Le temps d'avancer [L.S]

Chapitre 6

Mai 2021

Le temps défile à une allure impressionnante. En réalité, je dis ça, mais tout dépend des jours. Un jour je vais avoir l'impression que le temps est incroyablement long, le lendemain, je vais penser que tout passe beaucoup trop vite et que je n'ai pas le temps de voir le monde défiler.

Ce qui est certain, en tous cas, c'est que je n'ai pas l'impression d'avoir eu vingt ans. Je n'ai pas l'impression que déjà vingt ans de ma vie se sont écoulés.

Ce week-end, je suis rentré chez mes parents. Mes derniers examens du semestre étaient cette semaine. J'avais envie de prendre un peu de temps pour moi et même si malgré les quelques mois qui se sont écoulés depuis ma prise de tête avec ma mère, je n'ai pas l'impression que les choses aient ne serait-ce que commencé à s'arranger. Je pense que je vais essayer de lui parler dans le week-end, j'ai l'impression d'être un gamin à rester sur mes positions, mais d'un autre côté... Non, je vais vraiment essayer de lui parler.

Lorsque je pousse la porte de chez mes parents pendant que mon père gare la voiture. Pendant le trajet depuis la gare, il m'a un peu parlé de ma mère, m'interrogeant sur nos relations actuelles, et contrairement à ce que je pensais, il m'a dit qu'il était d'accord avec moi sur le fait que ma mère avait dépassé les bornes. Il m'a dit qu'il la comprenait, parce qu'effectivement, il aurait aimé me voir un peu plus souvent, mais il se doutait que ce n'était pas toujours ma volonté de ne venir que si peu souvent.

Mes sœurs étaient ravies de me voir, et ça m'a fait du bien aussi pour être honnête. Le samedi matin, j'ai pris ma mère à part, dans l'espoir de lui parler et qu'elle ait repensé à ce qu'elle avait dit.

« Écoute maman, je n'ai pas envie de rester en froid avec toi, comme ça. Mais j'ai besoin que tu saches que tu as été trop loin, tu ne peux pas me comparer de cette façon à Harry, surtout quand tu sais que ça me touche autant, ce n'est pas de ma faute si le trajet entre Paris et ici met si longtemps en voiture et que les billets de train ne sont pas toujours à des prix relativement bas, sans compter que j'ai régulièrement des examens. » je tente de lui expliquer.
« Pour commencer, Louis, tu me parles autrement. Tu n'as pas à me dire ce que j'ai à faire et si les trajets sont si longs, il fallait choisir une fac plus proche de le maison. » réplique-t-elle, me donnant tout de suite un aperçu de la conversation que nous nous apprêtons à avoir.
« Maman... J'avais besoin de partir. Je ne pouvais pas rester dans la région, j'en avais besoin. Pourquoi tu ne peux pas le comprendre ?.. » je demande à ma mère, dans l'espoir d'avoir une réponse.
« Non. Non, je ne peux pas comprendre qu'on ait besoin de s'éloigner autant de notre famille, surtout à ton âge. À ton âge, j'habitais encore chez mes parents. Je ne me suis éloignée géographiquement d'eux que lorsque j'ai rencontré ton père. » me dit-elle, toujours aussi sèchement.
« Mais maman... » j'ai tenté. Mais j'ai vite compris qu'il ne servait à rien de continuer. « Ok, laisse tomber. Je vais aller faire un tour, je crois. Mais je te demande une seule chose. Plus jamais, je dis bien jamais, tu ne me caches que l'une des filles a eu un accident. Que tu m'en veuilles, à la rigueur, tu fais ce que tu veux. Mais je trouve ça hallucinant que l'une des filles doive aller à l'hôpital et que je ne reçoive même pas un seul message. Tu sais que je ne suis pas du genre à parler comme ça. D'autant plus à toi ou papa. Mais il y a un minimum de bon sens à avoir. Tu m'as caché que ma petite sœur a eu un accident merde ! » je crie presque.

Sur ces mots, je me suis retiré, j'ai enfilé mes chaussures et suis sorti. Heureusement pour moi, le mois de mai est plutôt clément dans le sud, et il fait plutôt bon pour un début mai. Heureusement, voir les fleurs commencer refleurir, les arbres plein de feuilles me calme un minimum.

Je me balade un peu à travers le village, prenant quelques calades et rejoins vite la rue principale. Je la descends sur quelques mètres puis tourne à droite à une intersection et me retrouve dans une sorte de petite cour au milieu de laquelle se trouve une fontaine. Je remonte encore un peu et c'est comme si je nous revoyais, là, lui assis sur la pierre, une main appuyée sur les barres qui relient le bord de la fontaine à son centre, l'autre main sous l'eau rejetée par le eau. Il y a plusieurs fontaines dans notre village. Quand je suis arrivé, je m'amusais à visiter le village pour trouver toutes les fontaines. Mais je n'ai plus le compte en tête.