Chapitre 21

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Le lendemain soir, le père d'Océane vint la chercher à la sortie des cours. Suzanne avait été absente ce jour-là, et comme indiqué sur la fiche dans le hall, Benedict n'était pas venue.

Océane le savait très bien puisque la porte de la chambre d'amis était encore entrouverte et les volets fermés quand elle s'était levée ce matin là. Elle n'aurait jamais cru devoir être silencieuse en partant au lycée pour éviter de réveiller sa professeure.

Cela avait fait naître en elle un sentiment de tendresse qu'elle n'avait encore jamais expérimenté.

Elle avait eu l'impression que sa raison lui soufflait qu'elle commençait à faire n'importe quoi.

Comme si elle commençait seulement. Alors que c'était déjà trop tard.

Bien sûr, Océane était consciente que cette obsession ne la mènerait à rien. Elle se faisait des films, voilà tout, et si un jour Benedict l'apprenait, elle ne la verrait plus jamais comme avant.

Non, elle ne s'énerverait pas. Elle savait que ce ne serait pas le cas.

Mais ce n'est pas pour autant qu'elle avait envie d'expérimenter la scène.

Quand son père ouvrit la porte de garage, Océane remarqua la lumière venant de la fenêtre à l'étage avec un pincement au cœur. Devait-elle aller saluer Benedict, ou la laisser tranquille ? Elle ne savait pas vraiment.

Elle laissa son père rentrer la voiture à l'intérieur avant de descendre de la place passager. Leur garage était assez petit, malgré les apparences. Ses parents n'étaient pas très bricoleurs, et il n'y avait que les choses essentielles aux réparations qui se trouvaient stockées sur le petit établi.

Dans un coin, leurs vélos prenaient la poussière, rangés là pour l'hiver avec la trottinette électrique de Clémence. Juste au-dessus étaient emmêlées des vieilles guirlandes lumineuses de Noël, suspendues là depuis des années. Le sol était une simple dalle de béton lissé gris, brillant avec la lumière grésillante des néons.

Océane délaissa sa paire de baskets devant la porte en bois, accrochant sa veste à la rambarde de la mezzanine avant de rentrer dans la maison.

Sa mère n'était toujours pas rentrée du travail, à en croire la télévision éteinte et ses ballerines mauves alignées parfaitement sur le tapis de l'entrée. Juste à côté se trouvaient les chaussures de Benedict, qui firent rougir Océane sans aucune explication rationnelle.

Avec des sons bruyants, son père la rejoignit, un sac de courses sur l'épaule.

-Va faire tes devoirs, indiqua-t-il. Je vais m'occuper de ranger tout ça.

Elle hocha la tête en reprenant ses affaires et en gravissant les escaliers en silence, ne sachant toujours pas quoi faire au dessus.

Finalement, son instinct lui dicta de ne pas s'arrêter et elle prit la direction de sa chambre, les yeux fixés sur le cadre de sa porte. Une fois dedans, son sac à dos atterrit au pied du lit avec un bruit sourd, faisant tinter son porte-clé à fleurs.

Elle alluma sa lampe de bureau qui plongea la pièce dans une lueur tamisée rose, et se dirigea vers son tableau en liège.

Il avait été recouvert par tant de photos qu'on en décernait même plus le fond brun clair. C'était un amoncellement de punaises colorées qui retenaient entre elles des images de toutes les dates, tellement nombreuses qu'elles se chevauchaient.

Il y en avait beaucoup d'elle et de Jerry.

Petits déjà, sur la balançoire du jardin, avec des vêtements de bambins. Ou alors sur le canapé, un jour de neige, des petites chaussettes rouges à leurs pieds.

Lui apprendre à aimer - [Romance lesbienne]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant