Heure 7

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« Si je me débats, c'est que j'ai peur. Parce que je sais que si j'arrête d'avancer, je vais couler tout au fond. »

Virginie Grimaldi

***

     Mia ouvrit difficilement les yeux. Sa tête lui faisait un mal de chien, et en voyant les bouteilles vides qui jonchaient le sol, elle n'eut pas à réfléchir longtemps à la raison. Elle voulut se retourner mais un bras l'entourait. À côté d'elle, un homme endormi. Encore.

- Punaise, grogna-t-elle en découvrant l'absence d'habits.

    Elle avait l'habitude des plans d'une nuit, c'était sa façon de vivre, aucune raison que ça ne la dérange. Pourtant, elle ne parvenait pas à chasser le regard distant qu'Adam avait eu des semaines auparavant. Elle s'était mis dans un état absolument déraisonnable avant de pouvoir oublier que celui qui se trouvait en face d'elle ne se souvenait même pas de son prénom.

    Elle lui avait donné les traits de celui qui hantait ses pensées presque par mégarde, sans s'en apercevoir. Mais maintenant que la lumière effaçait toute les traces d'ivresse et de nuit qui l'avait entourée, Mia se sentait au plus mal. Elle se rhabilla en vitesse, plus perdue que jamais. Elle n'osait pas même poser ses yeux sur le corps endormi à côté d'elle.

    Son téléphone à la main, elle chercha le contact le plus récent de son journal d'appel, et une fois dans le hall d'entrée, ses escarpins à la main, elle laissa la sonnerie résonner contre son oreille.

- Mia de si bonne heure ! Quel plaisir de t'avoir, petite sœur, ironisa Stéphanie à l'autre bout du fil.

- Steph, j'ai un problème.

- Laisse-moi deviner... Tu n'as pas trouvé ta robe ce matin ? Tu as viré tous nos employés ?  Tu ne sais pas comment te débarrasser d'un amant collant ? Régale-moi, que ce réveil matinal en vaille la peine.

- J'ai rencontré quelqu'un.

- Allons bon ! Tu sais comment il s'appelle au moins ?

- Ce n'est pas le sujet.

- Et quel est-il ?

- Je pense à lui.

- Tu- Attends, attends ! Tu me réveilles à cinq heures pour me dire que tu penses à quelqu'un ? Dans quel pari tu t'es encore engagée ? Oublie moi pour ces jeux stupides et va plutôt te coucher !

    Alors que sa sœur était sur le point de raccrocher, Mia se mit à hurler.

- Je pense vraiment à lui ! Il m'obsède ! Il est dans ma tête, coincé dans mon esprit sans pouvoir en sortir et j'ai la folle impression qu'il y est depuis toujours ! Je n'en peux plus, putain, je n'en peux plus. Aide-moi...

    Les quelques passants à l'air fatigué s'étaient retournés vers la femme hystérique qui s'était écroulée dans la rue. Pour une fois que leur réveil était original, elle les avait au moins distraits pendant quelques secondes de l'atmosphère maussade qui planait sur la ville.

- Eh, Mia. Calme toi. Respire. Tout va bien. Tu es où, là ?

- J'en... J'en sais rien.

- OK. On va faire un truc. Tu vas te calmer pendant une dizaine de secondes, reprendre tes esprits, et tu vas m'indiquer où tu te trouves, s'il te plaît.

    Mia grimaça. Elle détestait la façon dont sa sœur lui parlait. Elle avait l'impression d'être une enfant qui ne savait pas se gérer et qui venait de commettre une bêtise que seuls les adultes pourraient réparer. Cette sensation familière lui était particulièrement désagréable. Elle pouvait compter des années depuis la dernière fois où elle l'avait ressentie. Ces mêmes années qui l'avaient amenées là où elle se trouvait : tout en haut, inatteignable. Du moins, c'était ce qu'elle croyait.

24 heuresOù les histoires vivent. Découvrez maintenant