Des cris retentirent, et des pistolets chargés furent alors brandis de toute part ; Henry poussa Lucy et Alice en arrière, brandissant le sien, le braquant vers son père.
Mais William Karevell disposait de beaucoup d'hommes, et tous tenaient en joue les Menedis et les hommes de la garde présents ; plus aucun n'osaient tirer, cependant, et William dit d'une voix forte sans baisser son arme :
_ Et bien, George. Il me semblait que nous avions été clairs sur ce point. Tu as voulu mêler les autorités, oubliant que c'était moi, l'autorité, maintenant. Il ne me manquait que le titre de Gouverneur. Il est libre, à présent.
_ Tu ne peux t'en tirer ainsi ! S'écria George Menedis, rouge de colère.
_ Vraiment ? J'ai pourtant plus d'hommes que toi. Veux-tu vraiment tenter le diable ?
Alice suivait la scène avec horreur, n'arrivant pas à croire à ce qu'il s'était passé ; James avait disparu et elle en était soulagée, mais ce qu'elle avait sous les yeux la rendait malade. Tout ça, c'était de sa faute...
_ Je ne te laisserai pas à la tête de cette ville sans me battre, menaça George. Tu n'es pas digne de gouverner ! Les familles des autres villes ne te laisseront pas faire. J'y veillerai !
_ Alors que tu sais que j'ai des hommes partout, très cher George ? Je t'en prie. Veux-tu signer ton arrêt de mort dès à présent ?
Le ton de William Karevell était moqueur, sûr de lui ; il aurait pu tout aussi bien ordonner à ses hommes de tuer ceux des Menedis, ils étaient plus nombreux. Mais ça aurait été une vraie boucherie, les Menedis ne se laisseraient pas faire sans se battre. Henry voyait le tableau d'ici... Il voyait Sophie, aux côtés de son père et de ses frères, choquée par ce qui venait de se produire.
_ Je te propose un duel, lança alors George Menedis. Toi, contre moi. La famille du perdant se retire.
_ Je ne me battrai pas contre toi, George, dit William en esquissant un sourire. Tu es trop vieux, trop lent. J'aurai honte de gagner contre toi !
_ Je me battrai pour vous, Père, dit aussitôt Oliver en avançant d'un pas.
_ Et je serai son second, ajouta Alexander.
George considéra ses fils avec respect, et les remercia d'un regard ; car William avait raison, il était âgé et guère plus suffisamment en forme pour assumer un duel...
William se tourna alors vers sa famille en silence, et Henry soutint son regard, demeurant muet ; mais William n'aima pas la défiance qu'il vit dans le regard de son fils, et il dit d'une voix forte :
_ Mes fils ne sont pas aussi courageux que les tiens, George, je le crains. Qu'importe. Henry me représentera...
_ Père, intervint Michael avec fougue, je...
_ Tu seras le second de Henry, décida William.
Il reporta son regard sur les Menedis, et dit en regardant son vieil ennemi dans les yeux :
_ C'est donc entendu ?
_ Rendez-vous demain à l'aube, répondit George Menedis.
Il entraîna sa famille derrière lui, tandis que les hommes de la garde, après s'être concerté d'un regard, s'occupaient du corps du Gouverneur Littleton.
Leurs ennemis partis, les hommes de William rangèrent leurs pistolets et se rejoignirent, tandis que les femmes commentaient la scène avec cris et pleurs ; Alice croisa le regard de Henry, une seconde avant qu'il ne tourne les talons et ne rentre dans la maison. Elle le suivit, Lucy lui emboîtant le pas, et elles le retrouvèrent dans un couloir, tapant violemment dans un mur.
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Les Colonies
Historical FictionComme beaucoup de familles anglaises, c'est confiants et sûrs d'eux que les Karevell quittèrent l'Angleterre pour la Caroline du Sud afin de profiter des richesses des colonies britanniques, en plein cœur du XVIIIème siècle. Henry Karevell pensait...