Chapitre seize

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Pour la première fois depuis bien trop longtemps, je ne fis pas de cauchemars. Il n'y eut pas de flammes dans mes songes, ni de hurlements qui me hantaient. Juste la paix et la lumière qui éclairait doucement ma chambre.

Bien sûr, je ne pouvais pas me permettre de dormir toute la nuit. J'avais un rendez-vous urgent avec mon supérieur afin de discuter de notre situation. Si tout ce passait bien, j'avais bon espoir de nous passer tous les deux dans le service de protection des témoins au monde de l'ombre.

Ainsi, Samael pourrait enfin être en sécurité. Loin de... Peu importe ce qui l'effrayait. 

Je tournai sur moi même dans le lit, le corps prit dans les draps. Samael ronflait derrière moi, collé à ma peau. Sa chaleur se diffusait encore en moi et je ne m'étais pas sentie aussi confortable depuis bien trop longtemps. 

— Debout, me résolus-je à lui dire. 

Un marmonnement mécontent me répondit, mais il ouvrit néanmoins les yeux. Samael sembla confus pendant une minute. 

— Déjà ? demanda-t-il.

— Pas le choix. 

Il poussa un profond soupir tout en me lâchant. Soudainement, le monde parut froid sans la chaleur de ses bras. Il se laissa rouler sur le dos tout en étirant ses muscles. 

— Tout ira bien, me dit-il.

Sa voix était encore endormie, mais l'inquiétude s'y faisait déjà entendre. Nous avions tous les deux une longue journée devant nous. 

— Tu peux rester ici, si tu veux, lui appris-je.

Je savais qu'il se sentait en sécurité chez moi. Et, je lui faisais assez confiance pour l'y laisser sans surveillance. 

— Merci... 

Nous restâmes silencieux quelques secondes. De la main, il m'attira plus proche de lui. Ainsi ma tête reposait désormais sur son torse, tandis que nous regardions le plafond sans rien oser dire. 

La chambre, si paisible quelques instants plus tôt, semblait maintenant emplie d'une profonde énergie. Un mélange d'angoisse et d'appréhension. Tout se jouait dans les prochaines heures, et j'ignorai si nous possédions suffisamment de preuves. 

— Le Covent Ambré, soupirai-je en pensant à haute voix. 

Sous moi, le corps de Samael se raidit. 

— Jade...

Il y avait quelque chose d'étrange dans sa voix. Une sorte d'avertissement. Je me redressai sur mes coudes pour le regarder, les sourcils froncés. Regrettait-il la nuit dernière ? Mon coeur se pinça à cette pensée. Car moi, j'étais heureuse. 

— Il faut que tu saches quelque chose, commença-t-il.

Une sueur froide me parcourut. Ses beaux yeux au vert intense se posèrent sur mon visage. La façon dont il me sourit me rassura un peu et il caressa mon dos du bout des doigts. 

— Kyros et moi travaillions avec eux il y a quelques années. Il y a... Beaucoup d'histoires entre nous. Ces gens sont dangereux, ils s'en prendront à toi sans aucune hésitation.

— Je sais, répondis-je calmement.

Samael ferma les yeux. 

— Non, Jade. Tu ne comprends pas... Ce sont des meurtriers. 

Cette réflexion me fit tiquer car... Nous le savions. Il s'agissait de la raison de mon rendez-vous d'aujourd'hui. Pourtant un tremblement dans sa voix attira mon attention.

— Est-ce qu'ils ont tué quelqu'un que tu connaissais ?

Sa main retomba mollement sur le matelas.

— Oui, répondit-il simplement. Et c'était terrible. Jade, je ne veux pas qu'il t'arrive quoi que ce soit.

— Tout ira bien, lui dis-je. Je vais tout arranger, je te le promets.

Il ne parut pourtant pas convaincu, un air soudain las fut lisible sur son visage tandis que je me laisser rouler sur le lit.

J'avais un million de questions pour lui, mais pas le temps de les poser. Je ne pouvais pas être en retard aujourd'hui. 

Cela n'empêchait pas mon cerveau de fonctionner aussi rapidement que possible. Lorsque nous étions revenus de chez Kyros, Samael m'avait parlé d'un incendie qu'il avait également vécu. Quelques mois avant celui qui avait faillit me couter la vie.

Ces deux incidents avaient-ils un lien ? Le Covent Ambré aurait très bien pu déclencher un incendie, coutant la vie à... qui que ce soit que Samael semblait si malheureux d'avoir perdu. 

— Tout ira bien, insistais-je en sortant du lit.

Les mots m'étaient adressés, mais un soupir peu joyeux me répondit néanmoins. 

— Quoi qu'il se passe, commença-t-il, je serais toujours de ton côté.

Quelle étrange réflexion... Samael resta allongé sur le lit tandis que je commençais à m'habiller. Un mauvais pressentiment me donna un nouveau long frisson, mais je décidai de l'ignorer. J'avais beaucoup trop de choses auxquelles penser. 

— Je te verrais tout à l'heure, lui dis-je avec un sourire.

— Pourras-tu ramener à manger ? 

Je fronçai les sourcils, son ton si sérieux était devenu bien léger.

— Oui bien sûr, texte moi ce que tu veux. 

Sur ces mots je finis de m'habiller tout en regardant mon reflet dans le miroir. J'avais l'air... Vivante. Au moins, quelques couleurs m'étaient revenues. Cependant, le manque de someil se lisait sur mon visage. 

Qu'importe, je n'avais pas le temps de prendre une douche ou mettre du maquillage. 

— Bon courage, me cria Samael alors que je me dirigeais dans le couloir.

Je franchis la porte de mon appartement d'un pas décidé. Mais, une terrible impression me suivait. Comme si la mise en garde de Samael était plus sérieuse qu'il n'y semblait. Comme si... Il savait quelque chose que j'ignorais. 

Déchéance [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant