Across the USA - Between Toulouse and Dublin tome 3

21. Tout régler

Gabrielle

A peine trois jours que Keziah est mort et, avec Kenan, nous avons déjà constaté le changement notable de l'humeur de Jamie. Il semble réellement aller mieux depuis que son bourreau est hors d'état de nuire, il rigole plus, il est plus souriant, moins froid et distant. Bon, parfois, il a encore des moments d'absence et Elena m'a dit qu'il faisait encore des cauchemars, mais Kenan m'a avoué qu'il ne l'a jamais vu comme ça.
Jamie est rentré chez lui le lendemain de sa dernière confrontation avec son bourreau, il avait besoin de retrouver l'intimité de son appartement et son meilleur ami ne s'y est pas opposé. Et comme je l'aurais parié, Elena y est allée avec lui, je crois qu'ils avaient besoin de se retrouver vraiment tous les deux, sans personne autour, et ça a été d'ailleurs le cas de Kenan et moi. Je les adore tous les deux, mais ça fait un bien fou de se retrouver enfin seule avec mon chéri. Une cohabitation qui se passe d'ailleurs très bien, je pourrai très vite m'y habituer et vu ce qu'Elena m'a dit par message hier soir, c'est le cas également de son côté. Malheureusement, une famille, des amis et un commerce nous attendent à Toulouse, donc nous avons pris notre billet d'avion pour la fin de la semaine. Puisque nous ne sommes que lundi, ça nous laisse encore quelques jours pour profiter de nos copains, de ce pays et de cette ville, mais j'en suis déjà nostalgique et à l'idée de bientôt quitter Kenan, j'en ai la boule au ventre.

— Dis, je pensais à un truc, m'annonce Kenan quand il revient de sa douche matinale.
— Je suis toute ouïe.

Il vient s'asseoir à côté de moi sur le canapé.

— Et si je proposais à Jamie de venir bosser pour moi ?
— Tu veux dire dans ton resto ?

Il approuve.

— Je le lui en avais déjà parlé cet été pendant le voyage vu que ça n'allait plus avec son patron, il n'a pas voulu vu que j'avais pour projet d'embaucher Deirdre.
— Ah oui d'ailleurs, je trouve qu'elle s'en sort vraiment bien en tant que serveuse. Mais vas-y, continue, pardon.
— J'ai envie de lui reproposer un job. Je parlais d'embaucher d'autres serveurs et cuisiniers vu que le resto marche de mieux en mieux, et comme je le connais et qu'il ne va pas supporter très longtemps de rester chez lui sans rien faire maintenant qu'il n'a plus le problème de son beau-père à gérer, ça peut être une bonne occas' pour lui. Ca lui permettra d'avoir un salaire tout en recherchant une nouvelle imprimerie qui serait apte à l'embaucher.

C'est une bonne idée, ça pourrait l'aider à rebondir et à être stable financièrement et ça aiderait un peu vu qu'ils sont surbooké en ce moment au resto, mais dans tout ça, il y a quand même un hic. Je ne sais pas si Kenan y a pensé, mais il faut que je lui en parle.

— C'est une belle proposition, mais... tu n'as pas peur que le contact social avec les clients, ce soit encore un peu tôt ? Je te rappelle que ton meilleur ami n'est pas... Disons qu'il n'est pas l'être humain le plus à l'aise avec les autres.
— J'y ai pensé justement et c'est de ce côté là que ça bloque. Je ne vais pas le mettre en cuisine, ce serait débile, il n'a pas de diplôme et même s'il se débrouille plutôt pas mal, ce n'est pas digne d'un resto. La salle est ce qui lui conviendrait le mieux parce que la plonge, il ne le supporterait même pas une semaine.

Je pose une main sur son épaule. Je sens que cette histoire le chiffonne beaucoup.

— Le mieux, c'est que tu lui en parles. Tu veux qu'on aille chez lui ?

Il secoue la tête pour refuser et passe une main dans ses cheveux.

— Quelque chose ne va pas ? m'inquiété-je soudain, je n'aime pas son mutisme.
— Rien de grave c'est juste que... Vu que le resto est fermé aujourd'hui, j'aurais voulu en profiter pour aller chez mes parents. J'aimerais leur parler du papier d'adoption que j'ai retrouvé il y a sept ans. J'aimerais savoir pourquoi il était là où il était quand je l'ai trouvé. Je persiste sur le fait qu'il ne l'était pas par hasard. Et j'aurais aimé que tu... m'accompagne.
— Avec plaisir. Tu veux qu'on y aille maintenant ?
— Oui, ils ne bossent pas ce matin.