-Putain... je sais pas si j'ai envie de te tuer tout de suite, ou de te pourrir avant de le faire ! Tu fais chier Charlie. La prochaine fois que t'as une idée brillante comme celle-là, tu peux te la foutre au cul !
Ma voix grésille, lorsque je laisse toute ma rage la rendre si fébrile en criant un bon coup. Mes mains n'ont jamais autant tremblé qu'à cet instant, emplies d'une énergie débordante, démangées par la colère qui m'anime. J'aimerais briser les vitres, fracasser l'habitacle, déchirer les sièges, enfin, tout ce qui pourrait les aider à se soulager ! Ma fureur les excite, à chaque fois que la voix de ce connard prononce le moindre mot dans ma tête. C'est comme s'il était toujours là. Comme s'il ne disparaissait jamais vraiment. Il fait partie de moi. Peut-être que je me déteste pour ça. J'ai l'impression que, chaque jour qui passe, je deviens un peu plus lui.
C'est dingue ! Cette colère qui m'envahit, n'a donc pas de bouton off ? Comment puis-je l'éteindre à jamais ?
J'en deviens incontrôlable. D'un coup de sang, mon poing s'abat sur la première chose que je trouve, et le battant de la boite à gants s'ouvre brutalement, sous le poids de ma colère.
Je regrette instantanément mon geste, quand mes yeux se posent sur son visage délicat, ridé d'inquiétude, marqué de stupeur. Charlie ne trouve rien à ajouter, alors elle reste muette. Il n'y a rien à en dire, c'est certain. Elle peut bien se taire, ça ne changera rien. Elle a commis la pire erreur qu'elle pouvait faire.
Quel idiot ! Quel putain d'imbécile ! Je ne peux lui en vouloir, de rien ! Car, tout est ma faute. Rien ne serait arrivé si je n'avais pas eu foi en elle. Je suis le responsable, parce que j'ai cru qu'elle pourrait m'écouter. Comme si elle aurait pu rester en place ! J'aurais dû me douter qu'elle n'accepterait pas d'obéir - si ce n'est d'écouter !- pour une fois dans sa vie, puisqu'elle n'en a toujours fait qu'à sa tête !
Et ça me rend complètement fou, parce que j'aurais pu tout éviter.
-Je ne voulais pas...je ne savais pas que... essaie-t-elle de se justifier, d'une voix chevrotante.
Je n'aurais pas pensé l'entendre si prudente, elle qui adore me pousser à bout. C'est que, son taux d'adrénaline doit redescendre à l'heure qu'il est, tandis que le mien n'est pas décidé à l'imiter. Je suis si... furieux ! Et la tristesse qui m'habite la rend plus mauvaise encore.
Quand j'ai entendu ce que lui a dit cette ordure, je n'ai pas eu besoin d'ouvrir les yeux pour me précipiter hors de la voiture, car je savais instinctivement où aller. Quand je les ai vus face à face, j'ai cru n'être pas réveillé. Mais, ses mots... la façon dont il la menaçait...les suggestions dans sa voix...son regard de bête sauvage... je n'aurais pas pu les imaginer moi-même ! Même mes cauchemars sont plus doux que cette terrible scène. Et puis, ses doigts. Ses doigts serrés contre sa peau si fragile et sa mâchoire tremblante... Sa haine. Sa peur. Ces images, je ne les oublierais jamais. Je ne pourrais oublier les mains de mon père exercer leur emprise sur elle. Même si elle ne l'avouera jamais, je la savais terrifiée. Comment aurait-il pu en être autrement ? Moi-même, je l'étais. J'ai pensé, aura-t-il une limite ? Serait-il capable d'aller jusqu'au bout pour me faire souffrir davantage ?
J'aimerai effacer ces dernières minutes de ma mémoire, mais elles s'amusent à passer en boucle dans ma tête.
J'aurais dû l'achever.
C'est simple, je ne peux plus vivre dans le même monde que cette ordure. Je n'ai plus de force, plus rien à puiser au fond de moi, ni de putain d'humanité à éveiller. Ce ne sont que des conneries ! J'ai donné tout ce que j'avais pour supporter son existence, mais c'est fini. Je sais qu'il est trop tard. Après cette nuit, il n'y a plus de retour en arrière possible. L'un de nous deux doit disparaître, une bonne fois pour toute.
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Charlie : Je t'aimerai pour deux
RomanceEnzo est un jeune homme complexe, perdu entre ce qu'il aimerait être et ce qu'il est. Lui qui n'a connu que la douleur et la solitude durant toute son existence, entre une famille déchirée et une violence quotidienne, n'est plus le même depuis qu'il...