ʟ'ᴀᴜʀᴏʀᴇ ᴅ'ᴀᴘᴏᴘʜɪꜱ

Chapitre 𝟮𝟯 - Cher hasard

Le fils de Pharaon s'était une fois de plus enfui de la cité d'Akhetaton. Il s'ennuyait au palais. Il voulait chasser, pêcher, voyager, partir au combat dans les pays voisins... Peu importait, du moment que ça puisse lui faire échapper aux longues et assommantes leçons de son précepteur, aux remarques toujours plus dures de son père sur son comportement et son manque de maturité, et à sa demi-sœur qui tentait tant bien que mal de se rapprocher de lui.

De plus, son frère n'avait plus le droit de quitter le palais, et il ne leur était plus permis de jouer ensemble, quand bien même leur grande différence d'âge se sentait, désormais. Toutânkhaton voulait sortir et essayer de courir dans l'herbe et le sable comme lorsqu'ils étaient petits, même si son handicap le faisait de plus en plus souffrir, mais ça leur était interdit.

Tout ça énervait le jeune Hotepaton, et même si Toutânkhaton tentait de lui assurer que tout allait bien, il savait qu'il n'en était rien. Ça l'énervait de le voir marcher si lentement dans le palais parce que les médecins avaient décrété que c'était désormais une obligation, et ça l'énervait de le voir rester continuellement entre ces murs blancs qu'il était condamné à frôler. Le monde extérieur était devenu trop dangereux pour lui, pourtant il ne cessait jamais de sourire.

Hotepaton avait également perdu nombre d'amis à cause de son père, quand ce dernier avait déplacé la capitale de Ouaset à Akhetaton. Il se fichait des fils trop maniérés des hommes de la cour : il préférait de loin les enfants du peuple avec qui il s'amusait lorsqu'il s'enfuyait du palais, délaissant pour un temps son petit frère.

Il ne supportait plus cette situation.

D'un tempérament têtu et rebelle, il avait alors décidé qu'il ferait comme bon lui semblerait, tant que cela lui serait possible. Ainsi, dès que les gardes avaient le dos tourné, il prenait son char et quittait la cité pour voyager, mais également pour retourner dans son ancienne maison désormais quasiment abandonnée, et pour retrouver ses vieux compagnons de jeu.

Au départ, il partait seul avec son ami Ab-Nesem. Un peu plus âgé que lui et excellent combattant, ils s'étaient toujours bien entendus et avaient partagé moult aventures ensemble. C'était bien suffisant. Mais dernièrement, ce dernier léchait bien trop les bottes de Pharaon à son goût et cela l'irritait. De toute façon, il n'avait plus besoin de lui ; le pays était en paix, tout le monde louait Aton et la famille royale, tout allait bien.

Et alors qu'il approchait de Ouaset, qui se trouvait sur la rive orientale, Hotepaton passa devant le temple d'Ipet-sout, puis il aperçut le temple d'Amon qui semblait mort, cinquante-sept khèt¹ plus loin. Après tout, la mise en place du culte d'Aton avait dû leur faire du tort, mais Aton était le seul et unique dieu : cela ne servait à rien de prier des dieux inférieurs.

Il continua de descendre vers le sud pour traverser le fleuve, mais quelque chose le retint. Il arrêta ses chevaux et se retourna. Le petit temple l'appelait.

Il demeura immobile à fixer la pierre du mur d'enceinte, puis se décida à remonter vers le nord.

Après une dizaine de foulées, il mit finalement pied à terre et marcha jusqu'à la porte du domaine. Il l'observa longuement, puis posa les yeux sur l'intérieur du sanctuaire qui avait l'air désert. Est-ce que les prêtres continuaient d'y vivre malgré tout ? La dernière fois qu'il était venu ici, il lui avait semblé qu'il n'y avait plus que cet enfant. Enfin, ce jeune garçon, il avait grandi en quelques années. Était-il toujours là ?

Il pénétra l'enceinte, et passa le pylône qui gardait l'entrée du temple. Cette fois, il prit son temps et s'émerveilla de ce qu'il découvrit. Il n'avait jamais vraiment fait attention aux gravures sur les murs et les colonnes, aux couleurs, à la hauteur du plafond, à la beauté du lieu.