Accorde moi cette danse

2| côté cour

Voler m'a toujours sembler impossible, et pourtant j'ai eu l'impression que l'impossible était devenu possible le temps d'un instant précis pendant le Phoenix. Le lancé de grâce était risqué, mais c'est ce qui donnait à la scène de la renaissance toute son authenticité. Elle nous procurait l'adrénaline nécessaire pour affronter chaque possibilité des conséquences de cette chute.

- Betty, en place. Puisque tout à l'heure tu semblais si enjouée de nous danser la renaissance alors tu seras la première !

Je parais très sévère et cynique avec elle, mais je veux qu'elle comprenne que ses actes ne resteront pas impunis et qu'il y aura toujours des gens pour défendre les innocents et les victimes. La blonde se place côté cour et je démarre la musique dans l'immédiat. Les notes du piano s'enchaînent tout comme celles du violon et c'est un combat sans fin qui demande beaucoup de rigueur et de précision. Le binôme de Betty commence à perdre la cadence et je sens que le saut va s'avérer être une catastrophe, je les laisse au moins terminer la partie avant le saut et arrête la musique au moment où le jeune homme prend la blonde dans ses bras.

- Ça suffit ! J'en ai assez vu.

- Mais c'est vous qui vouliez qu'on fasse le saut ! s'exclame Betty, frustrée que je l'aie coupé dans son petit spectacle.

- Et j'ai constaté que vous aviez perdu la cadence juste avant que vous n'arriviez au centre de la scène.

- On aurait pu se rattraper ! rétorque Betty.

- Ça suffit ! dis-je si calmement que mon ton en surprend plus d'un. Vous devriez me remercier de ne pas vous avoir laissé continuer à vous ridiculiser et en plus de vous faire mal. je déclare sèchement.

- Vous êtes en train d'insinuer que nous ne sommes pas capable de faire ce que vous avez fait ?

- Exactement Betty, vous n'en êtes pas capable. Tu ne fais pas confiance à ton partenaire et ton partenaire est terrifié par toi. Je ne pense pas avoir besoin de te rappeler comment marche un couple de danseurs.

Honteuse et en colère, elle se précipite vers son sac pour ramasser ses affaires et sortir de la salle en trombe, sale gosse. Je soupire et je constate qu'Estelle me jette un regard assez intense, ses yeux bleus la trahissent et je vois une once de joie danser dans ses pupilles, comme si elle pensait que je retrouvais enfin du poil de la bête. Je secoue la tête et fais faire une pause à tout le groupe. Je m'approche de la rousse pour attraper ma gourde et regarder ce qu'elle fait.

- Dès qu'on arrive à Londres je te prends rendez-vous pour un massage et un rendez-vous pour une séance de psy.

- Non ! Pas de psy.

- Laurel... soupire-t-elle, tu en as besoin.

- Pas de psy Estelle, j'ai suivi des séances pendant presque trois mois et ça n'a rien donné.

- Tu es impossible. Addison va me tuer.

Addison aussi renommé Addi ou le démon, n'est autre que ma sœur aînée. Elle a deux ans de plus que moi tout comme Estelle et se sont rencontrées à la fac. Addi était en musicologie et Estelle en art, puis elle a finalement terminé son année pour se tourner vers le management. Estelle est ma meilleure amie, même si elle a rencontré ma soeur avant, nous avons toujours eu cette fusion entre nous et je peux lui dire tout ce que je ne dis pas à Addison.

- Mais non elle t'aime trop pour ça 'Elle.

J'observe les danseurs autour de moi, puis je me dis que je n'ai pas envie de leur imposer mes apprentissages. Je commence donc à délacer mon ruban et retire mes pointes.

- Les filles ! Retirez vos pointes, mettez vous à l'aise. je déclare avec un sourire sur le visage pour les rassurer. J'ouvre les baies vitrées et laisse entrer l'air dans la pièce, ça fait un bien fou, la chaleur abondante humaine commençait à tous nous étouffer. Je m'appuie contre la barre et les regarde tous, assis à terre.