EPISODE 2 : 22°C (#2)

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Siloë est réveillée par le soleil. Malgré les rideaux opaques du camping-car, un ou deux rayons parviennent toujours à se faufiler dans l'habitacle. Ses paupières sont lourdes, elle aimerait encore dormir, mais la moindre lumière l'empêche de trouver le sommeil.

La veille a été plus mouvementée que prévue. Après leur escapade à la plage, la mission était de trouver un camping où installer le camping-car. Le père de Siloë a toujours été baroudeur dans l'âme, du genre bohème, carpe diem gravé dans le cœur. Les vacances se font au petit bonheur la chance, au gré des envies, des humeurs, des coups de cœurs. Seulement, à trop se laisser porter par son instinct, il vit coupé des réalités. Les hôtesses d'accueil des douze campings auxquels ils se sont présentés n'ont pas manqué de les lui rappeler : « Mais enfin, monsieur, on est en plein mois de juillet sur le bord de mer ! Évidemment, il fallait réserver votre emplacement ! »

Loin de se laisser abattre, ils ont activé le plan B : trouver un parking sans barre de hauteur restrictive, y garer le véhicule sans un mot et attendre le petit matin. La tâche s'est avérée plus compliquée que prévue. Sur le littoral, les parkings sont protégés des amateurs de bivouac qui ont tendance à s'aventurer dans les dunes et les endommager ; pire, certains font du feu. C'est du moins ce qu'a lu Siloë pendant qu'ils sillonnaient les routes à la recherche d'un refuge.

Danaé disait : « On peut se mettre là. » et Siloë répondait : « Non, c'est illégal. » mais Danaé ne voyait souvent pas le problème.

Finalement, ils se sont garés sur le parking d'une ancienne mairie. Le bâtiment délabré est fermé, des herbes grignotent l'escalier de pierre. Sur la porte vitrée, Siloë a lu, écrit sur une feuille volante : « Suite à la fusion des communes, votre mairie a déménagé au 15 Avenue François Mitterrand » Le soleil était couché, ils venaient de passer cinq heures à chercher un endroit où serrer le frein à main. Ils se sont vite endormis. La nuit a été trop courte pour Siloë, il n'est même pas 7 heures quand elle ouvre les yeux.

Pour passer le temps, elle regarde des vidéos sur son téléphone, le volume au plus bas. Danaé dort juste à côté d'elle. Leur couchette est encastrée dans le toit, au-dessus du tableau de bord. La chaleur a été assommante une partie de la nuit, encore juste en-dessous le toit. Danaé s'est battue une partie de la nuit contre les draps, elle a même donné un coup à Siloë, qui a encaissé sans râler.

Au petit matin, son amie semble avoir gagné. Danaé dort en culotte, une jambe par-dessus la couverture. Le regard de Siloë dérape sur la courbure des ses fesses, elle le range aussitôt, mais magnétiques, les jambes de Danaé l'interpellent à de nombreuses reprises. Siloë se sent voyeuse, elle déteste ce sentiment et pourtant elle ne s'en détache pas. Mis à part le sien, Siloë n'a jamais vu de corps dénudé en vrai. Elle a déjà dormi avec Danaé, mais chacune portait un pyjama. Siloë aurait envie de la toucher, de la caresser. Bien sûr, elle ne le fera pas. Ce n'est pas le désir qui lui manque.

Le dos de Danaé se soulève d'une respiration troublée. Siloë, raide, braque son regard sur son téléphone. Fausse alerte, Danaé roupille comme un bébé. Siloë, elle, a besoin de s'extirper de ce cocon étouffant. Elle a faim, elle va aller acheter des croissants. Ils en ont mangés la veille, sur la route, mais en vacances, chaque lever de soleil appelle à une visite à la boulangerie. C'est ainsi que l'on sait qu'on est en vacances : on dort mal et on va chercher des croissants dès l'aube.

Son pyjama est un tee-shirt ample et un short de cyclisme, pas besoin de se changer. Les boulangères sont habituées, elles doivent assister à des défilés de mode tous les matins. Siloë enfile des tongs et prend cinq euros dans le portefeuille de son père.

ChaudOù les histoires vivent. Découvrez maintenant