Chapitre 27

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Maurina se réveilla en douceur. Autour d'elle, tout était blanc. Du lit jusqu'au mur en passant par sa chemise de nuit, tout y passait. Elle s'arrêta un instant. Sa chemise de nuit ? S'il y avait bien une chose dont elle avait horreur – en plus d'une liste déjà assez conséquente – c'était de porter une chemise de nuit. Ce vêtement trop léger pouvait se soulever à chaque coup de vent, ou mouvement, ce qu'elle avait tendance à beaucoup faire. Ses tenues avaient toutes la même règle : elles devaient lui permettre de tournoyer, sauter, s'étirer, se renverser sans la gêner.

Cette réflexion lui avait pris du temps, mais elle lui avait permis d'en déduire que le lieu occupé ne lui était pas familier. Perturbée, elle essaya de s'asseoir. Des bips se firent entendre dans toute la pièce, alertant des personnes en blouse blanche qui vinrent la voir. Ils bougeaient trop vite. Leurs paroles étaient incompréhensibles. Le bruit lui devenait insupportable. Comment pouvait-on être aussi bruyant aussi tôt dans la journée ? Son essai de s'asseoir s'acheva d'un échec, et elle retomba dans le lit, épuisée.

Téléphone. Suspects. Poursuivants. Vitesse. Danger. S'échapper. Accident. Fumée. Game Over. Il y avait eu... autre chose ? Un événement juste après, comme un blanc dont elle ne voulait – ou ne pouvait – se souvenir.

Elle se sentit aspirée. L'accident. La voiture avait volé, sens dessus dessous. Le choc avait été violent. Trop violent. Sa tête s'était cognée. Fort. Trop fort. La douleur avait été telle qu'elle avait décidé de lâcher prise. Tout était vide. Il n'y avait ni noir, ni blanc, ni aucune autre couleur. Seulement le silence. Elle se sentait en paix, bien. Comme si plus rien n'importait. Rien ? Mais comment s'était-elle retrouvée ici ? Les souvenirs l'assaillaient. Elle était pourtant si bien, pourquoi venaient-ils la déranger ? Après ce qui lui semblait être une éternité, l'adolescente accepta à nouveau ses souvenirs. Elle était si bien ici. Pourquoi bouger ? Pourquoi retourner dans un monde où des personnes pouvaient lui vouloir du mal ? Dans lequel chaque pas nécessitait du courage, de la volonté ? « Tu es bien mieux ici, pas vrai ? » semblait lui susurrer une petite voix. « Reste tranquille. Les vivants peuvent très bien s'occuper d'eux-mêmes tous seuls. » continua celle-ci. Les vivants ? Cela voulait-il dire que si elle restait ici, elle était morte ? Il en était hors de question !

Laisser son frère seul ? Rompre l'unité des jumeaux ? Brusquement, ce lieu où elle se sentait si bien lui apparaissait désormais oppressant, comme un liquide qui chercherait à l'absorber. La jeune fille commença à lutter. Elle devait revenir dans le monde des vivants. Son frère n'avait pas encore subi toutes ses farces. Comme lorsqu'ils étaient allés acheter une glace. Il faisait beau, chaud, et son jumeau lui avait dit de prendre n'importe laquelle. Après tout, une glace restait une glace, et était toujours bonne à manger. Du moins, s'ils étaient en France. Mais en bonne touriste au Mexique, elle avait demandé une surdose de sauce pimentée pour son frère. Sa grimace avait été inoubliable. La jumelle en souriait rien que d'y penser.

La pression qu'elle ressentait quelques moments auparavant semblait avoir disparu, comme si la glace l'avait fait fondre. Une lumière était apparue. Au loin. Très loin. Elle s'élança, moitié marchant, moitié volant, moitié nageant. La jeune fille se rapprochait de plus en plus de la source lumineuse, de plus en plus vite, comme absorbée.

L'adolescente se redressa d'un coup, avalant brusquement une bouffée d'air. Elle se souvenait de tout. Ses mains cherchèrent fébrilement son cou, redoutant une vérité fatidique. Était-elle passée de l'autre côté ? Ses doigts se posèrent sur sa jugulaire. Boum, boum. Boum, boum. Elle fit une dernière vérification, et se pinça.

- Aïe !

Sa voix rauque la fit sursauter, tout autant que la douleur du geste. Que lui avait-il pris de se pincer aussi fort ? Ou plutôt... Ce geste n'était pas censé lui faire aussi mal. Ce fut à ce moment-là qu'elle réalisa que ses yeux étaient restés fermés, comme s'ils avaient peur de ce qu'ils allaient découvrir.

Ses yeux s'ouvrirent doucement. La lumière s'empressa de s'y engouffrer, tandis qu'elle peinait à examiner son environnement. Blanc, tout comme la première fois qu'elle avait ouvert les yeux. Première fois ? Pourquoi n'y avait-il aucun bruit cette fois-ci ? Son « Aïe » aurait dû alerter les personnes présentes, les paroles incompréhensibles auraient dû reprendre... Elle reprit son observation, mettant de côté ses interrogations. A son bras étaient attachés des tuyaux, et elle était allongée dans ce qui semblait être un lit. Cette pensée la fit sourire. Elle avait un don pour l'observation épatant. Une surface molle, sur laquelle des humains pouvaient s'allonger ? Un lit ! Bonne réponse ! Elle secoua la tête, comme pour se reprendre, et continua son analyse de la pièce. Les murs étaient immaculés, reflétant du mieux qu'ils le pouvaient la lumière du soleil, comme pour réveiller la patiente à présent assise sur son lit.

D'un côté la porte, de l'autre côté la fenêtre. Son regard avait à présent fait le tour de la pièce, et il n'y avait effectivement personne. Peut-être pour lui laisser plus d'intimité ? Elle haussa les épaules. Ou alors... son pouls s'accéléra. Peut-être était-elle dans l'une des bases de ses poursuivants, enlevée en l'attente d'une rançon. Son sang ne fit qu'un tour. Il n'était pas question de rester bras ballant, à attendre que tous soient au courant de son éveil. Elle devait agir avant eux. Maintenant bien réveillée, elle arracha d'un coup sec les tuyaux qui la reliait à la machine, grimaçant par la même occasion. Peut-être aurait-elle pu être un peu plus délicate. Mais le temps pressait. Tant pis pour la délicatesse. Des bips stridents se mirent à retentir, alertant au qui mieux mieux quiconque serait à proximité. Il fallait faire vite !

La réflexion était à présent un luxe. Peut-être que son jumeau aurait dit le contraire. Il l'aurait sermonnée sur le fait que les décisions hâtives étaient rarement les meilleures, et que réfléchir avant d'agir valait mieux que foncer dans un piège tête baissée. Il lui manquait, même si penser à son jumeau à cet instant précis lui fit grincer des dents. En toute situation, il fallait toujours qu'il la reprenne ! Même dans ses pensées ! Mais aujourd'hui elle était seule, et l'adolescente comptait bien agir comme telle. Attendre que d'éventuels malfrats viennent lui mettre une arme sur la tempe pour demander une rançon ? Non merci. Elle avait mieux à faire que de jouer la demoiselle en détresse.

Se mettant debout à la hâte, elle manqua de s'effondrer sur le sol, se rattrapant au dernier moment de sa main gauche. Ce geste lui provoqua une grimace, en lui faisant réaliser une vérité sur son état physique. Ce n'était pas le fait de se pincer qui lui avait fait mal, mais cette main, qui semblait quelque peu difonctionnelle. Après quelques pas tremblants et une palpation de ses différents membres, elle se rendit à l'évidence. Son état physique ne lui permettrait pas de se transformer en ninja aujourd'hui : s'évader par la fenêtre n'était donc pas la meilleure des options.

Soudain elle entendit des bruits de pas. Ils approchaient. Se mettre sous le lit ? Elle serait découverte à coup sûr. Il s'agissait du seul mobilier de la pièce. Mais rester prisonnière, en otage ? Il en était hors de question. La fenêtre était désormais sa seule option. La pire, peut-être, mais l'unique, oui. Elle l'ouvrit brusquement, et se hissa tant bien que mal sur le rebord. Regardant de l'autre côté, son regard défaillit. Il s'agissait du troisième étage, ce qui signifiait qu'elle allait devoir faire preuve d'une certaine prouesse sportive. En était-elle capable ? Évidemment que non. Est-ce que l'instinct de survie pouvait donner des ailes ? Bien sûr que oui. L'important était de croire. La porte s'ouvrit à la volée. L'adolescente devait faire vite ! Il y avait un petit rebord sur la fenêtre juste en-dessous de la sienne. Si elle s'agrippait correctement, et se laissait doucement tomber jusque-là... C'était possible. Ses jambes se balançaient à présent dans le vide. L'adolescente prit une grande inspiration, serrant fort le rebord de sa propre fenêtre, ignorant la douleur provenant de sa main gauche. Un mal pour un bien. Alors qu'elle s'apprêtait à s'élancer, deux mains lui enserrèrent la taille. Deuxième échec. Elle n'avait pas été assez rapide.


Heyyy! Je suis de retour! Désolée pour cette trop longue absence, mais me voici à présent avec l'objectif de terminer l'histoire des jumeaux. Et je suis désolée pour la réunion. Elle était censée se faire à ce chapitre, mais Maurina en a décidé autrement. Je crois que toute cette histoire l'a rendue un peu paranoïaque...

Me revoici, je publierai à un rythme d'une fois par semaine (minimum) tous les mardis, jusqu'à ce que les jumeaux aient un happy ending! (enfin, s'ils ne font pas trop de bêtises entre temps)

La voiture nous a quittés...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant