Run Awayʸᵉᵒⁿᵍʸᵘ

👑💜Chapitre 25💜👑

Vendredi 28 octobre 2022

Nous étions quelques temps seulement après la visite de la Reine Shin à l'internat.
Précisément huit jours s'étaient écoulés depuis l'affrontement qui avait eu lieu entre Yeonjun et la femme qui n'était désormais rien de plus que sa génitrice. A ses yeux, elle avait perdu son statut de mère depuis bien longtemps.

Autour de l'établissement, sur la montagne dont la roche était perclue de mercure lui donnant cette flamboyante couleur rouge, les sapins avaient revêtu leur manteau automnal. Les feuilles s'étaient laissées tomber sous la force du vent d'octobre ou s'étaient parues de couleurs d'or, feu ou cuivre.

Les enfants des villages environnants prenaient mille plaisirs à enfourcher leurs vélos neufs pour de jolies balades sur les routes récemment goudronnées de nouveau, longeant les champs envahis de moutons ou de vaches, broutant tranquillement l'herbe verdoyante que leur offrait la nature.

Les bambins posaient leurs bicyclettes au pied de chênes probablement centenaires, gardiens de la forêt, et partaient ramasser des marrons sous leurs épluchures piquantes et coriaces, ou d'immenses feuilles de platane formant des bouquets à offrir aux aînés.

La montagne, de son manteau d'automne, faisait face à l'internat et chaque matin, Yeonjun prenait plaisir à se lever quelques minutes plus tôt afin d'observer les conduits d'avalanche, les cascades et les couleurs saisonnières dans toute leur splendeur.

De nature sensible, il s'émouvait de ce face-à-face avec la nature qui lui offrait à chaque aube, un de ses plus beaux spectacles.
De sa fenêtre, il pouvait apercevoir les télésièges arrêtés qui prenaient leur bain de soleil quotidien et les camions chargés à bloc passant la frontière franco-italienne sous l'œil permanent des douaniers.

Pour donner suite à toute cette agitation qui avait ébranlé nos protagonistes, les altercations, soucis et fugues avaient fait l'école buissonnière pour les laisser en paix.

Ils se sentaient bien mieux sans cette espèce d'apnée qui les retenaient en otage à chaque intervention de la malchance dans leur vie.

Ils n'avaient ni pris, ni reçu aucune nouvelle de la mère de Yeonjun et ne s'en portaient que mieux.
Ils reprenaient le chemin du savoir au fur et à mesure que les jours passaient.
Leur rythme de vie s'était enfin apaisé et ils vivaient enfin comme des adolescents lambdas.

Un sommeil réparateur s'était invité dans leurs nuits, l'appétit avait repris sa place de maître à table et la bonne humeur se traçait dans chacun de leur geste.

Yeonjun sortait de son cours de français avec sa professeure préférée et marchait tranquillement dans les couloirs afin de rejoindre le bâtiment E.

Ses pensées occupaient tout l'espace libre de ses pensées mais ne l'obstruaient pas. Un peu d'introspection ne serait pas de trop, il avait si peu eu l'occasion de se retrouver seul avec lui-même ces derniers temps.

Il aimait beaucoup son enseignante de français. Elle avait la sensibilité de certaines professeures qui faisait qu'elle vivait réellement son cours. En un instant elle devenait un des "petits cons de la Plate" comme le décrivait Maylis de Kerangal, ou bien, elle se mettait dans la peau de Babouillec, une femme autiste et mutique qui a réussi à trouver la voie de l'écriture.

Elle s'intéressait à ses élèves et alors leur séquence intitulée "Devenir soi" prenait tout son sens. Elle les obligeait par de nombreuses expressions écrites à se chercher, deviner qui ils étaient réellement et même si la plupart râlaient devant ces longs devoirs, certains faisaient exception.

Dont lui.

Il n'avait pas eu de cours en commun avec Ben aujourd'hui mais ne s'en plaignit pas. Oh, n'allez pas croire qu'il s'était lassé, bien au contraire.
Il devenait chaque jour un peu plus amoureux de lui tout du moins si cela était possible car il l'était déjà à un point inimaginable.