14 - Xélion

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Il s'enferma dans ses modestes quartiers. À peine il était entré dans ses quartiers qu'il s'était écroulé au sol. Il s'était passé beaucoup trop de choses en si peu de temps. Il se recroquevilla sur lui-même et se prit la tête entre les mains.

Mais bordel. Qui est-elle ?

Il avait remarqué depuis longtemps la pierre verte reposant dans le creux de la clavicule de la jeune fille. Quand elle avait tué, la pierre semblait briller.

Était-elle une Porteuse ? Un pouvoir d'annihilation pareil n'était pas connu chez ce groupe d'individus, à part s'ils l'ont bien caché. Mais putain ! Si Astrauliope était une Porteuse, pourquoi vivre à Nadéi alors que Prihya pourrait l'accueillir et lui offrir le luxe d'un palais.

Malgré sa logique et sa capacité à prédire les événements, le roux ne parvenait pas à éclaircir ce mystère. Il alla à son bureau est sorti de l'opium fraîchement acquis. Il prépara le nécessaire pour fumer. Il fut partagé entre un sentiment de peur et d'affection envers cette jeune fille, mais surtout de peur.

La porte s'ouvrit brutalement.

– Qu'est-ce que tu nous as ramené Xélion ! Cette gosse est complètement tarée.

Il se redressa et prit une bouffée de fumée.

– Tu t'attendais à quoi ? Cette gamine est recherchée par les gardes pour divers assassinats.

– Qui est cette gosse, elle est humaine, pas elfe. Sa magie n'a rien de naturelle.

Le proxénète regarda Panja froidement.

– Demande-lui, je veux pas finir comme Giriraj et ses copains, surtout que ça à l'air particulièrement désagréable. Et pour l'espèce, si elle est comme moi, elle a facilement pu se mutiler les oreilles. Mais elle, elle s'est mieux débrouillée que moi.

Comme pour illustrer ses dires, il dévoila lui-même ses oreilles éclopées. Il se les était raccourcis volontairement, à une époque où il ne voulait plus être associé à sa famille maternelle.

Le point positif de son action, peu de gens savaient qu'il était un elfe avec une magie de prédilection. Le point négatif, c'est que sur le moment, ça fait mal et qu'il s'était raté, l'obligeant à porter ses cheveux longs pour cacher l'acte irréfléchi d'un adolescent de quinze ans.

– Bon sang ! Elle serait bâtarde ? Ça expliquerait sa magie anarchique...

La porte s'ouvrit sur la jeune fille en question avec sur ses talons, le chien. Elle regarda très mal la sous-maitresse puis son regard dévia sur le maître des lieux.

– Je suis humaine de naissance si tu veux tout savoir, la magie est arrivée après et on me recherche sous le nom du Sanglant.

La maquerelle se décomposa.

– Toi ? Le Sanglant ? déclara Panja avec un ton sarcastique.

– Panja, elle nous l'a prouvé à l'instant avec trois cadavres dans la cour. Et ses trois cadavres auraient pu être les nôtres si elle n'était pas intervenue.

L'assassin s'assit sur le lit de la pièce, puis son chien l'a rejoint et réclama des caresses.

– Xélion, j'aimerais te parler seul à seul.

Elle regarda la femme.

– Est-ce possible.

La maquerelle jura et sortit à contrecœur.

– Que souhaites-tu ?

Le roux aspira un peu de fumée d'opium. Il en a vraiment besoin pour encaisser son traumatise récent. Astrauliope s'en aperçu.

– Parler. C'est moins addictif que la drogue. Et ça coûte moins cher.

Il soupira. Il ne voulait pas vraiment parler, mais s'il pouvait éclaircir le mystère qui l'englobait, c'était peu cher payer.+

– À quel moment tu t'es aperçu de ta magie ? Et pourquoi l'utiliser pour tuer ?

– J'avais seize ans, j'ai rencontré quelqu'un et... j'ai commencé à faire de la magie peu de temps après. Je tue avec car il est plus facile de détruire que de créer avec.

– Et le chien ?

Elle regarda le canidé heureux de ses gratouilles derrière l'oreille.

– C'est un ami, un compagnon. Il m'a aidé, mes amis et moi, à fuir notre peuple. Ikade est devenu un refuge pour nous. Mais il n'a rien d'exceptionnel.

Les yeux dans le vague, Astrauliope semblait tellement influençable et faible pour quiconque n'avait pas vu ses talents.

– Pourquoi avoir fui ta maison ?

– Je ne voulais pas, je me suis trouvé au mauvais endroit au mauvais moment, j'ai failli mourir ce jour-là.

Elle dévoila une cicatrice sûrement causée par un coup d'épée, ou de poignard. Elle formait une ligne au-dessus de son sein gauche.

– Et toi. Pourquoi on t'a mis à la porte de chez-toi.

– Parce que je suis un bâtard. La raison est suffisante.

– Pas pour moi.

Il soupira une nouvelle fois, et face au regard instant de la jeune fille, il déballa son sac.

– Ma mère m'a eu alors qu'elle n'était pas mariée, imagine le scandale à la cour ! Mon grand-père a pris les choses en main et toute la famille s'est retrouvée sur les terres seigneuriales. Je ne dois ma survie qu'à mon sexe et à la rente que versait mon père pour garder secret mon lien de filiation. J'étais le mouton noir, et à quinze ans, j'ai été chassé.

Sable était venu se blottir contre les jambes du proxénète.

– Et ton père ? Il n'a rien dit ?

– Je sais même pas qui il est. Il est riche, c'est sûr vu la somme qu'il versait pour ma garde. Diplomate de passage à Samudr ? Membre de la noblesse ? Je ne le sais pas. La seule chose de certains, c'est qu'il s'en bat les couilles du petit bâtard des Poris, sinon, je pense que je ne serais pas là, à vivre à Nadéi.

Il eut un rire vide de joie. Est–ce que sa vie aurait–elle vraiment été différente même dans les quartiers plus riche.

– Je sais même pas pourquoi je me livre à toi.

– La drogue, le choque, mon écoute, plein de facteurs qui mènent à un chemin.

Astrauliope se leva et commença à regarder les différents ouvrages.

– C'est tout ? Tu es venu me rendre dépressif ?

– Non, je voulais te demander une bouteille.

Il se leva et sortit deux verres.

– Je suis à chaque fois malade après un meurtre. Je ne suis pas encore habitué à voir la mort. La première fois, je ne m'en suis pas rendu compte immédiatement que j'avais ôté la vie à quelqu'un. On fuyait. On nous attaquait.

Il regarda le verre, puis la bouteille, et décida de donner directement la bouteille à l'assassin. 

– Pourquoi as-tu décidé d'en faire ton métier alors ?

– Le hasard des choses, je suis douée. Il me fallait de l'argent, et je ne voulais pas me vendre.

– Et tes amis ? Ceux avec qui tu as fui, ils ne peuvent pas t'aider ?

Elle vida la bouteille, le regard dans le vide. Il eut de la peine pour elle, peut-être parce qu'il se voyait plus jeune, à survivre dans les rues sales de Samudr.

– Je ne veux pas être dépendante. Orléan galère assez, pas besoin de rajouter mes problèmes et Edward est loin.

– Pourtant, tu dépends de moi.

– Toi, c'est pas pareil.

Elle le regarda, les larmes aux yeux, et une réalité brutale s'imposa à Xélion. Il l'aimait, il aimait cette jeune fille fragile et forte à la fois. Il hésita un instant et s'approcha d'elle. Il s'assit et passa un bras dans son dos. Il la serra contre lui.

Le clan des disparusOù les histoires vivent. Découvrez maintenant