10.

47 6 4
                                    


Lundi 27 mai 1944 :

Cela fait deux jours que je ne sors pas vraiment de chez moi. Je n'ai plus de travail et aucune raison pour le moment de partir à l'extérieur de mon logis.

Un groupe d'Allemand est arrivé hier en pleine nuit et à fouiller une nouvelle fois mon appartement, heureusement le dossier et les faux uniformes de SS n'étaient plus chez moi, ce qui m'a évité de nombreux problèmes.

Je pense qu'ils ne sont pas prêts à revenir de si tôt. J'ai assez vite deviné qui était ma voisine qui m'avait balancé, cette femme d'un certain âge qui vie avec son chien est la coupable de tout ça et elle en payera les conséquences quand nous serons libres. J'ai eu quelques informations sur le déroulement du 10 juin, sur l'attentat que nous allons mener. Je n'ai plus rien à faire désormais, ma part du marché est terminé et il ne me reste plus qu'à attendre que tout se passe.

Je n'ai aucune nouvelle de Namjoon. Il n'est pas venu et l'on ne s'est pas croisé depuis ce matin là où nous nous sommes quittés. Cette nouvelle devrait me convenir et c'est d'ailleurs le cas, mais je n'arrive pas être totalement satisfait non plus.

Il va bientôt être vingt heures, je viens de finir de coucher avec Jean et je lui demande de s'en aller d'un ton plutôt froid. Il s'exécute sans rien dire d'autre, il est sûrement déçu, mais il est surtout habitué par mon manège que j'exécute fréquemment.

Ce moment que j'ai passé en sa compagnie était tellement inutile, je n'aurais pas dû l'appeler et lui dire de venir chez moi. Je n'aurais pas dû non plus lui sauter dessus et coucher avec sa personne. Ça ne me ressemble pas de faire le premier pas en matière de sexe avec lui, je le fuis justement en règle générale, alors pourquoi l'interpelée de cette façon ?

C'est comme si l'idée de coucher avec lui aurait pu nettoyer la nuit que j'ai passée avec le colonel allemand. Enfaite, je crois que c'est ça qui m'a poussé à agir de la sorte, mais ça n'a pas réellement eu l'effet escompté.

— Bon, je vais y aller du coup...

— Je te raccompagne.

Je saisis un pull en laine dans mon maigre placard et un sous-vêtement en vitesse avant de descendre avec lui mes escaliers. Il est tard et je ne pense pas croiser mes voisins dans une tenue pareille, je l'espère bien d'ailleurs.

— Tu voudras venir avec moi le 10. J'ai prévu de me poser pas loin de la mairie pour être au premier rang quand le spectacle se jouera.

Je descends les dernières marches et me stoppe au pied de l'escalier en bois. Jean, lui, se tourne dos à la sortie et me regarde en attendant une réponse positive de ma part :

— Je ne pense pas. Je resterai chez moi, je ne veux pas prendre le risque de me faire embarquer.

— Tu sais que je suis prudent, je nous ferais partir avant que quelqu'un ne remarque notre présence.

— Tu es sûrement l'homme le moins prudent que je connaisse et tu voudrais me faire croire l'inverse ?

Mon amant de ce soir lâche un rictus amusé avant de me murmurer d'un air joueur :

— J'ai compris, tu ne viendras pas.

— Ne le prends pas personnellement, je suis simplement bien chez moi.

— Comme tu veux, mais si tu changes d'avis, appel moi.

Je ne compte pas changer d'avis, mais j'acquiesce malgré tout ces propos. Sa main se pose sans crier gare sur ma joue avec délicatesse, puis sa voix me murmure tendrement :

— Prend soins de toi, d'ici là.

Je le remarque bien dans ces yeux, surtout à ce moment-là, l'amour qu'il me porte est si intense qu'un aveugle le remarquerait aussitôt, mais moi, je ne partage pas cette intensité. Je suis attaché à lui, bien sûr, en tant que collègue et notamment amant d'un soir, mais ça s'arrête là.

Délivrance ✿ NᥲmgιOù les histoires vivent. Découvrez maintenant