Chapitre 9.

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Le jour arrivait déjà et la vie commençait à s'éveiller doucement. Le silence avait un poids qui n'avait d'égal que les paupières du jeune homme qui manquait cruellement de sommeil. Maintenant assis à même le sol, la tête contre le mur de pierre froid, les vêtements abîmés et les bras pleins d'égratignures, il avait passé la nuit à nettoyer et ranger des armes à feu dans un sous sol insalubre et opaque. Cela était sa punition pour ne pas avoir retenu sur le bout des doigts chaque caractéristiques de la liste abondante de munitions que son père lui avait donné. "Comme ça tu n'en n'oublieras plus une seule" lui avait-il dit avant de l'enfermer dans ce trou à rats. Le temps passait beaucoup trop lentement et le prix à payer pour cet héritage maudit était bien trop grand. Le silence était maître mais ses pensées étaient assez bruyantes dans sa tête. On lui enlevait systématiquement tout ce qui "n'avait aucun intérêt pour la famille" alors que cette famille n'existait pas. Il n'y avait rien de positif à tirer d'un tel environnement et d'une telle enfance. Pouvait-on avoir pires origines ? Il en venait à se demander quel genre d'homme il serait dans la société. Quel genre de personnage il aurait été s'il n'avait pas atterri en enfer. S'il n'était pas né dans la mauvaise famille. Comment s'intégrer lorsque l'on a perdu cette unicité qui fait de nous un tout ? Il n'était qu'une chose brisée et les gros morceaux qu'il lui restait de cœur il les vouait à aimer et protéger son benjamin qu'il aimait beaucoup plus que toute cette affaire de famille et d'honneur. Restait à savoir qu'avait-on fait faire à son frère pendant qu'il était enfermé ici. S'il avait pu s'enfuir il l'aurait fait mais son geôlier n'était pas à provoquer. Il le traquerait et Dieu sait qu'il n'aurait pas hésiter à leur tirer une balle de gros calibre entre les deux yeux pour leur apprendre le respect. Quel respect peut-on apprendre à quelqu'un en le refroidissant ? Un despote et un grand malade, c'est bien ça qu'était Sylvano Maltese. Et il n'y a aucun moyen de lui échapper.

Il était absolument partout, particulièrement dans les cauchemars de Ricardo où il avait apparemment posé son incroyable trône de la terreur. Il était difficile de haïr avec plus d'ardeur. Il se demandait qui avait une haine plus destructrice, lui envers son père ou son père envers lui. Parler de celle qui l'avait enfanté était encore une autre paire de manches. Rien que de penser à cet autre cas désespéré, son cœur se remplit d'une amertume féroce qui lui monta jusque dans la gorge. C'était une prostituée addict au crack que Sylvano avait ramassé on ne sait où pour lui faire des enfants qu'elle haïssait. Ricardo se demandait pourquoi le créateur ne l'avait pas rendue stérile. Ou encore pourquoi lui devait être son fils à elle ? Elle ne méritait pas d'avoir des enfants. Elle déambulait dans la propriété le nez poudré, cherchant avec qui se dévergonder pendant que ses enfants se faisaient tuer par son amant. Il avait la sensation d'être un extraterrestre. Comme quoi il ne suffisait pas d'avoir une progéniture pour être maternelle. Anastasia était tout sauf une mère. Si Sylvano n'était pas là pour torturer ses propres fils, elle les auraient probablement vendus pour s'acheter de la drogue. Son père n'avait jamais aimé cette femme. De toutes manières, il n'avait sûrement jamais aimé qui que ce soit. Ricardo ne savait pas ce que c'était l'amour mais savait pertinemment ce que ça n'était pas: sa vie entière.

Le bruit des pas qui s'approchaient lui fit relever le regard et bientôt il vit Tamano qui venait le libérer. Ce dernier lui adressa un regard dur au quel Ricardo répondit par un autre encore plus farouche en se levant pour aller vers la porte ouverte. Il avait une violente colère à l'égard de tous ceux qui regardaient son taré de géniteur faire vivre l'enfer sur terre à ses fils sans rien dire. On dirait presque qu'ils étaient d'accord avec ses méthodes alors qu'en réalité on aurait pu compter sur les doigts d'une main ceux qui hésiteraient à lui en mettre une en plein cœur. Ils avaient juste peur de lui.

-J'espère que tu as bien compris la leçon bambino dit Tamano d'un ton sardonique face à la mine épuisée du jeune homme

Les seigneurs de Malte Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant