Chapitre 42

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Ils se réveillèrent, l'esprit embrumé, dans une pièce sombre, dans une position assez inconfortable. Tentant de se redresser, ils grognèrent tous les deux, constatant leurs mains attachées. Qu'avait-il bien pu se passer depuis qu'ils étaient inconscients ? Inconscients.... Inconscients ! Étaient-ils toujours en vie ? Ou était-ce le paradis ? L'enfer ?

- Tu crois qu'on est où ? demanda anxieusement Maurina à son frère. En enfer ou au paradis ? Parce que vu l'état de la pièce, j'ai un petit doute...

La jumelle avait décidé d'être pessimiste. Certes, son corps lui faisait mal, ce qui lui laissait une possibilité d'être encore sur terre, bien vivante. Mais peut-être que les douleurs pouvaient encore se faire ressentir une fois de l'autre côté. Son expérience proche de la mort lui revint en mémoire. Le calme. Le néant. Le noir. La situation était définitivement différente. Cependant, elle n'en avait peut-être expérimenté qu'un aspect ? Le seul point commun était l'obscurité totale dans laquelle ils se trouvaient.

- Je pencherais plus pour la deuxième option, réfléchit Paul. Est-ce que tu penses vraiment qu'ils attacheraient comme ça des gens au paradis ? Et leur permettraient de sentir aussi physiquement la douleur ?

Le jumeau aussi avait décidé d'être pessimiste. S'ils étaient en vie, ils seraient heureux. Il préférait penser aux pires choses et réaliser que ce n'était pas le cas plutôt que le contraire. Un des rares points communs avec sa jumelle. Le « tch » que lança sa sœur lui confirma qu'il venait d'en trouver un deuxième, qui concernait leur situation actuelle.

- Tu es censé être l'intello, celui qui mesure toutes les situations, lui reprocha-t-elle. C'est le moment où tu dois rassurer, bon sang de bonsoir ! Ne soit pas juste d'accord avec moi !

Son frère ne trouva rien à redire. Qu'y avait-il à ajouter ? Pour une fois, elle avait raison. Une des choses qu'il détestait, ajoutée à sa liste des pires choses pouvant arriver, était de ne pas savoir l'issue de leur situation. Dans le cas présent, il y avait une possibilité qu'ils soient passés de l'autre côté, et une possiblité qu'ils soient juste attachés dans une pièce noire. Leur pessimisme à tous les deux étant à l'œuvre, la première option avait été privilégiée. Mais où était la vérité ? Qu'était la vérité ? Allaient-ils un jour la connaître ? Allaient-ils rester ignorants pour l'étenité ? Quelles solutions pouvaient-on prévoir dans l'au-delà ? Aucune. De plus, ils ne connaissaient pas les règles, le but du jeu, tout leur était inconnu.

- Tout est possible partout, c'est un truc de fou, murmura Maurina. Imagine ! Dans l'au-delà, on peut avoir tout, rien... On ne sait même pas à quoi ça ressemble, qu'est-ce qu'on est censés ressentir, c'est tellement frustrant !

Paul aurait voulu la regarder interloqué s'il avait pu. Malheureusement, la pénombre l'en empêchait. Sa sœur aussi était frustrée à l'idée de ne pas savoir ? Au fait de rester dans le doute ? Seraient-ils plus semblables que ce à quoi il s'attendait ?

- Tu es malade Maurin' ? Demanda-t-il. Je pense exactement à la même chose, mais normalement tu ne penses pas comme moi.

Sa jumelle se sentit piquée au vif. Que voulait-il dire ? Que seul un grain de riz vivait dans son cerveau ? Ce n'était pas vrai ! Il y avait plus, et chaque jour était un nouvel exemple de cela.

- Je ne te permets pas, rétorqua-t-elle, offusquée. Mon cerveau est juste différent du tien, ne me juge pas.

Au ton de sa sœur, son jumeau comprit qu'il l'avait offensée. Encore. Il leva les yeux au ciel. Un jour tout scepticisme cessera. Un jour. Mais pas aujourd'hui.

- Tu sais, je pense pas que ça soit le moment de se disputer, soupira Paul.

Sa sœur n'aurait pu être plus d'accord avec lui s'il n'avait pas commencé. Il était trop tard pour faire marche arrière à présent. Il fallait tirer tout cela au clair. A peine avait-elle pensé cela qu'une lumière blanche les aveugla. Peut-être ces mots avaient-ils été pensés un peu trop vite, et pris un peu trop d'ampleur ?

Les jumeaux retinrent leur souffle, oubliant même la dispute dans laquelle ils s'étaient engagés. L'heure du jugement avait sonné.

- Bonjour les jumeaux ! S'exclama une voix qu'ils connaissaient bien à présent.

Jack... ils auraient dû s'y attendre. Leurs corps endoloris avaient bien été la preuve qu'ils étaient encore en vie. De plus, qui, dans l'au-delà, y allait avec son jumeau ? Quoique... Personne ne savait comment cela se passait, où était revenu pour le leur raconter. Seules des rumeurs en circulait.

- Je suis désolé pour hier, ma colère s'est... un tout petit peu... enflammée, continua l'homme. Mais elle s'est calmée avec votre échange, pouffa-t-il. Même dans une telle situation, vous vous disputez ? L'un n'est pas capable de se mettre en sourdine pour deux minutes, et l'autre ne sait pas ravaler sa susceptibilité ? Quelle formidable équipe vous faites ! Vous méritez une palme d'or je crois.

Maurina se retint à grande peine de lui lancer une réplique cinglante. C'était une chose qu'ils se disputent entre frère et sœur, se lançant les remarques qu'ils souhaitaient. C'en était une autre lorsqu'un parfait inconnu qui venait de les kidnapper leur lançait à la figure ses remarques qu'il aurait pu garder pour lui ! Néanmoins, les récentes paroles de Richard était encore fraîches dans sa tête, lui permettant d'essayer de faire couler.

Paul se retint pour une autre raison. Il était le seul à pouvoir dire des choses à sa jumelle ! Pour qui se prenait l'homme ? Jack n'avait pas à dire tout haut ce que Paul pensait tout bas. Ce n'était pas comme cela que ça se passait. Il avait attendu toute sa vie le parfait moment pour le lui dire sans qu'elle ne lui donne un direct à la fin de sa phrase, ce n'était pas pour qu'un autre le dise à sa sœur bien avant lui.

- Ne vous inquiétez pas, aussi, ricana l'homme, ignorant tout de la retenue qu'exerçaient les jumeaux pour ne pas faire de réponses acerbes. Je n'aurais pas débarqué chez vous juste pour vous tuer. Ç'aurait été trop de boulot. En plus, vous avez vu mon sympathique petit appât ? Félicia ? Elle est adorable, non ?

«  Traître ! » eut envie d'hurler la jumelle. Elle se retint juste à temps. Pas assez cependant pour cacher à leur ravisseur le fait qu'elle souhaitait prendre la parole. Il lui lança un regard signifiant qu'il l'écoutait, et la jeune fille n'eut d'autre choix que de dire la première chose qui lui venait à l'esprit, autre que des insultes de préférence.

La voiture nous a quittés...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant