Délivrance ✿ Nᥲmgι

15.

Désormais tous les cinq au pied de ma maison, ma mère me demande déjà morte d'inquiétude :

— Yoongi- que- qu'est-ce qui se passe ?

— Il faut aider le gamin, il faut le cacher sinon ils vont l'embarquer.

— De quoi tu parles ? Explique-nous enfin !

La dernière réaction plus dure de mon père ne m'étonne pas. Je me tourne cette fois vers Namjoon et lui fait comprendre en un simple mouvement qu'il peut le lâcher et c'est ce qu'il fait. Sans rien dire, il enlève l'enfant de ses bras pour que mes parents puissent le voir au complet. C'est en voyant l'étoile sur sa veste qu'ils comprennent rapidement la situation.

— Il était seul, sa mère l'a caché, mais elle n'est pas revenue. Vous pouvez le garder ici un moment ?

— Bien sûr.

Ma mère s'accroupît aussitôt et ouvre ses bras pour faire venir le petit garçon. L'enfant ne perd pas de temps et se précipite dans les bras de ma mère, la seule figure féminine réconfortante qu'il peut trouver.

Ma génitrice s'empresse de le faire rentrer dans la maison, au chaud. Mon père, lui, lance un regard remplie de noirceur au soldat à côté de moi avant de rentrer de nouveau chez lui pendant que mon frère sort justement de ma maison, complètement chamboulé par toutes ces informations qu'il vient d'être témoin.

— Tu as fait fort ! Les parents voulaient te revoir, mais ils n'ont jamais précisé que tu devais ramener autant de monde.

La dérision de mon frère me fait légèrement sourire, même dans ces moments-là, il ne peut s'empêcher de plaisanter.

— Yoongi, entre.

Ma mère m'invite soudainement à rentrer dedans et c'est exactement ce que je fais en amenant Namjoon avec moi. Mais ce geste ne plait pas à mon père, qui ne fait aucun effort pour le cacher quand nous nous retrouvons tous dans le salon.

Je n'aurais jamais pensé que j'amènerais Namjoon ici, que j'inviterai un soldat allemand dans ma maison et en compagnie de ma famille. Ma mère nous sert un thé traditionnel coréen alors que mon père ronchonne à mon frère des phrases dur, un peu plus loin, mais qui ne m'échappe pas.

Il me reproche d'amener un militaire allemand ici, mais sans me le dire clairement. Pour autant, il n'essaye pas d'être discret et ces réflexions tombent à l'oreille de tout le monde.
Le contexte me gêne, ces propos aussi, mais je ne peux lui en vouloir, c'est moi qui fais n'importe quoi. Je n'aurais pas dû l'amener chez moi.

— Vous venez de Corée, vous aussi ?

— Oui, mes parents sont de là-bas.

Je ne dirais pas que cette nouvelle plaie à ma mère, mais ça la rassure un peu, je suppose, cette sensation de faire partie du même groupe et d'une même patrie peut nous faire ressentir ce genre de sentiments. Est-ce que Namjoon, le ressent aussi ? Je ne serais le dire.

Personnellement, je ne touche pas vraiment à mon thé qui fume devant mon visage, je suis paralysé de peur, d'appréhension. Mais Namjoon, lui, ne paraît pas partagé mes émotions. Il répond naturellement aux questions timides de ma mère, sans se préoccuper du regard noir de mon père.