Chapitre 1.6.a - Le réveil des sens

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L'officier de pont en charge des communications Très Longues Distances reçut une notification de son espace de vision RA. Ce qui se traduisait par une surbrillance de la capsule quantique chargée dans l'ordinateur qui gérait les communications TLD. Cela signifiait que le vaisseau avait réceptionné un message émis depuis un lieu à des années lumières de leur position. Sous la capsule un bouton clignotait, laissant apparaitre à chaque étincellement le nom du communiquant : PCT. Autrement dit, ils venaient de recevoir une information importante du Poste de Contrôle Terrestre, le QG de l'expédition vers VEGA. Mais aussi la base arrière en cas de pépin.

L'officier demanda en appuyant sur l'interphone du RDO : Le commandant est appelé dans la salle des communications quantiques.

Il répéta sa phrase une seconde fois comme le protocole le stipulait. Puis il commença à analyser le message.

Quelques instants après l'annonce, le commandant de l'Infinité, passa la porte suivi du Capitaine et de quelques autres officiers subalternes. La pièce devint d'un coup exiguë et la promiscuité faisait régner un sentiment pesant sur l'annonceur, qui ne s'attendait pas à tout ce monde.

- Repos : ordonna d'un ton sec le commandant après avoir baissé sa main. D'où provient le message ?

 - Du PCT, commandant.

- Une bonne nouvelle j'espère : ajouta le Capitaine

L'officier commençait à décrypter le message... Il reprit, tout en lisant.

- Oui Capitaine. Le Message stipule que le dernier navire de colonisation a quitté le Chantier Naval Orbital de notre Empire, portant à 10 le nombre du vaisseau en route vers Vega.

- En effet c'est une bonne nouvelle enseigne.

- Le PCT rajoute à la fin Commandant : Nous vous souhaitons bon vent et bonne route. Vous êtes le dernier espoir de l'humanité.

- Que leur sacrifice ne soit pas vain !

Tous les autres membres d'équipage répétèrent cette prière.  Ensuite, les huiles qui commandaient le navire continuèrent un moment à se féliciter et débattre sur cette annonce tandis que l'officier des com' quantiques - le Comquant - (prononcé : Kom-KWante), comme il était surnommé par ses pairs, restait statique. Quand le silence revint, le Capitaine lui demanda :

- Où en sont les autres empires stellaires ?

- Le message ne le mentionne pas. Dois-je utiliser une capsule pour leur demander Capitaine ?

- Le débat reprit parmi les membres des officiers supérieurs sur l'utilisation d'une nouvelle capsule. Un vacarme qui mettait mal à l'aise le Comquant' dans sa petite salle d'habitude paisible. D'autres experts et subalternes virent surajouter à la cohue générale, prodiguant leur avis sur la nécessité d'une telle opération.  Un brouhaha s'installa jusque dans le couloir adjacent à la salle qui était décidément trop petite.

Devant le risque d'éternisation  de la discussion, le Comquant' demanda de nouveau, d'une voix plus fort pour outrepasser les discussions, mais rien y faire. Il usa alors du RDO et cette fois-ci surpris tout le monde :

- Dois-je enclencher une autre capsule ? Le groupe d'officiers se tut et le dévisagea ouvertement.  Il reprit néanmoins : Nous en avons encore une dizaine pour correspondre avec les chantiers spatiaux.

- Une dizaine ? questionna le Commandant.

- Oui onze pour être juste... Commandant.

- Bien nous pouvons en ouvrir une. Faites-leur parvenir le code.

- A vos ordres.

Il se leva, se fraya un passage au travers des personnes présentes dans la petite salle puis celles stationnées dans le couloir, puis prit le chemin de la réserve cryogénique quelques pièces plus loin. A l'intérieur, un autre membre d'équipage le servit, prenant grand soin de mette la capsule dans un container refroidi afin de préserver la chaine du froid. En effet les cartes quantiques à l'intérieur des capsules devaient être maintenues à température très basse, à environ 2° Kelvin. De plus, ce genre d'objet était irremplaçable à bord de l'Infinité, fragile et donc précieux.

De retour, la cohue s'était dispersée. Seulement deux à trois experts continuaient à parler de leur domaine, profitant d'être réunis dans le même espace pour échanger. Quand il rentra dans sa salle, il posa le container sur un piédestal, le temps de retirer la capsule usagée. Mais avant il envoya un dernier message, qui contenait les codes de décryptage et le numéro de la capsule utilisée. En effet la technologie de communication quantique se base sur le fait qu'une particule puisse être intriqué avec une autre. C'est à dire que deux particules, ou groupes de particules, forment un système lié, et présentent des états dépendants l'un de l'autre quelle que soit la distance qui les sépare. En modifiant l'état d'une des deux particules, l'état de l'autre se retrouve subitement changé de la même façon. Il suffit donc que chaque interlocuteur possède une moitié de ces particules intriquées pour communiquer instantanément quelque soit le nombre d'années lumière qui les sépare. Chose impossible avec des moyens de communications classiques qui finiraient par la mort des correspondants avant la réception ou l'envoi d'une réponse.

Cependant ce système quasi miraculeux avait un défaut : toute mesure - lecture du message - provoquait un changement d'état sur la particule et rendait son utilisation ultérieur impossible. Comme une enveloppe ouverte pour lire une lettre ne peut plus être réutilisée. Par ailleurs, il fallait aussi que l'émetteur et le récepteur utilisent la même particule intriquée, sinon il en gaspillerait d'autres pour vérifier des messages qui n'existaient pas. Comment donc savoir qu'on avait reçu un message sans forcement gaspiller des capsules à lire l'état des particules quantiques ? Eh bien avec des correspondance programmées à l'avance et des discussions respectant un délai d'une heure entre les réponse.  Mais par dessus tout, le comquant' terminant une capsule devait envoyer avec son dernier message, le numéro de celle qu'il allait utiliser. Aujourd'hui la numéro 3, attribuée au PCT.  En effet, il y avait un stock de capsules par lieu de correspondance, chaque capsule pouvant relayer plusieurs messages. Un nombre limité d'entre elles avait été chargé à bord du vaisseau.

L'officier des com' déposa la capsule usagée et installa la nouvelle. Il tapa la demande du Capitaine concernant l'état des autres flottes de colonisation puis, il remercia un officier resté là car maintenant on entrait dans le délai de réponse d'une heure. Il était donc urgent d'attendre.


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