— Vas-y ! me dit-il.
— J'essaye, rétorquais-je sèchement.
Je soupirai tout en basculant ma tête en arrière.
— Samael, je suis épuisée.
Samael et moi nous trouvions sur mon tapis, assis à même le sol. Il avait été cherché l'un de mes couteaux dans la cuisine, pour s'entailler le bout du doigt.
— Dépêche-toi, ou le sang va tâcher ton superbe... Tapis. Tiens, je n'avais jamais fait attention aux motifs, c'est supposé être quoi ?
— Des fleurs.
J'avais un gout pour la décoration ancienne, ce n'était pas pour tout le monde je devais le reconnaitre. J'attrapai son doigt ensanglanté dans ma main pour empêcher la goutte de tomber, sous son regard désapprobateur.
Nous avions pris plusieurs décisions. La première : ne pas quitter mon appartement. Si les hommes du Covent Ambré avait torturé Samael, c'est qu'ils ne possédaient ni mon adresse ni mon identité. Ainsi, nous étions en sécurité pour l'instant.
À la première heure le lendemain j'irais voir mes supérieurs pour leur expliquer la situation. Je n'étais pas certaine du protocole, mais Samael comme moi avions besoin de protection. De plus, tout accablait le Covent pour ces crimes.
Ensuite, Samael c'était mis en tête de m'apprendre à contrôler mes pouvoirs. Inutile de préciser que cela ne se déroulait pas comme prévu, bien au contraire.
— Tu en es capable, insista-t-il.
— Peut-être que j'ai usé toute mon énergie en sauvant ta stupide petite...
— Jade, concentre-toi.
Du regard, il désigna nos mains jointes. Le connaissant, il ne me laisserait pas tranquille. Pas tant que je n'avais pas réellement essayé.
Alors, je me résolue à rester silencieuse, les yeux rivées sur l'endroit où sa peau rencontrait la mienne. J'essayais de me concentrer sur... Quelque chose. Quoi que ce soit. Mais, la chaleur qui me parcourait une heure plus tôt avait maintenant disparu.
— Regarde, me dit-il néanmoins.
Lorsque je levai mes mains, sa petite plaie n'existait plus. Il ne restait que le sang séché sur sa peau.
— Tu es vraiment une guérisseuse ! s'exclama-t-il.
Cette fois-ci, son enthousiasme fut contagieux. Je me surpris à joindre ses rires de joie, tandis que son regard pétillant ne me quittait pas.
— C'est incroyable.
— Qu'est-ce que je vais faire ? demandais-je.
La question m'était plus adressée, comme une réflexion à haute voix.
— Tu vas venir avec moi, répondit-il comme s'il s'agissait d'une évidence.
— Pardon ?
Sa réponse, et le ton avec laquelle il me la donnait, effacèrent immédiatement mon sourire. Il fronça les sourcils.
— Tu as besoin d'être formée. Tu pourrais utiliser tes pouvoirs pour...
— Non, je perdrai mon travail.
Une lueur passa dans ses yeux : de la déception. Samael laissa ses bras retomber sur ses genoux, visiblement las. Je n'avais pas réellement pensé à cela, mais lui si visiblement. Les mages n'étaient pas policiers.
Je ne pouvais pas me permettre de perdre mon travail. Il s'agissait de ma vie, ma passion, j'avais tout donné pour cette position.
— Jade, rétorqua-t-il, penses à tout ce que tu pourrais accomplir.
Je secouai la tête, le coeur soudainement déchiré. J'allais avoir besoin de temps pour penser à tout cela. Beaucoup de temps, et de calme.
De sommeil, également. L'excitation et l'angoisse commençaient à redescendre, et mes paupières se faisaient de plus en plus lourdes. Cela faisait presque quarante-huit heures que je n'avais pas eu une réelle nuit de sommeil.
— Les guérisseurs sont rares, répétais-je tout en l'ignorant. À quel point ?
Nouveau soupir de sa part. Je compris rapidement que je touchais un point sensible.
— Tu es la première que je rencontre.
Du regard, je l'invitais à continuer.
— La première dont j'entends parler encore en vie, à vrai dire.
Les mots me glacèrent le sang.
— C'est de la folie, Samael.
— Je sais, c'est bien ce que j'essaye de te faire comprendre. Imagine toutes les choses que tu pourrais...
— Pars, s'il te plait.
— Pardon ?
Je pus voir que ma réaction l'avait sincèrement blessé. Mais j'avais besoin d'être seule, de penser à tout cela. Tant de choses étaient arrivées en seulement deux jours. Déjà cela, sans oublier la menace qui planait sur nos épaules.
— Tu ne peux pas être sérieuse, me dit-il visiblement sous le choc.
— J'ai besoin d'être seule. Peux-tu respecter ça ? Ça fait beaucoup.
— Je n'ai nul part où aller !
Je soupirai tout en me laissant tomber sur le sol, allongée. Je n'avais pas considéré cela. Il était vrai que Samael avait trouvé refuge chez moi.
— D'accord, marmonnai-je. Tu restes, mais je vais aller dormir.
— Tu veux dormir, après tout ça ? Comment fais-tu ? demanda-t-il d'un ton exaspéré.
— Je suis exténuée, rétorquais-je. Et toi aussi, d'ailleurs.
Samael me fusilla du regard tandis que je me relevai. Rapidement je remis en place les oreillers du canapé ainsi qu'une couverture, tout en l'invitant à s'installer d'un geste de la main.
— Tu peux aussi prendre une douche si tu veux, lui dis-je.
— Tu es sérieuse ! s'exclama-t-il.
— Très sérieuse.
Je soupirai en regardant mon téléphone. Il était trois heures du matin, et à la première heure le lendemain je devais aller voir mes supérieurs. Fantastique.
Samael se tenait planté face à moi, les bras croisés. Visiblement mécontent. Il était proche. Tout juste quelques centimètres, je pouvais presque ressentir la chaleur de sa peau.
— Bonne nuit, lui dis-je avec un grand sourire.
— Bonne nuit, grommela-t-il.
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Déchéance [Terminé]
ParanormalJade Slyrander est une jeune recrue de la police de New York. Quelques années après l'intervention qui a failli lui couter la vie, la jeune femme est chargée d'enquêter sur une série de disparition inquiétante, et pour se faire, doit infiltrer le ré...