Ne m'attends pas - Daniel Ricciardo // Max Verstappen

2. vulnérable - avril 2016

Le lendemain de ton retour en Angleterre, tu te réveilles avec ce qui te semble être la plus puissante des migraines. Tu n'as dormi que quelques heures. La valise, toujours posée sur le sol, n'a finalement pas été défaite. Chancelante, tu sors de ton lit et traverses la pièce sombre, pour rejoindre la salle de bain. Tu soupires lorsque tu aperçois ton reflet pour la première fois de la matinée. Yeux rougis, cernes et mascara dégoulinant, ... autant de signes qui permettront à tous tes collègues de savoir que ton passage en Suisse a viré à l'échec.

Après t'être démaquillée, tu t'offres une longue douche réconfortante. La chaleur de l'eau calme les douleurs crâniennes. Tu retrouves ton poste devant le miroir et évalue une nouvelle fois les dégâts. Il faut cacher ce qui peut être caché. À coups de pinceaux, de poudres et de crayons, tu parviens à te rendre présentable. Tu esquisses un sourire à ton reflet avant de sortir de la salle de bain, mais le coeur n'y est pas.

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Tu es la première à t'installer dans l'open-space réservé à celles et ceux qui forment le secteur communication de Red Bull Racing. Cela ne fait pas quinze minutes que tu pianotes sur ton clavier qu'une première collègue t'apostrophe. « T'es malade? ». Tu aimerais lui sourire et lui dire que tout va bien, mais tu n'en as pas la force. Tu lâches simplement un « ça va aller », sans jamais quitter ton écran des yeux. Des yeux qui - dès que ta collègue s'est assise à son bureau - s'embrument.

Aussi étrange que cela puisse paraître, le reste de la journée passe à une vitesse folle. Il y a tant à faire avant le Grand Prix de Russie qui a lieu ce week-end. Daniil Kvyat, le pilote dont tu t'occupes, est attendu par tout un pays. Les demandes affluent et tout le monde ne pourra pas être contenté.

Contrairement à ce que tu pensais avant de travailler pour Red Bull, tu passes peu de temps aux côtés du Russe. Il est aimable, mais tu ne sais rien de lui. En trois mois, vous avez à peine fait connaissance. Cela n'a pas d'importance. Ce qui compte, c'est qu'il apprécie ton travail et qu'il le fasse savoir à tes supérieurs. Intérieurement, tu es plutôt excitée à l'idée d'aller en Russie. Tu n'y a jamais mis les pieds et - une fois n'est pas coutume - tous les regards seront tournés vers ton pilote.

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Il est 19:00 quand un mécanicien débarque dans ton open-space. Ce n'est pas inhabituel. En bas, au royaume de la mécanique, les équipes sont essentiellement constituées d'hommes. Les femmes sont le plus souvent à l'étage, remplissant des fonctions administratives. « C'est triste », avais-tu pensé en visitant pour la toute première fois les lieux.

« Un verre avec nous, les filles? ». La proposition est tentante. Tes collègues, celles qui n'ont pas encore timbré, secouent la tête. Les deux sont des mères de famille. Elle ne ferait jamais passer un apéro avec des collègues avant leurs enfants. Depuis que tu es arrivée à Milton Keynes, tu as toujours refusé ces invitations. L'idée de passer une partie de la soirée entourée d'autres hommes que de Damiano te laissait indifférente. Aujourd'hui, tu te rends soudainement compte que tu n'as plus aucun compte à rendre.

Alors que le mécanicien est sur le point de quitter la pièce, tu te lèves brusquement. « Je veux bien venir ». D'un clic, tu fermes la session de ton ordinateur et saisis ton sac à main. Tu ne sais absolument pas à quoi t'attendre, mais l'idée de ne pas passer la soirée seule à pleurer sur ton canapé te réconforte.

« Moi c'est Cody », dit le mécanicien qui tend sa main vers toi. Tu la serres vivement, encore surprise d'avoir accepté l'invitation.

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Cody et les autres ont pour habitude de se réunir tous les lundi au pub qui jouxte les bâtiments de Red Bull Racing. L'endroit est petit et sombre, rien d'extravagant, mais la bière y est toujours fraîche. L'équipe a ses habitudes, une table réservée dans le fond de la salle. Ici, on parle courses automobiles, moteurs, mécanique, cylindres, ailerons, ... autant de choses qui t'intimident. Tu comprends de quoi parlent les mécaniciens, mais tu te sens incapable de prendre part à la conversation, trop soucieuse de dire quelque chose de stupide. Tu écoutes et ponctues ton silence de légers sourires.