_ Elle va aller en parler, murmura Sophie.
_ Non, elle est simplement furieuse que je lui ai caché ça, je pense, dit précipitamment Henry.
Il reporta son regard vers Sophie qui était très pâle, à présent ; il dit d'un ton qu'il voulait rassurant :
_ Je vais aller la voir. Elle n'en parlera à personne, je te le promets.
Sophie hocha silencieusement la tête et Henry s'éloigna, courant presque derrière Alice qui venait de rentrer dans la maison. Il la rattrapa alors qu'elle se dirigeait vers la salle de réception, et il lui attrapa vivement le bras en disant :
_ Alice, attends...
_ Tu es un abominable hypocrite, Henry ! s'exclama Alice en se retournant vers lui.
_ Ne parle pas si fort, dit Henry entre ses dents.
Il l'entraîna plus loin, dans un couloir vide ; tous les invités dansaient et mangeaient, et peu de monde errait dans les couloirs à présent. Alice dégagea brusquement son bras et croisa ses bras sur sa poitrine, fusillant son frère du regard ; ils avaient les mêmes yeux verts, mais Alice était si en colère que son regard en paraissait presque noir.
_ Tu as embrassé Sophie Menedis ! chuchota Alice d'un ton furieux. C'est toujours en rapport avec votre petit jeu ? Comment peux-tu faire ça, Henry ? Père va te tuer, c'est définitif !
_ Cela tombe bien que tu parles de Père, répliqua Henry en serrant les poings. Il m'a fiancé sans m'en parler à Helena Ferewoll, figure toi ! Et m'a menacé de dénoncer mon petit commerce si je me rebellais. Belle figure paternelle, en réalité !
_ Tu es fiancé et tu en embrasses une autre ? s'écria Alice, scandalisée.
_ Je t'en prie, ne t'y mets pas toi aussi, gronda Henry. Je ne l'épouserai pas. Je me moque des menaces de Père.
Alice leva les yeux au ciel et dit d'un air agacé :
_ Tu as dû mal comprendre Père... D'ailleurs, comment a-t-il fait pour être au courant ? Qu'il soit mécontent, ça oui, mais qu'il menace de te dénoncer alors que ça implique une condamnation à mort, je n'y crois pas !
_ C'est pourtant ce qu'il a dit, dit Henry d'une voix glaciale.
Alice fronça les sourcils et Henry reprit :
_ Il m'a dit qu'il avait des preuves suffisantes pour la Garde. J'ai dû renoncer, sur le moment, à protester mais ce n'est pas terminé.
_ Il ne pourrait pas faire ça, murmura Alice d'un ton incertain.
_ Je suis persuadé qu'il n'hésiterait pas, vois-tu.
_ Alors c'est pour ça que tu as embrassé Sophie ? Pour te venger de Père et voir s'il serait vraiment capable de te dénoncer ? lui reprocha Alice.
Henry secoua la tête et répondit d'une voix égale :
_ Ca n'a rien à voir.
_ Alors pourquoi tu l'as embrassé ? interrogea Alice avec énervement.
_ Ca ne te regarde peut-être pas, tu ne crois pas ?
_ Ca regardera Père, menaça Alice.
Henry la toisa avec froideur, et dit d'un ton méprisant :
_ Et bien, va donc le lui dire, Alice. Notre famille est déjà pourrie jusqu'à la moelle. Une sœur dénonçant son frère, après tout ce ne serait rien de plus normal dans une famille où le Père menace de faire pendre son propre fils. Tu es bien la digne fille de notre père.
VOUS LISEZ
Les Colonies
Historical FictionComme beaucoup de familles anglaises, c'est confiants et sûrs d'eux que les Karevell quittèrent l'Angleterre pour la Caroline du Sud afin de profiter des richesses des colonies britanniques, en plein cœur du XVIIIème siècle. Henry Karevell pensait...