Aveu.

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Jeudi, 26 Novembre.

PDV SCELLIA

     Je m'attache les cheveux en queue-de-cheval et sors de la chambre. Je ne vais pas en cours aujourd'hui. Il faut que j'aille à l'hôpital pour prendre les résultats des tests, même si...

      Pas de pensées négatives!

     Je vais dans le salle à manger et salue tout le monde avant de m'asseoir à table avec eux.

Papa : j'ai appris que vous cherchiez un donneur de rein de groupe sanguin O négatif.

Moi : effectivement. Qui te l'a dit?

Papa : Alice m'a expliqué la situation.

Moi : je vois...

     Je prends une bouchée de mon bol de fruits.

Papa : je pourrai toujours lui donner le mien.

     Je m'étouffe, avalant très difficilement le contenu de ma bouche.

Moi : pardon?

Alice : il en est hors de question. Il te reste à peine deux mois à vivre. Tu risquerais de partir plus tôt.

Papa : plus tôt ou plus tard, peu importe. Le fait sera toujours le même. Je mourrai. Alors, autant donné ce rein plutôt que de mourir avec et ne pas sauver une vie qui aurait pu l'être.

Moi : comment peux-tu dire ça avec tant de... Tant de calme?

Papa : il faut savoir être réaliste dans la vie.

Maman : vous connaissez votre père. Il peut être têtu quand il le veut.

     Je n'ai plus très faim tout d'un coup. Savoir que ce que mon père s'apprête à faire va lui raccourcir la vie...

Moi : je vais y aller.

     Personne ne m'arrête, et tant mieux. Je sors du manoir et me dirige vers l'hôpital. Une fois arrivée, je vais illico dans la chambre 232. Mais alors que je me retourne après avoir fermé la porte, je vois Dean, assis sur son lit d'hôpital, la tête légèrement rejetée en arrière et les yeux clos. Mes yeux se remplissent de larmes, alors qu'il tourne sa tête vers moi. Me reconnaissant, il me sourit.

Moi : Dean!

     Je ne me prive pas pour courir vers lui et lui sauter dans les bras pour ensuite le serrer contre moi comme si on ne s'était pas vus depuis plus de cent ans sans pour autant lui faire mal. Je laisse mes larmes se déverser pour finir leur course sur son épaule.

Moi : je suis désolée!

Dean : de quoi?

     Je ne réponds pas tout de suite et me sépare de lui pour m'asseoir sur le siège près de son lit. J'ai la tête basse et les poings serrés sur mes genoux.

Moi : c'est de ma faute si tu es dans cet état actuellement.

Dean : ça ne l'est pas, enfin. C'est la quantième fois que tu me le répètes.

Moi : hein?

Dean : je t'entendais. J'entendais tout ce que tu disais. Et ça me faisait mal de savoir que tu pensais que tout était de ta faute.

Moi : ça l'est...

Dean : et tu allais vraiment partir si Cameron ne t'en avait pas empêchée?

Moi : je... Comment...?

     Je relève la tête vers lui et le regarde avec curiosité.

Dean : Cameron.

     Oh...

     Je détourne le regard.

Moi : alors c'est vrai que...

     La porte s'ouvre sur le docteur Edward avant que je n'ai pu finir ma phrase. Ce dernier, voyant Dean debout, sourit.

Edward : vous avez l'air d'aller mieux.

Dean : oui, merci.

Edward : vous a-t-on déjà parlé de l'opération que vous devez subir?

     Le regard de mon ami blond se tourne vers moi.

Moi : désolée. Mais si demain tu ne te fais pas opérer...

     Les larmes menacent de s'échapper de mes yeux alors que je les retiens comme je peux.

Moi : j-je reviens.

     Ma gorge commence à me faire mal alors que je me lève et sors de la chambre.

     Je n'avais aucune idée de ma faiblesse jusqu'à tout ça.

     Je m'adosse contre le mur, un peu plus loin de la chambre de Dean, et pleure silencieusement. Il y a un véritable duel dans ma tête : mon père ou celui que j'aime?

     Le docteur sort quelques minutes plus tard et je l'interpelle.

Edward : qu'y a-t-il?

Moi : mon père s'est proposé pour donner son rein. Le problème, c'est que ça lui raccourcira son temps de vie estimé. Je ne veux pas perdre l'un des deux.

Edward : vous ne savez pas qui choisir entre votre père et celui que vous aimez, c'est ça?

     Je hoche la tête avant de bloquer sur sa dernière phrase.

Moi : je ne l'aime pas! C'est juste un ami. Enfin, non... Mais...

Edward : vous n'avez pas besoin d'être gênée. C'est normal de ressentir ce genre d'affection pour une personne.

     Je rougis et détourne le regard.

Edward : si votre père tient toujours à être un donneur, dîtes lui de venir me voir demain pour que l'opération puisse avoir lieu.

Moi : très bien... Et... Les résultats ?

     Il secoue la tête.

     Ils sont donc négatifs...

Edward : soyez forte, mademoiselle.

     Il s'en va plus tard et je prends une grande bouffée d'air pour me calmer. Puis, je vais à nouveau dans la chambre 232.

Moi : il t'a expliqué ?

Dean : ouais.

Moi : tu n'as que ça, comme réaction?

Dean : comment voudrais-tu que je réagisse à ça?

Moi : tu es sérieux ?

     Je serre les poings en le foudroyant du regard.

     Il m'énerve à toujours se foutre des choses importantes.

Moi : tu m'énerves!

Dean : pourquoi?

Moi : tu apprends que tu risques de perdre la vie et tu t'en fous?

Dean : tu aurais voulu que je me mette à chialer?

Moi : j'aurais préféré ça à ton manque d'intérêt! S'il t'arrivait quelque chose d'après toi, comment se sentiraient tes parents? Tes amis? Et moi dans tout ça?

     Je fais une courte pause, et reprends :

Moi : sais-tu combien de fois on a prié pour que tu survives? Combien de temps on a attendu ton réveil? À quel point nous étions tristes de savoir que s'il n'y avait pas de donneur, nous te perdrions?

     Il détourne le regard, pas par gêne, ce qui m'énerve encore plus.

Moi : tu es vraiment sans cœur! Je n'arrive même pas à comprendre comment j'ai fait pour tomber amoureuse d'un imbécile comme toi!

     Je sors de la pièce en claquant la porte derrière moi et m'en vais sans même un regard en arrière.

     Il m'a vraiment, mais vraiment mise hors de moi.

Le Choix Compliqué De Mon Cœur. Où les histoires vivent. Découvrez maintenant