Chez les Welsh, 23h56
Alors qu'il est assis sur le canapé en train de regarder la télévision, Marlon finit son dîner. Oh, ce n'est pas le typique repas de fête que l'on prépare pour la veille du Nouvel An. Il s'agit de restes qu'il a dénichés dans le frigo: des pommes de terre, des haricots verts, un pignon de poulet et la dernière part de tourte aux champignons qui allait finir à la poubelle s'il ne s'était pas dévoué pour la manger. N'empêche, comme dernier repas, on peut faire mieux.
Alors qu'il change de programme TV pour la énième fois, il pense à sa mère, restée à l'hôpital. En tant qu'infirmière bien sûr. Quand il y pense, sa mère est la seule pour laquelle il a de l'affection. Tout simplement parce qu'il ne lui inspire pas de pitié. Pour elle, il est son fils. Et pour lui, elle est sa mère. Rien de plus simple.
En fait, c'est la seule chose simple qui existe dans sa vie.
Marlon ne connait pas son père. Il ignore pour ainsi dire tout de lui. Son nom, son âge, son apparence physique... Il ne possède aucune photo de son père, tout simplement parce sa mère compte faire disparaître toute trace de son géniteur. Et pour être honnête, cela lui convient très bien. Le jeune homme n'a pas tellement envie de voir à quoi ressemble celui qui a laissé tomber sa mère alors qu'elle était enceinte de lui.
Et de manière générale, il n'a pas envie de faire connaissance avec les membres de sa famille proche. Tout simplement parce qu'ils ont également laissé tomber sa mère quand elle avait le plus besoin d'eux. Par conséquent, elle a dû se débrouiller seule pour qu'ils aient tous deux un train de vie à peu près convenable. Elle a dès lors pris des heures supplémentaires à l'hôpital, ce qui lui vaut de ne pas être souvent à la maison. Et ce soir-là ne fait pas exception.
Elle lui a dit avant de partir: «Je sais que c'est pas facile, Marlon. Mais ça va payer, j'en suis sûre.» Il s'agit bien sûr d'une phrase de façade pour se donner du courage. Le jeune homme n'est pas dupe. Il sait que sa mère se sent souvent au bord du rouleau et qu'il lui arrive de pleurer de longues minutes quand elle croit que son fils ne peut pas l'entendre.
Aussi s'est-il forgé une sorte de carapace, solide et résistante, qui lui permet plus ou moins de tenir le coup. Il est hors de question qu'il ne passe pour un faible à cause des conditions dans lesquelles il vit. Il lui faut serrer les dents, peu importe ce que la vie peut lui balancer au visage. Si sa mère ne parvient pas à garder le cap, il faut qu'il le fasse pour eux deux.
Pour ce faire, il y a deux choses importantes qu'il se doit de garder intactes.
La première: être parfait dans tout. C'est un objectif qu'il s'est donné depuis tout petit. Il se souvient qu'à l'école, un grand nombre d'enfants éprouvaient une admiration sans borne pour leurs parents. Ils voulaient être exactement comme eux. Aussi, quand un de ses camarades lui demandaient: «Et toi? Est-ce que tu seras comme ton père plus tard?», il ne savait quoi répondre. Et ils se sont moqués de lui. Parce qu'il n'avait pas de père. Et cela l'a profondément blessé.
Alors, il s'est imaginé un père qui serait parfait. Un père fort, musclé, et en même temps intelligent et futé. En clair, un père sur qui il prendrait exemple et qui serait son modèle. C'est comme ça qu'il a commencé à prendre très tôt des cours de gymnastique. Il était toujours l'élève le plus appliqué de son groupe, mais ne se mêlait jamais aux autres enfants. Le temps était passé, puis aux cours de gym se sont ajoutés les cours de musculation. Il est devenu en peu de temps le gars le plus baraqué du lycée. Pour ce qui est des cours, il est un élève plutôt sérieux. Il n'est pas le premier de la classe, mais est toujours désireux d'apprendre. Pour les travaux individuels, cela va relativement bien. Mais lorsqu'il s'agit de faire des travaux de groupe, c'est là que ça coince, car il fait tout, tout seul. Ceux avec qui il a travaillé le lui ont reproché mais Marlon n'en avait cure. Il a choisi de travailler seul, et c'est son affaire. Pas celle des autres.
Ce qui l'amène à la deuxième chose importante qui va de pair avec la première: toujours faire cavalier seul. Toujours, et ce quoi qu'il arrive. C'est également un objectif qu'il s'est promis de tenir. Quand il était petit, les parents de ses camarades leur ont défendus de s'approcher de lui parce qu'ils pensaient que, sa mère étant seule, le petit était par conséquent une mauvaise fréquentation. Le garçon en a terriblement souffert, au début. Mais c'est surtout ce qui l'a poussé à se façonner son armure. Une grande armure en béton que personne ne peut ébranler.
D'autant plus qu'un jour, il a cru que quelqu'un à l'exception de sa mère avait enfin un peu d'affection pour lui. Il s'agissait d'une fille de sa classe, en cinquième, qui a accepté de faire son projet en art plastique avec lui. C'était la première fois que quelqu'un acceptait de faire équipe avec lui de son propre gré, sans que le prof n'oblige qui que ce soit. Et la jeune fille s'est révélée être très gentille. Il arrivait qu'ils se croisent dans les couloirs et qu'ils discutent. Et il a fallu beaucoup de temps à Marlon pour se rendre compte qu'il commençait à tomber amoureux d'elle. Tout allait bien jusqu'au jour où il a surpris une conversation entre la jeune fille et une de ses amies. Il n'oubliera jamais la phrase qu'elle a prononcée. «Tu vois? Le truc, c'est que je pense pas pouvoir être réellement amie avec Marlon. Je traîne surtout avec lui parce que, comment dire? Il me fait de la peine, tout seul.»
A ce moment-là, son orgueil a pris un sacré coup de balayette. Tout sentiment amoureux s'est envolé pour ne laisser qu'une haine profonde. A partir de ce moment précis, il s'est juré de ne plus jamais avoir d'amis. Car c'est certain, si les gens essaient de sympathiser avec lui, c'est parce qu'il leur inspire de la pitié. Et pour cela, il faut être le plus désagréable possible. Ainsi, personne ne songera à devenir ami avec lui.
Et jusque-là, il a réussi ses deux objectifs avec brio. Mais ce soir-là, bizarrement, il se sent comme... vide. D'ordinaire, il est satisfait de lui, mais là, il a l'impression que quelque chose lui manque. Ce qui le frustre, c'est qu'il ne sait pas quoi.
Il secoue la tête avec virulence. Il ne faut pas qu'il mollisse. Il ne doit pas défaire ce qu'il a entrepris durant toutes ces années. Cette année, comme les années précédentes, doit se terminer comme elle a commencé. Seul, devant la télévision alors que d'autres familles font le décompte.
9. 8. 7.
C'est alors que le présentateur de l'émission qu'il regarde dit:
-Tout ce que vous avez vu jusque-là n'est qu'une préface. La vraie histoire commence maintenant.
3. 2. 1.
Le téléphone du jeune homme se met à vibrer. En allumant l'écran, il voit un message de sa mère. C'est un texto qui dit:
Bonne année mon chéri
Ce message est accompagné d'émoticônes en forme de cœur.
-Bonne année à tous, murmure-t-il pour lui tout seul.
Ce chapitre marque la fin.... de la deuxième partie! J'espère qu'il vous aura plu!
À présent j'ai quelques questions pour vous: si vous deviez faire un top trois des points de vue les plus tristes pour ces deux chapitres du Nouvel An, quels personnages mettriez-vous?
Et ensuite: quel(s) est/sont le(s) personnage(s) que vous préférez pour l'instant?
Et enfin.... la surprise!
Il s'agit d'un test de personnalité pour savoir quel personnage vous correspond le mieux.
Je vous envoie le lien juste ici:
https://fr.mashallow.com/quizzer/279245/quel-personnage-de-la-famille-roberts-es-tu-
N'hésitez pas à me dire quel personnage vous êtes dans les commentaires!
VOUS LISEZ
La Famille Roberts
Ficção AdolescenteJames, un jeune adulte resté enfant. Alex, un jeune garçon nerveux et timide. Rebbie, une jeune fille obsessionnelle qui ne veut rien lâcher. Voilà comment est composée la fratrie Roberts. Une fratrie vivant dans la grande ville de Détroit, dans l...