CHAPITRE 22 : UN TROU BÉANT DANS LE CŒUR

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Je me réveille avec le corps rempli de courbatures du fait que j'ai passé ma nuit sur ce sol dur. Je n'avais aucune force pour retourner dans notre lit. Puis je n'avais pas le courage d'être seul avec son odeur sur son oreiller alors qu'il n'est pas proche de moi. De plus, Dryss n'est pas rentré cette nuit, je pense qu'il a dû se réfugier à l'hôtel. Je me prépare sans en avoir l'envie, mais le boulot m'attend. J'espère qu'il sera présent, qu'il n'abandonnera pas Jessy. Je sais pertinemment que je les mets dans une très mauvaise posture, que ce soit lui ou Jessy. Le tournage n'aura pas la même gaieté, pas la même joie et ça risque de se ressentir dans les séquences de tournage.


J'arrive devant le préfabriqué du rouquin qui nous attend. Mon partenaire n'est pas encore là. J'espère qu'il fera vite son apparition.

- Tu n'es pas avec Dryss ? demande le producteur en regardant partout autour de nous.

- Non, il n'a pas dormi à la caravane cette nuit, répondis-je avec une voix que je souhaite calme.

- J'espère qu'il ne sera pas en retard ! m'informe-t-il en retournant à ses occupations.

- À qui le dis-tu ? chuchotai-je dans ma barbe.

Je sors mon portable pour lui envoyer des messages lui demandant de venir, de ne pas faire faux bond à Jessy malgré nos différents. Il me répond par le silence. De toute façon, c'est tout ce que je mérite de sa part. Il doit croire que j'ai joué avec lui, comme tout le monde pourrait croire. Tout le monde pourrait me prendre pour le plus grand des goujats. Mais j'avais ce besoin de vivre mon aventure avec cet homme merveilleux, de partager un amour sincère même si ce n'était pas long. Je sais à côté de quoi je passe maintenant.


Le bruit d'une porte se fait retentir, je me retourne et vois Dryss sortir de sa voiture. Il est dans le même état que moi. Son visage est plus pâle qu'à son habitude. Ses yeux sortent de ses orbites tout en étant boursouflés, signe qu'il a pleuré toute la nuit. D'horribles cernes ont élu domicile sous ses océans bleus. Il est habillé exactement comme hier, n'ayant pas pris la peine de prendre un sac avec lui. Il me lance un regard noir. Il a envie de me tuer, j'en suis convaincue et à sa place, je l'aurais fait sans hésiter. Je n'ai qu'une envie : fuir, partir loin pour ne pas voir ce mépris dans ses yeux.


Il passe à côté de moi sans même me regarder. Il m'ignore totalement.

- Dryss, attends, il faut qu'on se parle ! osai-je prononcé en lui agripant le poignet.

Il se retourne militairement vers moi. Ses pupilles devenues rouges tel un taureau voulant abattre le torero qui s'agite devant lui. Il se débat de mon emprise.

- Je n'ai rien à te dire, moi ! répondit-il froidement, ses yeux sont injectés de sang.

- Ben moi, si ! fis-je désespérément.

Il tourne les talons me faisant, bien comprendre qu'il n'a vraiment pas envie d'entendre ce que j'ai à lui dire. Mais têtu comme je suis, je le rattrape.

- Dryss, s'il te plaît !

- Tu veux parler alors écoute-moi bien, d'accord ! s'énerve-t-il en pointant son index sur mon torse. Hier, j'avais besoin de toi plus qu'à n'importe quels moments, dit-il en me poussant. J'ai affronté Bill et tu n'as pas idée de la façon dont ça s'est déroulé, crie-t-il en faisant sortir toute sa rage ainsi que sa haine. Et pourtant, malgré tout, j'ai réussi à le quitter et à lui lancer un ultimatum, hurle-t-il.

Mes yeux sont grand ouverts. Je suis à la fois surpris, étonné et terrifié. Je ne l'ai jamais vue dans une telle colère noire à s'emporter comme il le fait à l'instant devant moi. Pourvu que je sois dans un cauchemar. Je me pince discrètement la cuisse mais non je suis bien réveillé et devant un Dryss qui déverse sa rage. À vrai dire, il n'a pas tort.

LE TOURNANT DE MA VIEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant