8. L'attente

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Kenan

Ça fait au moins deux heures qu'on attend des nouvelles de Jamie. C'est interminable. Merde, pourquoi c'est si long ? Je n'en peux plus d'être là, assis sur cette putain de chaise pas confortable à attendre qu'un toubib veuille bien venir pour nous donner des nouvelles de son état. En plus, je crève la dalle. J'ai annulé le repas de ce soir avec ma famille en leur expliquant rapidement et leur ai informé que, si tout va bien, on se retrouve tous demain soir chez moi. Sur la chaise à côté de la mienne, Gabi somnole. Elena, à ma droite, est comme moi : tendue au possible et impatiente de savoir comment il va. Heureusement qu'il y a des machines à café pas loin d'ici, ça nous permet de carburer à la caféine pour ne pas nous endormir. Aeden est revenu me voir il y a une demi-heure pour savoir, mais je lui ai dit que je le préviendrai quand le médecin viendrait. En attendant, il faut qu'il reste vers Shana, elle a plus que tout besoin de lui, et lui d'elle. Il faut qu'ils se soutiennent et qu'ils traversent cette épreuve difficile ensemble, il n'y a que comme ça qu'ils pourront se reconstruire.
Il faut vraiment que mon pote s'en sorte. Premièrement, parce qu'il ne peut pas quitter cette terre maintenant, à seulement 28 ans, deuxièmement parce que ça détruirait davantage son frère et Elena et moi, ça nous démolirait de le perdre, et troisièmement, parce que si Keziah apprend que son souffre-douleur a voulu mettre fin à ses jours par sa faute et qu'il y ait parvenu, il serait trop heureux et je refuse que ce fils de pute, cette raclure connaisse ce sentiment. Tout ce que je veux, c'est qu'il crève dans d'atroces souffrances puisque visiblement, la prison ne l'a pas calmé. Je ne veux plus jamais entendre parler de cette ordure, à part si c'est pour m'annoncer qu'il est six pieds sous terre.

— Tu crois que cette si longue attente est bon signe ? m'interroge soudain Elena.
— Oui, ça l'est parce que je ne peux pas imaginer les choses autrement. Ce n'est pas possible. Et puis... Quand les médecins l'ont emmené, l'un d'eux m'a dit que d'avoir fait pression sur la plaie avait permis au sang de ne plus s'écouler, par conséquent, tu lui as sans doute sauvé la vie alors oui, il va s'en sortir.

Elle sourit faiblement. Comme je ne l'ai pas encore remercié pour ça, je pose une main amicale sur son genoux et lui sourit à mon tour.

— J'aimerais te remercier pour ça, Elena. Merci d'avoir eu un mauvais pressentiment et d'être retourné vers lui et merci d'avoir fait preuve d'un tel sang-froid pour l'empêcher de se vider de son sang, si j'avais été à ta place, je ne suis pas sûr que j'y aurais pensé.
— Je n'ai pas réfléchi quand je l'ai vu allongé sur le sol, c'est comme si... j'avais complètement été déconnecté. J'ai agi par instinct.

Je glisse un baiser sur sa tempe.

— Merci à toi, et à ton instinct car si tu n'avais pas eu ce pressentiment, on ne serait peut-être pas là et on aurait sans doute retrouvé Jamie trop tard pour lui donner la possibilité de survivre.

Elle frissonne.

— Ne pensons pas à ça.

J'acquiesce. Ouais, il ne vaut mieux pas, rien que d'imaginer mon pote enfermé dans une boite me donne envie de tout péter et me fait froid dans le dos.
Au loin, des pas se font entendre, ils se rapprochent de plus en plus de nous. Peut-être le docteur. Je prends le risque de lever les yeux et quand ils se posent sur la personne qui est encore à dix mètres de moi, mon sang se glace et je rentre à la seconde dans une colère noire. Qu'est-ce qu'elle fout là ? Qui l'a prévenu ? Je ne vois pas Aeden le faire, c'est en partie à cause d'elle si sa femme est hospitalisé et qu'ils ont perdu leur bébé.
Je me lève d'un bond, surprenant Gabrielle qui se réveille dans un sursaut, puis je me dirige vers cette femme à qui je voue une haine viscérale, les poings serrés le long du corps, la mâchoire crispé, le regard furieux.

Across the USA - Between Toulouse and Dublin tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant