Déchéance [Terminé]

Chapitre vingt

Bien sûr, les mots de Samael me hantèrent, et cette nuit-ci je rêvai des flammes.

Je me réveillai en sueur, sans même me souvenir de m'être endormie. Je me sentais si confuse, si perdue.

La peur, bien sûre, dominait mes émotions. Mais aussi une étrange résolution. Cette dernière était humiliante, mais je ne pouvais rien faire. Impossible de m'en sortir seule, et Samael semblait réellement avoir changé de camp.

Enfin... Je commençais à comprendre qu'il n'avait jamais été de mon côté. À nouveau les larmes me montèrent, car j'avais stupidement cru en lui. En nous, peut-être même.

Et maintenant, j'étais pathétique. Couchée en boule dans un lit qui ne m'appartenait pas, je n'avais aucune idée d'où je me trouvais ou même si on me retrouverait un jour. J'étais seule au monde.

Alors, je cherchais des réponses.

Je refusais de m'arrêter. Car si je cessais, je risquais de devenir folle. Ainsi ma conversation avec Samael tournait en boucle dans mon esprit.

L'incendie.

Je m'en rappelais encore à la perfection. Les flammes, les cendres, la fumée, la chaleur, les hurlements. Le silence. La prière que j'avais marmonné alors que je pensais mourir.

Puis...

L'hallucination.

Une chose étrange était arrivée dans cette boite. Lorsque j'étais finalement parvenue au bureau des gérants, dans l'espoir de trouver une fenêtre afin de sortir.

Pendant une fraction de seconde, il n'y avait plus eu de fumée. Plus de feu. Plus rien. Tous les médecins, les psychiatres, ma propre famille, me disait que cela avait dû avoir lieu uniquement dans ma tête.

Et pourtant, ma survie était un miracle. Je n'avais aucune séquelle, aucune réelle brûlure. Pourquoi ?

Je fermais les yeux et pour la première fois en cinq ans, m'autorisai à replonger dans ces vieux souvenirs.

Les vapeurs de douleur qui bloquaient ma vue se dispersèrent. Je le devinai plus que je ne le vis, mais il me semblait y avoir trois hommes dans la pièce. L'un d'entre était assis sur quelque chose, une chaise peut-être ? Je fronçais les yeux, tout m'apparaissait si flou. Il me semblait qu'il était ligoté.

Les trois têtes se tournèrent vers moi.

L'odeur putride de la mort et du sang parvint à mes narines, remplaçant celle de la fumée. Comment cela était-il possible ? Je devais être en train d'halluciner. Si les hommes parlaient, je ne les entendais pas. Un sifflement sonore et assourdissant m'empêchait d'entre ou de discerner clairement ce qu'il se passait.

Trois hommes. Un silence assourdissant. La mort. Il s'agissait des seuls souvenirs qui me revenaient comme dans une brume, comme je les avais vécu toutes ces années plus tôt.

Puis... Plus je me concentrais sur l'image plus celle-ci semblait devenir nette. J'en étais désormais certaine, un homme était ligoté sur une chaise au centre de la pièce.

Je me rappelais d'une autre chose. Ce qu'il m'avait dit, ce jour là.

—Tu ne vas pas bruler vive.

Il devait s'être libéré, car il était soudainement sans ses liens et debout. Je n'entendais plus aucun des deux autres hommes, et ne pouvais pas les voir non plus.

Il inclina légèrement la tête. Les mots qu'il venait de prononcer sonnaient presque comme une promesse. Il se pencha encore un peu plus, et ses chemins mi-long formèrent un rideau autour de mon visage.

J'essayais de me concentrer, sentant que la réponse se trouvait à cet instant précis. Cependant, La fumée et les flammes avaient endommagés mes sens dans ce souvenir, et je ne parvenais pas à le voir clairement.

Je restais quelques minutes les yeux fermés, finalement le tout devint encore plus net. Je jurai à haute voix tandis que les traits commençaient à se dessiner plus clairement.

— Samael, dis-je sous l'effet du choc.

Il était présent, ce soir-là cinq ans plus tôt. Pire encore, il avait sauvé ma vie.

Samael Blake avait sauvé ma vie.