Chapitre 17

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Pov Océane

Il faisait nuit le soir ou Océane sortit des cours. Elle avait dû supporter la prof de maths une bonne partie de la matinée, et un mal de tête lui martelait les tempes. La fraîcheur l'accueillit et lui fit du bien. Elle remonta son sac à dos sur ses épaules, et marcha vers le carrefour.

Son père allait venir la chercher, elle était restée un peu plus tard au lycée, comme elle le faisait parfois. Il lui arrivait de glaner à la bibliothèque quelques livres qu'elle avait repérés, ou de terminer des devoirs sur un banc. Ses parents avaient l'habitude, et cela ne les dérangeaient pas, comme ils habitaient plutôt proches du lycée. En général, son père passait la chercher en rentrant du travail, c'était sur son chemin.

Alors qu'elle remontait la rue qui s'opposait à celle descendant vers le parking des bus, Océane cru remarquer quelqu'un penché sur les glissières de sécurité.

Elle ne chercha pas vraiment à comprendre, il lui arrivait parfois de rencontrer des gens un peu fous la nuit, il fallait surtout faire comme si de rien n'était, et passer son chemin. Elle savait agir en conséquence.

Mais en arrivant à sa hauteur, elle se rendit compte que ce ne serait pas aussi simple. En effet, la capuche à moitié rabattue sur la tête, le corps secoué de tremblements, la jeune femme qui agrippait à la barre en aluminium n'était personne d'autre que Suzanne.

Elle ne semblait pas dans son état normal.

Bien qu'elle ne l'apprécie vraiment pas, Océane ne pouvait pas la laisser comme ça, seule, en pleine nuit. Qui sait ce qui pourrait lui arriver ? Quelqu'un abuserait d'elle, ou en profiterait pour la filmer, et Océane l'aurait sur la conscience toute sa vie. Ce n'était pas un contexte anodin.

-Suzanne ? demanda-t-elle, s'approchant d'elle.

Elle ne lui répondit pas, tournant simplement la tête dans sa direction de façon trop brusque pour être naturelle. C'est là qu'Océane remarqua ses yeux rouges et ses pupilles dilatées.

-Viens, on va aller au lycée, déclara celle-ci en essayant de la redresser.

Il fallait qu'elle demande de l'aide, elle ne savait pas comment réagir face à l'état de son ancienne harceleuse. Mais Suzanne n'était clairement pas en état de penser correctement, elle semblait juste paniquée et confuse.

Océane resta un instant les bras ballants, prise au dépourvu. Une femme remontait le trottoir d'en face, et elle se résigna à demander de l'aide.

-Excusez-moi ? appela-t-elle, la voix tremblante. Mon amie ici aurait vraiment besoin d'aide.

Le mot amie lui brûla les lèvres mais elle n'avait pas vraiment le temps de s'en préoccuper. Il fallait qu'elle fasse quelque chose. Cependant, à sa grande surprise, la voix qui l'interpella lui était très familière.

-Océane ?

C'était Mme Laoudy qui traversa la route en urgence, et son apparition rassura instantanément la jeune femme, qui laissa échapper une expiration qu'elle ne savait même pas retenir.

-Madame ? demanda-t-elle alors que celle-ci arrivait à sa hauteur.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? lui demanda la professeure, inquiète, remarquant la présence de Suzanne.

-Je ne sais pas, je l'ai trouvée comme ça. Il faut la descendre au lycée, madame, elle n'est pas en sécurité ici.

La blonde ne lui répondit pas, s'agenouillant au niveau de Suzanne.

-Suzanne, l'appela-t-elle. Hé, Suzanne, regarde moi.

La jeune femme fini tout de même par s'exécuter, tirée de son isolement par le contact physique de l'enseignante sur ses poignets. Quand celle-ci comprit l'origine de son état, elle pinça les lèvres.

-Ça va aller, d'accord ? reprit-elle. Je suis là, on est là, avec Océane. Tu n'es pas toute seule. On va descendre au lycée, ça te vas ? Tu pourras être plus tranquille, même t'allonger, si tu as envie. Viens.

Faisant un signe de tête en direction de son élève, Mme Laoudy se saisit du bras gauche de Suzanne, le passant par-dessus son épaule. Elle incita Océane a faire de même, et commença à redescendre vers l'établissement.

Océane remarqua que le cœur de Suzanne battait beaucoup trop fort alors qu'elle l'aidait à rejoindre le lycée. La situation et l'adrénaline ne lui firent même pas prendre en compte l'ironie de la situation, et, au travers de son ancienne ennemie, sa proximité avec son enseignante.

Elles arrivèrent vers les doubles portes, qui, par chance, étaient encore ouvertes, mais le hall semblait vraiment désert. Mme Laoudy guida Suzanne vers un banc isolé, et l'aida à s'y asseoir en douceur, tandis que Océane accompagnait le mouvement sans un mot. Une fois chose faite, elle leva un regard interrogateur vers la blonde.

-Elle fait un bad trip, expliqua celle-ci. Elle a dû consommer quelque chose, mais je n'arrive pas à déterminer quoi.

Suzanne tremblait, les yeux perdus contre les vitres de l'entrée traduisant une angoisse anormale. Son front était brillant de sueur.

La blonde s'accroupit à nouveau près d'elle, jaugeant son regard. Sa main se posa contre son front dans un réflexe presque maternel, cherchant à estimer sa température.

-C'est transitoire, d'accord Suzanne ? Tout va bien, ça va partir mais en attendant il faut que tu te calmes. Tu es en sécurité, tu ne risques rien. Est-ce qu'il y a quelque chose que tu veux nous dire ? Tu sais quelle est la nature des stupéfiants que tu as consommés ?

La respiration de la concernée était superficielle, mais elle semblait comprendre le sens des paroles de son enseignante.

-Il-Il est m-mort, haleta-t-elle.

Le regard de Mme Laoudy devient grave, et Océane s'assit sur le sol à côté d'elle, se sentant un peu inutile.

-De qui tu parles ? poursuivit Benedict avec douceur.

Malgré elle, la main d'Océane se posa contre le mollet de la jeune femme aux cheveux noirs, essayant de lui prouver sa présence, de la rassurer. Elle ferait face aux conséquences de tout cela plus tard. Ce n'était pas le moment de s'arrêter sur leur passé commun.

-M-mon frère, lâcha Suzanne comme si parler était un effort hors du commun.

Les épaules de l'enseignante se raidirent et Océane le remarqua immédiatement.

-Kalid ? interrogea-t-elle.

Suzanne se contenta de hocher la tête, occupée à reprendre son souffle avec difficulté. Face à son état qui semblait empirer, Mme Laoudy posa deux doigts sur la cuisse à Océane, avant de se relever.

-Reste avec elle, s'il-te-plait, lui intima-t-elle, le regard sombre.

Océane hocha la tête, essayant d'ignorer la pulpe des doigts de Benedict frôlant à peine son jean.

Celle-ci sortit son téléphone portable de son sac, composa un numéro court, et s'éloigna de quelques pas, passant un appel.

-Bonsoir, je suis Benedict Laoudy, professeure de philosophie au lycée Elula Perrin. Vous pouvez me contacter sur ce même numéro de portable. Nous sommes actuellement dans le hall de ce lycée. Je me trouve en compagnie de deux élèves, dont l'une qui a consommé des substances inconnues et qui n'est pas dans son état normal. Elle a perdu son frère il y a peu de temps, ce qui a dû contribuer à sa réaction. Nous l'avons placée dans un endroit calme, l'avons rassurée, avons surveillé sa respiration, et vérifié sa température. J'attends vos instructions.

Océane comprit qu'elle appelait les secours. Elle attendit patiemment tout en restant aux côtés de Suzanne, qui semblait être partie loin.

-Très bien, reprit Mme Laoudy, nous allons faire comme ça. Oui, dans le hall du lycée Elula Perrin.

Se rappelant que son père l'attendait, la jeune femme lui envoya un rapide SMS afin de le prévenir de la situation, tandis que sa professeure poursuivait son appel.

-Je peux raccrocher ? demanda celle-ci. Très bien, à tout à l'heure.

Elle revint près d'Océane, en mettant le son sur son portable.

-Ils arrivent, lui indiqua-t-elle, plongeant ses yeux bleus dans les siens.

La tension dans le corps de la jeune femme redescendit, et elle se pinça la lèvre inférieure entre les dents, aquiescant.

Lui apprendre à aimer - [Romance lesbienne]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant