Chapitre 21 : Culpabilité et petits secrets

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Lorsque William Karevell annonça fièrement que son fils Michael allait épouser Lucy Jenkins, cela provoqua un raz de marée social absolument impressionnant ; les Menedis, et tout particulièrement Alexander, furent scotchés d'apprendre cela. George Menedis passa assez vite à autre chose, comme s'il n'avait guère envie de s'attarder sur le fait que son ami John Jenkins s'éloignait consciencieusement de lui, mais Alexander se montra bien moins sage.

Lui et Michael faillirent se battre le jour même où tous apprirent la grande nouvelle ; Michael, Thomas et Henry étaient en ville, Michael se vantant de ses futures fiançailles avec l'un des plus jolis partis de Charleston auprès de ses amis. Evidemment, cela était arrivé aux oreilles d'Alexander, et la bagarre ne fut évitée que parce que Henry s'interposa entre eux, sommant son frère de cesser de faire le fanfaron.

Après la colère, ce fut le dépit qui gagna Alexander ; et force lui était de constater que son ancienne promise ne semblait pas si horrifiée que lui de voir leur futur mariage jeté aux oubliettes. Lucy tentait de donner le change, mais elle avait la tête ailleurs, et elle réussit juste à faire promettre à Alexander de ne pas faire de bêtises, du genre aller apostropher les Karevell et affirmer qu'il avait des preuves contre eux concernant l'incendie.

Evidemment, Alexander aurait beaucoup aimé rabaisser cette famille plus bas que terre ; mais Lucy réussit à lui faire entendre raison, difficilement il était vrai, arguant que pour le moment, ils n'avaient aucune preuve. Il devait lui faire confiance, elle avait bien l'intention de les dénoncer, mais dès que le moment serait venu.

Après le dépit, Alexander décida de feindre l'indifférence ; ne disait-on pas que les femmes aimaient qu'on les délaisse, pour mieux revenir en courant ? Il était persuadé que Lucy ferait changer d'avis son père. Forcément.

La seule chose positive à retirer de ce branle bas de combat environnant fut que l'attention était tellement focalisée sur Alexander, Lucy et Michael, que Henry et Sophie réussirent à se voir sans trop de difficultés.

Alexander avait d'autres chats à fouetter, et il en oublia momentanément de coller aux basques de sa sœur, ce qui arrangeait bien les affaires de Sophie. Henry demanda à Bérénice de porter les messages destinés à Sophie à Antigone, sa servante, et dès le lendemain tous deux se retrouvèrent en bordure de la ville, dans un quartier où vivaient principalement des petits commerçants. Cette partie de la ville était peu fréquentée par les gens de leur milieu, ils ne risquaient donc pas de croiser des têtes connues.

Henry arriva à l'heure précise de leur rendez-vous, ayant hâte de revoir Sophie seul à seule ; c'était également le meilleur moyen d'oublier les récents évènements. Il avait grand besoin d'elle afin de laisser de côté les affaires familiales véreuses (il avait à peine mis un pied dedans la veille qu'il en était déjà dégoûté...), les fiançailles avec Helena, le désarroi d'Alexander, et l'attitude de Lucy.

Lorsque Sophie arriva, ils s'éclipsèrent vite derrière les ruelles commerçantes, s'enfonçant dans de petites rues sans aucun passage ; à sa grande surprise, Sophie s'agrippa à son cou et l'embrassa fougueusement, comme si elle ne l'avait pas vu depuis des semaines. Henry lui rendit son baiser, et pour la première fois il laissa ses mains s'attarder sur son corps, remontant doucement vers sa poitrine.

_ Ces petits rendez-vous à la sauvette sont très agréables, mais trop souvent bien trop courts, dit Sophie en se reculant.

Elle sourit à Henry, et il sentit son cœur chavirer ; elle était si belle... Ses yeux noirs pétillaient en le regardant, et il laissa son regard glisser sur son corps, sur ses formes dissimulées par sa robe, mais présentes malgré tout.

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