J'ai l'impression d'être plongé la tête sous l'eau. Un bourdonnement sourd parcourt mon corps. Je suis trop choqué pour esquisser le moindre mouvement.
La grande sœur de Nadir s'écarte. Stupéfait, je mets une seconde à réagir. Une seconde qui permet à Lyrey de disparaître à l'intérieur de chez elle. Je suis probablement plus rouge qu'une écrevisse et mon cerveau ne parvient pas à assimiler ce qu'il vient de se passer.
On vient de m'embrasser... Je ne sais pas si je dois jubiler, pleurer ou m'inquiéter. En tout cas je prie pour ne pas faire les trois en même temps. Puis, ses dernières paroles me reviennent : elle ne m'aime pas. C'est comme si je venais d'être largué alors que l'on n'avait jamais formé un couple.
Ma belle assurance se décompose. Je ressens brusquement l'envie de m'asseoir. Je me traîne jusqu'au tonneau. J'ai l'impression d'avoir pris un coup de poignard en plein cœur. De mourir de l'intérieur. Mon esprit rebelle s'enflamme. Il élabore un flot de futurs alternatifs ou elle changerait d'avis.
Je réussis presque à me convaincre moi-même avant de crier stop. Qu'est-ce qui se passe dans ma tête ? Je me rappelle de respirer et prends une grande bouffée d'air. Je revisionne le fil de notre discussion. Après plusieurs longues minutes je parviens à la conclusion que je n'aime pas Lyrey – enfin pas d'amour.
Toutefois cela ne m'empêche pas de vouloir l'aider. Voilà un raisonnement déjà plus logique. Lyrey est sympathique, bizarre et certes attirantes mais elle est une personne interdite du fait que c'est la sœur de mon meilleur ami. Et de plus, pour l'instant, j'ai d'autres soucis à me préoccuper.
Je bondis à terre. Le message ne peut être plus clair : pas de quoi créer des histoires. Je regarde autour de moi, la nuit est déjà bien avancée. Mon père doit m'attendre depuis des heures. Je n'ai jamais été autant en retard...
Je me mets à courir, le problème de Lyrey dans un coin de ma tête car je sais qu'il n'est pas réglé. Mais cela sera pour une prochaine fois. Le stress gagne chaque cellule de mon corps. Je puise toute mon énergie, sachant qu'il est primordial que je me dépêche.
J'allonge mes foulées, traversant la nuit tel un esprit. Il est tard. Le couvre-feu maritime a commencé. Tout le district s'endort. Dans ce silence j'entends l'océan. Les vagues s'échouer sur la plage. Ce son me suit partout. La montée me scie les jambes et je m'autorise à ralentir un petit peu. Je redoute mon père. J'appréhende comment il va réagir à mon retard.
Je me glisse dans ma maison. J'ai l'impression d'envahir un navire, en pleine nuit. Et que chacun de mes pas fait grincer le plancher. Même si je suis plus silencieux qu'un fantôme. La maison paraît immense et de la lumière brille dans le salon.
Mon père est assis dans un fauteuil, un verre à la main. Son expression est sévère. Je déglutis et comme il n'est pas question de fuir, je m'avance. Il me vient à l'esprit que cela fait sans doute plusieurs heures que Monsieur Odair m'attend ainsi.
– Où étais-tu ? Demande-t-il sèchement.
Je tressaille intérieurement pris en faute.
– J'étais avec Lyrey, père. La grande sœur de Nadir, précisé-je ne sachant pas si mon père la connaît.
J'espère avoir parlé d'une voix calme et claire. Je cache tout sentiment et attend sa réaction.
L'homme se lève. Son visage est menaçant et ses yeux brillent de colère. Je ne lui laisse pas le temps de s'exprimer et tente d'expliquer pourquoi je suis resté avec elle. Sans entrer dans les détails, je lui raconte qu'elle avait eu besoin de moi.
A mon discours l'expression de mon père change et devient indéchiffrable.
– Tu es allé lui parler ? Demande finalement mon père.
J'acquiesce et attends, tendu, la suite. Monsieur Odair vide son verre et réfléchit de longues secondes avant de reprendre la parole.
– Bien. Finnick tu dois être excellent dans tous les domaines. Tous sans exception. Ne l'oublie jamais !
D'un signe de la main mon géniteur me donne congé. Je ne me fais pas prier et disparais. Je suis troublé. C'est la deuxième fois que j'attends de me faire remonter les écailles et que cela ne vient pas. Ma rencontre avec le Léviathan n'a pas affecté que moi. J'ignore de quelle façon mais cela a touché mon père aussi. Cette sorte de clémence me fait froid dans le dos. Cela rend Monsieur Odair encore plus antipathique.
Je monte en vitesse les escaliers. Me précipite dans ma chambre. Je referme la porte avec douceur pour ne pas faire de bruit. Je calme ma respiration. L'obscurité, le silence m'apaisent. Je me glisse dans mon lit et m'endors en un instant.
Je me réveille avec l'impression qu'une vie entière a défilé depuis hier soir. Je m'assieds au bord de mon lit. J'entreprends un tri dans mes pensées. Cette semaine a été éprouvante. Et la prochaine ne s'annonce pas mieux avec la Moisson.
Je sors de ma chambre. Marche avec velouté et avance sans faire de bruit comme un fantôme. Je prends une longue douche. L'eau me fait du bien. J'ai envie de retourner dans l'océan. L'image du Léviathan vient nager dans mon esprit. Mais mon envie est pour l'instant plus forte que ma peur.
Je me prépare au ralenti. En bas, mon père est déjà réveillé, je le salue.
– Soit à 9 heures au gymnase m'annonce-t-il avant de disparaître dans les profondeurs de la maison.
Génial. Je remplis le cadran, avale mon déjeuner et sors.
A pas lents je m'en vais chez les Solean. Je ne sais pas si j'ai envie de revoir Lyrey. La nuit est de bon augure. J'espère qu'elle va mieux. Il faut que j'aille le vérifier. J'accélère mon rythme. Je traverse la zone marchande ne prêtant attention à rien. Évoluant dans un brouillard que je suis le seul à percevoir.
J'arrive devant chez mon ami et marque un temps d'arrêt. Plume n'est pas là. Nadir serait-il déjà parti ? Je vais frapper à la porte des Solean. Le bois grince sous mes coups de poing. J'attends. Pas de réponse, je refrappe mais cela ne change rien. Je colle mon oreille au battant et n'entends rien mis à part le bruit perpétuel de la Houle. Étrange.
Je me gratte la tête. Voilà quelque chose qui contrarie un peu mes plans. Lyrey doit déjà être partie et il n'y a personne pour me donner de ses nouvelles. Kohen et sa femme, je peux comprendre qu'ils soient déjà au large. La grande sœur de Nadir est probablement allée bosser mais où est passé mon ami ?
Je secoue la tête. Je n'ai pas le temps de m'attarder pour d'autres recherches. Mon père m'attend. Je tourne les talons, inspire un grand coup et m'élance à petites foulées.
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Hunger Games Le tribut de l'océan
FanficFinnick Odair passe sa vie à s'entrainer pour les Hunger Games. Jeux meurtriers où l'on peut gagner la gloire et la richesse. Pourtant ce n'est qu'encore un enfant. Il doit aussi apprendre comment marche le monde et ce qui en dehors de son père, inf...