Chapitre 35

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—Ils arrivent, dit soudain Abdul au loin.

Je sursaute, alerte et me lève aussitôt du sol dur et poussiéreux en posant mes mains sur mes genoux endoloris. Je cours ou plutôt, je clopine jusqu'à Abdul parce que mes jambes sont tremblantes et engourdis. Je crois que mon corps est comme mon cœur, un peu fatigué par ces émotions. Mes vêtements aussi sont marqués, autant par la poussière que les prémices de trous, surtout mon pantalon.

Je m'approche d'Abdul qui se tient debout, au sommet d'une petite bute de terre, à côté de l'entrepôt. Dès qu'il me voit, il pointe du doigt un nuage de fumée dans le paysage qui se rapproche de nous. Je plisse les yeux, jusqu'à voir une moto, suivie d'un camion.

—Regardez, notre chef est de retour et Muhammad est avec lui, dit Abdul fièrement. Puis il prend ses jumelles et secoue la tête, un sourire en coin apparaît sur son visage : Et ils ne sont pas seuls, nos hommes sont avec eux. Tenez !

Je prends les jumelles et regarde à travers. Rachid revient avec le camion volé, accompagné de Muhammad en moto mais derrière eux se trouve aussi tout un groupe d'hommes avec des Lands rover. Ce n'est pas un mirage, Rachid est revenu avec ses hommes sains et saufs !

—On va pouvoir sauver Henri et ma mère ! Dis-je à Abdul.

—Oui, maintenant, nous sommes assez nombreux, me répond-il : Allons à leurs rencontres.

Abdul descend de sa butte de terre pour me rejoindre et nous avançons vers le nuage de poussière. Tandis qu'ils s'approchent, une boule d'excitation se forme dans mon ventre. J'ai envie que tout aille plus vite, de retrouver Henri et ma mère, le plus vite possible. C'est un besoin viscéral mais je sais au fond de moi que l'on ne peut pas foncer tête baissée.

Le camion de Rachid s'arrête devant nous, faisant voler de petits cailloux à mes pieds et de la fumée qui me fait tousser. Puis, Rachid coupe le moteur et sort de son véhicule. Abdul se rapproche immédiatement de lui et lui serre la main :

—Je suis content de vous revoir sains et saufs, Chef, dit-il.

Rachid ouvre la bouche pour lui répondre mais dans un crissement de pneu, Muhammad capte notre attention. Il s'arrête à côté de nous en posant le pied au sol et descend de sa moto, tout sourire.

—Yeah ! Salut, la compagnie, on ne vous a pas trop manqué? nous demande-t-il.

Abdul s'approche de lui, visiblement amusé mais il secoue la tête de négation. Pourtant, pour avoir discuté avec Abdul, je sais que Muhammad lui a manqué.

—Non? dit Muhammad en le regardant de haut en bas, puis il secoue la tête, sourit et se tourne vers moi : Je suis sûr que c'est faux, n'est-ce pas mademoiselle !

—Non, vraiment, ça reste à voir, dit Abdul : ton bavardage incessant ne m'a pas vraiment manqué.

Muhammad pose une main sur son cœur et affiche un air blessé.

—Mais, mon humble personne est indispensable dans cette équipe, dit-il : Sinon, comment ferais- tu pour t'en sortir lors des missions dangereuses?

Abdul secoue la tête amusée puis, penche légèrement sa tête près de mon oreille.

—Vous voyez, toujours un truc débile à dire, me glisse-t-il : J'ai sauvé ce gars plus d'une fois lors de nos missions dangereuses.

Ces mots ont pour effet de faire réagir Muhammad parce qu'il s'approche de nous, en fronçant les sourcils.

—Qu'est-ce que tu dis, mon frère? C'est normal non? Toi, c'est moi.

Mais Abdul détourne la tête, évitant la question. Je retiens un sourire en pinçant les lèvres. Cet échange allège mon cœur.

To HimOù les histoires vivent. Découvrez maintenant