CHAPITRE II - 18 : Allons-y.

57 5 49
                                    

J'ai un de ces mal de crâne. Comme si on m'avait donné un coup pour m'assommer, alors que c'est juste une de ces douleurs idiotes dont on ignore l'origine. J'en ai de plus en plus, dernièrement.

Je ne prends même pas le temps de me regarder dans le miroir, en passant devant ma salle de bain. A quoi bon, il est encore tôt si j'en crois le soleil qui rentre dans la pièce, et la plupart des gens ne me verront pas réveillée à cette heure. C'est à peine si j'attache mes cheveux.

J'étouffe un bâillement, regardant un peu dans le couloir. Certaines portes sont déjà ouvertes. Certaines je vois ouvertes tous les jours, d'autres jamais d'ordinaire. Sans doute un réveil imprévu, pas que j'en veuille à qui que se soit vu l'ambiance.

Il faut que je réfléchisse à quelque chose pour rehausser un peu le niveau de joie de tout le monde. On en a vraiment besoin.

Je remonte mes lunettes sur mon nez et descends l'escalier qui mène au niveau inférieur. J'ai terriblement mal au crâne, plus a chaque pas qui m'entraîne plus bas. Mon corps me hurle de remonter, de m'enfuir. Pourquoi ?

Je ne vais pas mourir ici, pas vrai ?

Je ne peux pas. Pas maintenant.

Je dois lui parler, avant. Je dois entendre sa voix, m'assurer qu'iels vont bien.

Je dois revoir son sourire.

Je mets un pied devant l'autre, avalant avec difficulté ma salive. Ma main tremble, et j'essaie de récupérer dans ma poche quelque chose qui m'a été pris il y a des jours de ça.

Je ne peux même pas essayer de me convaincre. Quelle idiote.

J'entends quelque chose, étouffé. Un sanglot. Un cri de détresse.

« Réveille-toi, s'il te plaît ! »

Je m'approche de la porte du salon.

Elle est ouverte.

« Tu peux pas faire ça, réveille-toi, allez, bon sang ! »

Une nausée. Un vertige.

Tellement de rouge.

« A l'aide... »

Les yeux de lae pleureuxe se posent sur moi. Et je ne peux que m'effondrer face à leur poids.

Un appel désespéré pour une cause qu'iel sait perdue. Mais ses yeux ne transpirent que souffrance et horreur. Iel sait. Mais ne veut pas accepter.

Une alarme résonne. Mes yeux ont du mal à choisir quoi regarder, entre le seul être vivant ici, la personne gisant dans ses bras ou celle oubliée derrière un siège.

Car c'est bien ça. Un double meurtre. La prise de deux vies.

Celles de deux personnes que j'avais commencé à apprécier. Avec lesquelles j'avais pu rire.

Est-ce que je dois me juger chanceuse de ne pas être celle qui tient le corps de la personne que j'aime dans mes bras ?

Est-ce que je dois me juger heureuse de ne pas être Morgan, qui tient le corps ensanglanté de Sam ? Qui est tant aveuglé.e par sa douleur qu'iel ne porte même pas attention à Isla, dont le voile bleu est teinté de rouge ?

e par sa douleur qu'iel ne porte même pas attention à Isla, dont le voile bleu est teinté de rouge ?

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.

Suis-je vraiment chanceuse ? Ou bien est-ce une malédiction, de voir des gens mourir ?

J'entends des pas, mais mes yeux refusent de quitter la scène. Je suis témoin, que je le veuille ou non.

Je ne sais même pas ce que je ressens, exactement.

J'entends finalement un cri venant de ma droite. Un seul cri, mon nom. Je vois Eleanor prendre mes épaules dans ses mains et me secouer un peu, comme pour s'assurer que je ne suis pas la victime. J'entends le cri d'horreur de Génésis. J'entends la sonnerie. La seconde.

Je tourne de nouveau ma tête vers Morgan. Iel pleure toujours. Iel supplie toujours pour de l'aide. C'est Génésis qui lae fait lâcher le corps. C'est Génésis qui enlève la veste tachée de sang de lae sportife.

Mais c'est Morgan qui parle.

« Qui. Qui a tué Sam. »

Je l'ignore. Je veux savoir. Je veux rester dans l'ignorance. Je veux aider. Je veux fuir. Je veux survivre. Je veux mourir.

Les autres arrivent. Ife hurle le nom de l'oubliée, de celle qui est morte en retrait. Elle est retenue par Van Kim de courir vers le corps inerte d'Isla. Mais j'ai l'impression qu'il manque encore quelqu'un.

Eleanor me secoue de nouveau. Me demande comment je vais, encore.

Bien. Mal. Je ne sais pas.

J'ai peur.

Je ne veux pas mourir ici.

Mes dés me manquent.

Je me relève en tremblant. Eleanor m'offre son soutien, comme une béquille. Je sens les regards se tourner vers moi. La témoin.

C'était le rôle de Sam, avant, d'être témoin et chercheuse, quand la mort de l'Ultime fantôme est arrivée. Pas vrai ?

Ça ne peut pas être mon rôle.

Je ne suis pas faite pour ça. Je suis là pour être le personnage secondaire pour mes proches. Pour les aider et les soutenir. Pas l'inverse. Je suis celle qui raconte l'histoire, pas celle qui la vit. Je suis la maître du jeu, pas un de mes joueurs.

Un bruit venant de la cuisine détourne l'attention de ma figure. La porte tremble, coincée derrière plusieurs meubles qui l'empêchent de s'ouvrir. C'est Ismaïl qui s'en approche, évitant avec attention le sang qui a coulé sur le parquet.

Il enlève petit à petit les meubles, et manque de se prendre en pleine tête la porte quand elle s'ouvre brusquement, révélant nul autre que Kozma Demopoulos. L'absent. Son sourire aussi faux que d'ordinaire.

« Ah, parfait ! Donc, j'ai pas passé la nuit enfermé ici pour rien, qui sont les victimes ?

– Regarde toi-même.

– Oooh, du calme, Morgan, je ne fais que poser une question. » Aussi faux soit son sourire, il disparaît immédiatement quand ses yeux vairons se posent sur les deux corps. « Oh. Oh bordel.

– C'est peu de dire ! Qu'est ce que tu foutais là dedans ?!

– On en parlera au procès. Qui est donc notre nouvelle Protagoniste, si Sam est morte... » Ses yeux se posent sur moi, et même si Eleanor essaie de me protéger, rien ne l'empêche de me dévisager. « ... Quelle barbe. J'espère que tu t'amuseras, dans ce rôle, Héloïse.

– Laisse la tranquille.

– Dites ça à Monokuma. Les protagonistes timides et avec des problèmes d'estime de soi, c'est surfait. »

Sans un mot de plus, il s'assoit sur un fauteuil, dos à nous.

Mais je sais qu'il a tort. Je ne peux pas être protagoniste. Ce n'est pas moi, je ne suis pas Wen Xiang Monogatari, Thibault Laangbröek ou je ne sais qui, encore. Je suis qu'Héloïse Delaporte, je ne suis qu'un personnage secondaire.

Je ne peux pas occuper ce rôle.

Observing End [LPM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant