Chapitre 1

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Les images nous construisent...

Six ans, un vendredi soir, maman est venue me chercher à l'école, elle avait un coquard à l'oeil. Papa était donc revenu pour le week-end. Je n'ai jamais su dans quoi il travaillait ou ce qu'il trafiquait mais il était rarement là. Jusque tard dans la nuit, le bois du lit parental gémissait puis cognait contre le mur de ma chambre. S'y ajoutaient les cris de maman dont je ne distinguais pas la teneur : jouissance ou douleur ? Tout le HLM devait entendre ! Papa ne parlait pas, ne demandait rien, ne me jetait même pas un regard et disparaissait un beau matin pour une semaine ou deux, ou plus.

Harassée, la mine défaite, maman s'éreintait jour après jour dans les bureaux où son poste de technicienne de surface lui courbait le dos, creusait ses joues et lui bousillait les articulations. Elle me répétait : je tiendrai le coup jusqu'à ce que tu aies ton bac. Qu'est ce que j'en avais à foutre d'avoir mon bac ! Elle se donnait une raison pour me culpabiliser ou quoi ? Une mère, c'est comme ça, ça bosse pour ses enfants, non ?

A douze ans, maman m'a acheté un ordinateur et un smartphone pour que je sois dans le bon niveau de la classe. Elle même ne possédait pas de portable, ne comprenait rien à ces technologies et ne cherchait pas à savoir ce que je fabriquais. Le soir, je la laissais plantée devant la télé tandis que j'explorais internet de fond en comble. Je rivalisais avec mes potes pour proposer un film porno de plus en plus hard à chaque fois que nous nous réunissions. Facile, il suffisait de cocher la case : j'ai plus de 18 ans.

Ce que je trouvais au début était édulcoré : des servantes cul nu et aguicheuses dans des châteaux, des infirmières en visite spéciale au domicile des patients, des plombiers ou des peintres en bâtiment détournés de leur travail par une maitresse de maison excitée, à la tenue suggestive.

On se défoulait : « vas-y ! Mets-lui profond ! », « Ah la salope, elle suce bien ! ». Ce genre de clameurs résonnait dans les caves ou les halls d'immeubles de la cité où on les visionnait en groupe. Au collège, Zacharia et moi on dessinait des bites ou des chattes sur les murs de la cour de récréation ou encore mieux sur les cahiers de nos voisines de cours qui s'empressaient de les couvrir de blanc correcteur.

Quand un mec se baissait, Zac s'approchait derrière son cul et mimait une sodomie, MDR*. On draguait des filles en ligne par l'intermédiaire de jeux vidéo. On leur envoyait des images de cul et on leur demandait des « nudes* ».

Quinze ans, les échanges sur internet ou par webcams interposées s'intensifiaient. Sur Tik Tok, en un coup de pouce, tu passes d'un petit chat mignon à des scènes érotiques. Avec certaines filles on pratiquait des sex-calls, des appels vidéo où chacun se filme en se masturbant, on s'éclatait bien.

Dans la réalité, les filles que je draguais ne restaient pas très longtemps avec moi. Avec Marco, on organisait le jeu de l'Arc en ciel : des filles mettaient d'abord du rouge à lèvres avant d'exécuter des fellations pour ensuite mesurer celle qui était allée le plus loin avec sa bouche. Elles aimaient ça, j'te jure !

Après une ou deux séances de baise, les filles me quittaient en chialant, en m'injuriant, je suis allé trouver des putes. Certes, je payais mais j'obtenais d'elles ce que je voulais. Quand elles acceptaient, je filmais pour ensuite frimer auprès de mes potes. C'était à celui qui en montrerait le plus aux autres.

J'étais devenu un pro, je fixais des caméras dans les chambres de mes potes, ceux qui le voulaient bien, et je recueillais des vidéos porno gratis que je postais sur les réseaux.

A dix sept ans je les proposais à des sites porno officiels et je me faisais du blé avec ça, alors j'ai laissé tomber le lycée. Je filais un peu d'argent à ma mère pour le loyer et la bouffe, papa s'était volatilisé dans la nature, j'étais l'homme de la maison.

De temps à autre je dealais un peu de cannabis, d'amphétamines ou de la cocaïne pour compléter mes revenus jusqu'au jour où je suis tombé sur un plan. A chaque fois que je croisais la voisine d'en face, son air hagard et perdu me troublait. Elle ne me saluait pas, ne me reconnaissait pas alors que son mari si. J'avais remarqué qu'en semaine, ils recevaient des visites d'hommes, deux ou trois dans l'après-midi. Qu'est-ce qu'ils pouvaient bien manigancer ces cinquantenaires au chômage ?

Je les ai espionnés : je guettais leur visiteur par l'oeil de ma porte et dés qu'il pénétrait dans leur appartement, je sortais du mien et collais l'oreille mais sans rien entendre de précis. Un jour j'ai frappé chez eux comme ça pour voir. Ils ne m'ont pas ouvert, il se passait vraiment quelque chose de louche.

J'ai toujours eu l'esprit tordu et pourtant je n'ai pas compris tout de suite. Le manège a continué jusqu'à ce que j'aborde le voisin un soir dans l'escalier, au culot :
— J'ai deviné ce que vous combinez vous et votre femme l'après-midi, je pourrais vous dénoncer à la police...
Le crâne chauve sur une forte corpulence, il m'a toisé de ses petits yeux enfoncés avant de répondre :
— Si tu vas chez les flics, j'en ai autant à ton service, p'tit con !
Devant mon air étonné il a continué :
— Si tu crois que je n'ai pas vu tes vidéos porno sur la toile...Au lieu de me faire chier, on pourrait s'associer toi et moi...

J'ai ouvert grands les yeux et l'ai suivi chez lui. A partir de là, mon business a explosé et on a partagé les bénéfices. J'avais amélioré la mise en scène de leur chambre avec des tentures rouges et différentes lumières plus ou moins filtrées ou au contraire très crues. J'avais accroché des caméras au plafond que je pouvais télécommander de la pièce à côté en utilisant des zooms très performants.

 La vidéo démarrait toujours sur sa femme, complètement shootée, allongée nue ou avec des accessoires style nuisette ou porte-jarretelle dans des poses sexy en tous genres : jambes écartées, attachées ou non etc...Ensuite quand arrivait le mec venu la sauter, c'est lui qui poursuivait l'action du porno que je tournais.

Au bout d'un moment, c'est devenu répétitif et je m'ennuyais un peu, jusqu'au jour où un de leurs clients les a dénoncés. Il ne m'était jamais venu à l'idée qu'il droguait sa femme à l'insu de son plein gré...

UN HOMME PARFAITOù les histoires vivent. Découvrez maintenant