Heure 8

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« Il faut relever l'esprit de l'homme, le tourner vers la conscience, le beau, le juste et le vrai, le désintéressé et le grand. »

Victor Hugo

***

     Mia se propulsa en avant, les yeux grands ouverts, le cœur battant fort sous le stress qui venait de lui tomber dessus avant de découvrir l'endroit où elle avait atterri. Des draps blancs recouvraient son corps qu'elle distinguait à travers un halos de lumière qui passait sous la porte.

    La pièce était elle aussi toute blanche, sans compter les deux tableaux colorés de part et d'autre du miroir plein pied qui lui faisait face. Son reflet lui renvoyait une femme à l'allure perdue, les cheveux emmêlés et les yeux gonflés. Elle portait un pull gris, doux contre sa peau nue.  Elle se rendit vite compte qu'elle avait encore ses sous-vêtements et soupira. Partout où elle mettait les yeux, elle espérait trouver un indice de l'endroit où elle pouvait se trouver. Il n'y avait pas un bruit autour, et son dernier souvenir remontait à son appel désespéré à sa sœur. Pourtant, même s'il elle n'avait aucune idée de l'endroit où elle pouvait bien se trouver, le parfum qui embaumait chaque pièce était bien trop rassurant pour qu'elle ne s'affole.

    Elle se leva prudemment, encore un peu fébrile sur ses jambes à cause de la migraine qui l'emprisonnait. Le pull retomba sur ses hanches, et, ne trouvant pas de bas à sa portée, elle décida de rester comme ça pour commencer son inspection.

    Son regard se porta sur la table de chevet en bois où elle reconnut son portable qui avait été branché. Elle l'attrapa. Aucun nouveau message.

    Avant de le reposer, elle vit une petite note qui avait été laissée en évidence à son nom.

Mia, désolé de vous laisser seule mais je ne doute pas que vous saurez vous débrouiller. N'hésitez pas à fouiller, ni à utiliser la salle de bains. Vous trouverez de quoi vous changer dans le placard à côté du lit. Je reviens le plus vite possible, en attendant, voilà de quoi m'appeler.

Adam

    Au dos se trouvait un numéro qu'elle devina être sien. Elle l'enregistra sur le champ.

    Alors, comme  ça, elle avait passé la nuit avec Adam ? Comment ne pouvait-elle pas s'en souvenir ? Avant de continuer à se torturer l'esprit, elle se souvint d'une voix qui l'avait appelé  avant qu'elle ne tombe. Ce n'était donc pas son imagination.

    Elle eut honte qu'il l'ait vu dans cet état. Pourtant, elle ne pouvait pas s'empêcher de se sentir heureuse de l'avoir retrouvé. Ou qu'il l'ait retrouvé, plus exactement. Elle trouva un élastique à son poignet et attacha sa chevelure brune en un chignon un peu désordonné.

    Mia ouvrit la porte de la chambre et fut surprise par la luminosité de la pièce. Sur le côté droit, on pouvait voir une cuisine américaine dans des tons toujours très neutres, avec un frigo noir sur lequel se trouvaient des aimants qui détonait encore une fois avec l'ensemble. Elle s'approcha des photos qui y étaient accrochées : Adam, Adam avec l'homme de la dernière fois, ce même homme avec une belle femme lors d'un mariage, un chien, Adam et une femme âgée qui souriaient à la caméra,  deux enfants qui se tenaient la main, et assez d'autres pour recouvrir le frigo entier de souvenirs qui n''appartenaient qu'à lui et à son entourage.

    Le plan de travail était plutôt rangé, si on ne comptait pas la tasse qui traînait dans l'évier. Mia ouvrit les tiroirs à la recherche d'une autre tasse et fit couler un café après plusieurs minutes pour comprendre comment fonctionnait la machine.

    De l'autre côté de la pièce, on  apercevait un canapé assez large en face de deux baies vitrées qui amenaient vers un petit balcon. Une télévision se trouvait entre les deux. Sous celle-ci, un meuble qui servait de bibliothèque et Mia sourit en découvrant tous les classiques qu'elle aimait. Il n'y avait que sur la table basse où un désordre monstre régnait, mais soucieuse de déranger,  elle toucha les papiers seulement du bout des yeux. Elle reconnut vite les plans, et les présentations diverses et variées qui lui avaient été présentées au cours des dernières semaines, et elle comprit que là se trouvaient des mois entiers de travail.

    Sur le bord des murs se trouvaient plusieurs meubles dont un qui l'intrigua particulièrement. Un tourne-disque assez ancien était posé sur un meuble en bois, à côté duquel se trouvait une collection impressionnante de vinyles. L'appareil était en parfait état et,  si elle avait su comment l'utiliser, Mia ne se serait pas gênée pour écouter quelques morceaux. Mais, pour ne pas rester dans un silence presque angoissant, elle ouvrit une des deux baies vitrées et s'assit sur une chaise à l'extérieur. Plusieurs plantes donnait vie au balcon gris et déprimant avec vue sur la rue. En plus des moteurs de voitures et des cris des passants, Mia se surprit à entendre les chants d'oiseaux non loin d'elle. Elle sourit doucement avant de siroter sa tasse fumante.

    Même si elle avait l'impression que sa vie à elle venait d'être mise en pause, le monde continuait de tourner normalement. Un constat qui aurait pu être angoissant si elle n'aimait pas autant observer les petits bouts de vie au coin des rues.

    Elle resta une petite heure, assise sur cette chaise en plastique, profitant de la douce lumière du soleil, un livre de Jane Austen trouvé dans l'appartement dans les mains avant de se souvenir d'envoyer un message à son hôte.

De Mia :

C'est Mia. Merci.

    Très peu expressif. Elle espérait qu'il comprendrait à quel point elle lui était reconnaissante sans qu'elle n'ait besoin de sortir le grand jeu.

De Adam :

Heureux de voir que tout va bien. Je serai là pour 14:30, dites moi si vous avez besoin de quelque chose en particulier.

De Adam :

Au fait, ne vous en faites pas pour votre sœur. Elle est au courant.

    Quelle idiote ! Elle avait totalement oublié Stéphanie. Au moins, elle n'avait plus à s'en inquiéter.

    Mia finit son chapitre avant de se décider à s'aventurer dans la salle de bain. En explorant l'appartement, elle avait cru comprendre qu'elle se trouvait derrière une des portes de la chambre. Une fois dans la pièce, elle ouvrit la fenêtre pour aérer la pièce et commença à ouvrir la première porte. Un petit dressing lui faisait face et elle fut de nouveau surprise par le rangement impeccable qui lui faisait face. Les chemises et les pulls étaient rangés par couleur et elle sourit de ce rangement si précis. Elle referma prudemment la porte et ouvrit la seconde.

    La pièce, bien que plutôt petite, était si chaleureuse qu'elle aurait voulu y rester toute sa vie. Elle reconnut la robe qu'elle portait la veille sur l'étendoir et elle rougit en imaginant le moment où Adam avait dû s'occuper d'elle. Elle commença à se déshabiller, heureuse de constater la présence des gels douches et shampoings dans la cabine.

    Le jet d'eau chaude était doux sur sa peau. Elle avait l'impression que tout dans cet appartement était réconfortant, comme un nid douillet, et chaleureux à la hauteur de son propriétaire. Elle aurait voulu rester là des heures, mais elle finit par sortir, enroulant une serviette autour de son corps.

    Elle partit ensuite à la recherche de son sac à main qui était posé juste à côté du lit. Dedans, elle prit sa brosse à dent et un coton imbibé de démaquillant. Devant le miroir, elle reprit une apparence moins effrayante, plus calculée. Plus elle, finalement. Puis elle enfila de nouveau le pull gris qui lui avait été confié et huma le tissu.

    Mia s'assit sur le lit, les cheveux encore humides dans son dos, sans voir le jogging plié là pour elle. Elle fit défiler les dernières nouveautés de ses réseaux sociaux, ne voulant surtout pas jeter un œil à ses mails, sachant déjà que son absence imprévue avait fait le tour des bureaux. Au fur et à mesure des minutes, elle s'était de plus en plus avachie sur le matelas et au bout d'une quinzaine de minutes, elle sentit le sommeil la gagner.

    Ses yeux se fermèrent au moment même où Morphée l'attira à lui. La seule pensée cohérente qui lui parvint était qu'elle aurait au moins dû préparer quelque chose pour son hôte avant son retour.

24 heuresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant