Chapitre 5.6.a - Le nouveau Cycle

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Il sortit brusquement de son coma, relevant le haut de son corps dans une inspiration rapide et profonde comme s'il revenait d'entre les morts, qu'il resurgissait d'une longue torpeur après un dernier souvenir traumatique. Son regard peureux balayait les alentours de manière vif, repassant plusieurs fois dans la pièce pour vérifier que le danger était parti. Il n'était pas là où il se rappelait s'être écroulé. Son cœur battait anormalement fort et il se figea quant il entendit : du calme 115. Cela provenant d'une voix douce et connue de l'opérateur.

Elle reprit : Tu ne risques plus rien.

- 100 ; 116... ; 116, tu es ... vivante ?! J'ai, j'ai vu tout ! Tout le sang sur ton ... cockpit.

- Ce n'était pas le mien. Mais celui de l'assassin. Je ne savais pas si tu étais déjà mort... j'ai quand même écris le message. Mais calme toi, tu n'as plus rien à craindre ici.

Après de multiples coup d'œils autour, surveillant qu'un ennemi ne rentre pas dans la minuscule pièce à l'unique porte close, il redressa son torse. Signe de son rétablissement il reprit un peu plus clairement malgré encore un souffle court, s'adressant à son binôme qui ne laissait entrevoir par son casque qu'une petite zone humaine autour de sa bouche.

- Tu l'as écrit à l'envers ! esclaffa-t-il, la main sur sa blessure.

- Oh ! C'est comme çà que tu me remercie de t'avoir prévenu. En te moquant de moi, plaisantait-elle. Tu sais dans le stress et l'adrénaline j'ai fais ce que j'ai pu. En plus j'ai horreur du sang.

- Je te remercie... disait 115 en se tenant son bandage rougeâtre.

- C'est rien vas, tu aurais fait de même ...

- Merci pour tout : coupa 115. Pour m'avoir sauvé la vie.

- Entre numéro consécutif, on se serre les coudes.

Cette phrase réchauffa le cœur de l'opérateur qui émanait un large sourire. Un peu de solidarité entre numéraire... répétait-il. 116 répliqua :

- Je vois qu'on oublie pas les adages de la formation.

115 demanda : On est où ? Comment as-tu fait pour venir de mon côté du hangar.

- L'assassin que j'ai neutralisé avait un passe de la sécurité qui m'a permis d'ouvrir tous les verrous. Après t'avoir trouvé seul par terre, je t'ai trainé jusqu'à ce petit cagibi.

- Et lui ... l'assassin ? Il est où ?

- Disparu ! Il n'y avait personne quand je t'ai trouvé. Mais avec tout le sang que j'ai vu, je pense que son corps devrait pas être bien loin.

- La voix ! Tu l'as aussi entendu ?

- Quelle voix ?

- Il y avait un vaisseau en approche quand cela s'est passé... le .. l'assassin.

- Un vaisseau ?

116 se leva et se mit en face de 115, de l'autre côté du cagibi. L'opérateur confirma son propos par un acquiescement timide de la tête.

- De qui ? De l'équipage : interrogea 116, qui semblait au son de sa voix ne pas croire son homologue.

- Je ne sais pas, c'était une seule voix que je ne connaissais pas. Les systèmes de défense leur tiraient dessus, pourquoi ?

- Je ne sais pas 115. J'ai été réveillé pour une menace astéroïde.

- Moi aussi mais la voix m'a contacté, peu de temps après. Je leur ai ouvert mon sas. Le vaisseau était là.

- 115, je t'ai trouvé loin de ton sas. Tu l'as vu le vaisseau ? Réellement ?

- Je ... je pensais m'être écroulé proche.. Je ne sais plus, c'est flou.

- C'est pas grave, on va retourner vers le sas quand tu iras mieux.

- Mais toi 116, tu n'as rien vu ?

116 s'assit à ses côté, les jambes tendues au travers de la pièce rectangulaire. Ils touchaient presque l'autre côté avec leurs pieds. Elle sortit de ses poches de quoi manger, qu'elle tendit à 115. Celui-ci s'empressa de dévorer la barre nutritive en l'écoutant expliquer comment elle l'avait trouvé et amené ici, une sorte de range-tout, à plus de quinze minutes de marche du sas de leur affectation.

Il se questionnèrent ensuite l'un l'autre sur l'identité des assassins, des humains pour sure, mais est-ce réellement des membres d'équipages ? Eux seuls ont des badges capable d'accéder aux modules des opérateurs. Pourquoi ferait-il cela ? De toute façon 116 souhaitait mettre au clair l'histoire du vaisseau extérieur avant de spéculer sur l'identité des assassins. Il devaient également glaner des informations sur l'état de la mission, car ils étaient sans nouvelles. Les autres opérateurs pourraient avoir été attaqués également, une sorte de sabordage ou bien un sabotage d'ennemis infiltrés ?

Toutes ces théories n'intéressaient pas 115, qui se demandait plutôt comment ils feraient pour reprendre leur job. Quid d'un astéroïde sur leur secteur ? Il n'y aurait personne pour l'arrêter. Il avait beau critiquer souvent son travail, il était comme tous les opérateurs, endoctriné pour croire leur mission d'une importance capitale. Même dans des circonstances tel qu'une tentative d'assassinat ratée.

C'était en partie la vérité, sans eux il n'y aurait pas de protection contre les menaces extérieures. La conception du vaisseau n'avait pas prévu un système contrôlé par des machines pour s'occuper de cette tâche. Malheureusement pour les humains, l'incroyable efficacité n'était pas leur atout. Pourtant la technologie existait pour tout automatiser à l'époque de la fabrication du vaisseau et ce depuis longtemps,  et c'était encore plus simple quand une IA était à bord. Le choix de faire plutôt appel à des milliers d'opérateurs et opératrices, dans un système décentralisé et indépendant tirait son raisonnement par la peur exacerbée qu'un infiltré, soit hackerait les machines, soit neutraliserait un poste unique de gestion.  Avec la multitude de secteurs couverts par tant de binômes, qu'une zone au sein de ce maillage ne soit plus opérationnel n'était que peu préjudiciable à l'ensemble de la défense.

Après ce court repas, 116 releva son camarade qui avait dormi depuis deux jours entiers. Il titubait encore. Ses blessures au ventre seraient longues à guérir, même avec le gel de cicatrisation rapide utilisé. Mais force est de constater que 115 arrivait à rester debout et pouvait se déplacer lentement. Cela serait suffisant pour quitter le placard en quête de réponses.

Les deux opérateurs n'avaient connu que les quelques mètres carrés de leur chambre de stase ; un demi couloir et un poste d'appontage. Autant dire que l'immense reste de la section ou bien du vaisseau dans son ensemble ne leur était pas familier. Quitter sa routine de vie de 17 ans relatif, l'accident et une tentative de meurtre, voilà une expérience suffisante pour eux d'eux. Par ailleurs, les opérateurs à leurs postes ne suivaient pas d'entrainements de survie. Sans aides de l'équipage ou du personnel mécanique, le binôme ne pourrait survivre bien longtemps.

116 guida 115, elle avait mémorisé le trajet jusqu'au sas. De plus elle avait gardé le badge de son agresseur. Les deux opérateurs pouvaient donc librement ouvrir toutes les portes de la section et les refermer. Ce qu'ils effectuaient soigneusement à chaque fois, afin de protéger leurs arrière, se disant qu'ils entendraient la porte s'ouvrir dans le pire des cas.
Au bout de vingt-trois minutes, ils atteignaient la porte les séparant du du hall du sas de 115.

- Prêt ? demanda 116.

- Oui, ouvres le on sera fixer.


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