43 - Genaye

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Il ne comprenait toujours pas pourquoi il était là.

Pour lui.

Une semaine qu'il se terrait comme un renard à Samudr, tout ça pour un albinos.

Il s'appelle Fanrei.

Genaye soupira. Tey'ro avait enfin conscience de sa présence. Mais c'était horrible. Maintenant, l'originel restait éveiller quand il avait le contrôle du corps et il lui faudrait un peu plus de temps pour l'éliminer une bonne fois pour toutes.

Il se leva de son perchoir et s'étira.

Il faut sauver Fanrei.

La ferme.

Étonnement, Tey'ro se résigna et se terra au fin fond de sa conscience. Genaye avait tenté de partir à de nombreuses reprises, mais le thérianthrope l'en empêchait. Ils partiraient seulement si l'albinos les accompagne.

Il descendit de son perchoir en s'agrippant au mur en torchis. Tariumo l'attendait, visiblement irrité.

– Que se passe-t-il ?

– On a plus de chambres. L'aubergiste nous a dégagés et on a plus un rond. Rends-toi à l'évidence faut qu'on dégage de cette ville et qu'on aille sur le continent !

Pas sans Fanrei.

Il regrettait amèrement que Tey'ro partage son corps. Il l'aurait bien frappé.

C'est mon corps.

Genaye râla. Tariumo était le seul Porteur à être resté à ses côtés. Les autres étaient déjà partis de la capitale ou étaient restés auprès des bâtards de Samay. Il avait vendu ses bijoux et le diadème qui portait sa Pierre. Juste assez pour payer une chambre et des tissus pour envelopper Apeke.

Alors ? Avec un peu de chance, on peut avoir un bateau pour Teasan si on se cache dans la calle.

– Pas sans Fanrei.

Les mots lui avaient échappé.

– Fanrei ? C'est qui lui ?

– L'albinos.

– Celui dont tu t'es entiché, railla Tariumo.

Il lui jeta un regard noir, il sentit que ce n'était pas seulement lui qui méprisait le Porteur.

– Je déconne Genaye, se rattrapa-t-il.

– J'espère bien sinon je vais te faire manger tes propres dents.

Une cloche tinta au loin, puis une autre.

– C'est déjà la mi-journée ? s'étonna le Porteur.

Genaye leva les yeux et observa le soleil à peine au-dessus du port.

– C'est encore le matin...

Les cloches ne cessaient pas de sonner, leurs mélodies de plus en plus chaotique. Ce n'était pas normal.

– On dirait une alerte, remarqua le thérianthrope chat.

– Parce que s'en est une.

Ils se regardèrent.

– Ainmuir ne va quand même pas attaquer Samudr, elle n'est pas suicidaire à ce point.

Un craquement se fit entendre au loin. Puis un grondement sourd. Les deux individus levèrent la tête. Par-dessus les toits de terre typique de Kasharhar s'élevait un nuage de poussière brune. C'était là-bas qu'était le palais.

Fanrei !

Tey'ro reprit le contrôle de son corps à ce moment précis. Il se précipita dans les grandes rues. Avant même d'arriver dans les artères principales, il vit les samudri commentant avec horreur le nuage et enfin il posa le regard sur la source du bruit, ou du moins ce qu'il en restait. Une partie du palais royal semblait s'être effondrée, l'autre tenant debout comme par miracle.

Il se mit à courir en direction du palais ignorant Tariumo dans son dos. La panique l'envahit.

Par tous les dieux, faites que Fanrei soit vivant !

Ironique venant de la personne qui en a tué deux.

Il ignora la remarque de l'âme parasite et continua sa course effrénée. Il entendit un sifflement et les exclamations étonnées des habitants. Et finalement, le choc. Il regarda derrière lui. Un entrepôt du port s'était effondré entrainant d'autres bâtiments dans sa chute.

Ainmuir tente de détruire les défenses de la ville avant leur activation.

La pensée de l'intrus s'était imposée à lui.

Quelles défenses ? La ville possède des remparts pour séparer quelques quartiers, c'est tout !

De nouveau, un projectile s'abattit sur la capitale.

Les clochers ne sont pas là pour faire beau, crétin.

La stratégie d'Ainmuir lui sauta aux yeux. Si Genaye disait vrai, la déesse tentait simplement de détruire les clochers, l'un était situé au niveau du port, un autre à l'endroit précis où c'était abattu le dernier projectile. Elle allait tenter d'en détruire le plus possible sur les neuf clochers encore debout.

Tey'ro se tourna vers le palais. Il allait trouver Fanrei et il allait se casser d'ici avant que Samudr ne deviennent un souvenir. Il courut jusqu'au palais, esquivant ses habitants qui s'enfuyaient en poussant certains pour se faufiler.

Il traversa le pont aussi vite qu'il put. Il vit rapidement les navires typiques de Hringsstaoir, c'étaient eux qui tiraient des boulets. Tey'ro s'approcha du palais et trouva une entrée qui n'était pas obstruée. L'aile ouest du palais n'était plus que poussière. Il remarqua des hommes qui tentaient de pousser des débris et d'autres s'enfuirent sans regarder derrière eux.

Il reconnut Saia, qui malgré sa saleté, rayonnait d'autorité. Il sentit quelques choses l'agripper à la poitrine. Il fut soulagé de voir Fanrei, l'entourant de ses bras. Il l'avait retrouvé.

– Je pensais que tu m'avais abandonné, sanglota-t-il.

– Moi ? Abandonner ta bouille ? Jamais.

Il lui rendit son embrassade. Il remarqua que l'albinos était sale, la poussière collait à son corps et à ses cheveux à cause de la transpiration, mais pas seulement.

– Elle t'a emprisonné ?

– Car je suis ton allié, mais je ne pense pas qu'elle m'aurait maltraité, elle m'a toujours bien aimé.

– Comment tu es sorti ? 

– Les portes se sont toutes ouvertes, je ne sais par quel miracle. 

Il ne répondit rien.

Dégage maintenant que tu as ton albinos chéri.

On s'en va Fanrei. Maintenant.

L'albinos le dévisagea. Tey'ro lui prit le poignet et l'amena dehors.

– Que se passe-t-il Tey !

– La conséquence de mes actes.

Ils traversèrent le pont et Tey'ro emmena son ami en direction du fleuve.

Laisse-moi le contrôle.

Une certitude glaçante fit frissonner le thérianthrope. Il s'arrêta net et se retourna. Il prit Fanrei dans ses bras et l'embrassa comme si s'était la dernière fois.

– Je t'aime Fanrei.

Il le fixa un instant et lui rendit son baiser.

– Moi aussi je t'aime Tey'ro...

Il laissa Genaye prendre le dessus. Il eut le temps de voir, avant de sombrer, une lueur incroyable provenant du sommet du palais royal. 

Le clan des disparusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant