s'exerçant à éviter le sac qu'il fait tourner.
-Ton boss.
C'est bien lui qui s'en plaint tout le temps! Comme si ce n'est pas évident. <
-C'est le prix à payer quand on veut grimper les échelons. Mais je ne resterai pas longtemps. Une fois que j'aurais réuni la somme nécessaire, je pense me lancer à mon compte.
Il en faut une sacrée paire pour projeter de se lancer seul dans un tel milieu professionnel, mais Alec est solide, et je suis sûr que son travail finira par payer. Enfin, c'est ce que j'aurai sûrement pu croire si seulement je ne savais pas que la vie n'était qu'une belle garce.
-J'espère que ça va marcher, ces temps-ci, on ne peut pas dire que c'est facile pour les jeunes de se lancer dans une auto-entreprise.
Il continue de travailler ses esquives en tournant autour de son sac, alors que je me remets à frapper le mien.
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Charlie : Je t'aimerai pour deux
RomanceEnzo est un jeune homme complexe, perdu entre ce qu'il aimerait être et ce qu'il est. Lui qui n'a connu que la douleur et la solitude durant toute son existence, entre une famille déchirée et une violence quotidienne, n'est plus le même depuis qu'il...