Chapitre 7 - Partie 1

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Juin 2021

Nous avons passé quelques minutes dans les bras l'un de l'autre, sans ne rien faire d'autre que de nous serrer contre l'autre, nous assurant de sa présence, et de sa réalité. Nous étions convaincu que si nous nous lâchions, tout disparaîtrait, et nous refusions de nous rendre compte que ce n'était qu'un songe.

J'aurais pu dire que c'était Lauria qui nous avait ramené à la réalité,mais ce serait mentir. Parce qu'elle a pris soin de nous laisser nous retrouver, s'éclipsant dans sa chambre sans un bruit. Non, nous sommes revenus à la réalité à notre rythme, et je me rends compte que notre réaction peut sembler disproportionnée, mais avoir vécu si loin l'un de l'autre pendant si longtemps, sans qu'il ne me donne d'autres nouvelles que par des lettres auxquelles je ne pouvais pas répondre, c'est comme s'il avait disparu. Vivre loin d'un proche sans pouvoir le contacter, c'est dur. Et c'est pour soulager le poids qui pesait dans ma poitrine que j'ai commencé à rédiger de sréponses aux lettres de Harry.

Nous nous sommes éloignés lentement l'un de l'autre puis nos gestes sont devenus, s'ils ne l'étaient pas déjà, maladroits. Nous nous sommes souris timidement. Et sans que je m'en aperçoive, Harry a avancé son bras, venant simplement frôler ma main de son doigt. J'ai frissonné. Mes doigts se sont contractés, presque imperceptiblement. C'est finalement dans une étreinte de nos doigts si faible que si nous n'avions pas connu le corps de l'autre un jour, nous ne l'aurions probablement jamais remarqué, que nous nous sommes avancés dans le salon. Je n'avais pas mangé, mais eux avaient commandé, et m'avaient pris quelque chose. Nous sommes d'abord restés silencieux, presque gênés de la présence de l'autre, une grande première pour nous deux.

Harry a fini par commencer à parler, mais comprenant de quoi il allait parler, et étant conscient que cette conversation serait, comme celle que j'ai eu avec ma mère douloureuse sur certains points, même si c'est égoïste, je lui ai demandé que nous n'en parlions pas cesoir.

« Je suis désolé, mais ce soir, je suis vraiment épuisé, j'ai juste envie de me poser tranquillement et de profiter de ton retour. Cela ne veut pas dire que j'oublie que tu es parti, que tes lettres disparaissent, que tes mots s'effaceront, ne t'inquiète pas, j'ai tellement relu tes lettres, que chacun des mots qu'elles contiennent se sont imprégnées dans ma tête, partout sous ma peau... Mais juste pour ce soir, s'il te plaît... »

Mes paroles restent en suspend dans l'air, alors que j'attends une quelconque réponse. Je ne le regarde pas, mal à l'aise de le couper alors qu'il semblait vouloir me donner au moins une partie des explications que je voudrais entendre. Mais juste pour ce soir, le temps d'une soirée, j'aimerais le retrouver sans me prendre la tête, sans que tout soit compliqué... Je suis conscient que ça ne règle pas tout. Mais j'ai l'impression que le temps passe si vite, manque de nous prendre temps de choses en un instant, que nous ne pouvonspas prendre le temps d'avancer à notre rythme.

Pourtant, un jour où l'autre, nous nous rendons tous compte que nous avons besoin de prendre le temps, que sans ça, nous pouvons parfois rester bloquer au même point pendant un long moment, parfois, le temps s'impose à nous, nous empêchant d'avancer trop vite, mais parfois dans ces cas-là, nous nous apercevons qu'il passe beaucoup trop vite, et il peut nous arriver de nous reprocher d'avoir laissé au temps l'opportunité de nous retirer tout un tas de moments.

« D'accord. Mais tu sais qu'il faudra qu'on parle ? » me questionne-t-il avec une mine sérieuse que j'ai l'impression d'avoir observé trop souvent les rares fois où j'ai eu l'occasion de le voir.
« Oui. Et je veux que tu m'expliques tout ce que tu as à m'expliquer. Juste... Pas ce soir. » je lui confie, en détournant à nouveau le regard.
« Je veux juste être certain que tu ne repousseras pas la discussion tous les jours... On ne repartira pas sur de bonnes bases, sinon... » me murmure-t-il dans l'ombre d'un sourire presque attristé.
« Non. Je ne le ferai pas. Si tu veux, demain. Demain, ou je sais pas quand, mais voilà, je te demande juste une soirée tranquille. Sans discussion qui sera dure pour l'un comme pour l'autre. »

Le temps d'avancer [L.S]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant