CHAPITRE 28

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SHADE




La sonnerie retentit. Les salles de classe se vident comme un raz de marée, déversant des centaines de Pensionnaires dans le couloir. Je dévisage tout le monde, mais ne retiens personne. Adossé contre un mur défraîchi, j'attends Berlioz.

Je relève discrètement les yeux pour vérifier la position du Guetteur. Le drone me surplombe toujours, en vol stationnaire au-dessus de ma tête. Il me colle au cul depuis mon retour de The Rule. Elles me surveillent, je suis une foutue menace pour elles. Ah! Rien qu'une cartouche de plus pour booster mon ego. Leur peur me fait jubiler.

La sécurité de la Pension s'est renforcée depuis les fouilles. Les avertissements publics se multiplient. Les interrogatoires aussi.

Les Fils de Zyar reçoivent des mises à jour quotidiennes. De nouvelles fonctionnalités, de nouvelles armes, de nouveaux ordres. Une rumeur chaotique enfle à l'extérieur. Les révoltes grondent. Je sens qu'un terrible orage s'apprête à secouer les rangs de l'Œil et les Harpies ne vont pas se laisser faire.

Berlioz sort enfin, suivi d'Isaz et de Lagos. L'albinos m'aperçoit en premier. Il avertit Berlioz d'un coup sur l'épaule et le petit groupe se dirige dans ma direction. Après avoir salué le Mexicain et ignoré les deux autres, nous nous mettons en route. Je supporte leur présence, c'est déjà largement suffisant.

Les gars remarquent immédiatement le Guetteur qui nous suit à la trace. Ils m'adressent des regards nerveux et je leur renvoie mon agacement. On a déjà discuté de ce problème, ils savent comment procéder.

— Quoi de neuf ? balance Isaz, et je pourrais l'étrangler pour son jeu d'acteur de merde.

— Rien. Silence radio.

Tout le monde comprend ce que cela signifie. Reyna ne se confie plus. La carte de l'intimité ne peut être jouée qu'une seule fois. Peut-être le baiser était-il de trop ? Je repousse les images qui m'assaillent. Il était nécessaire. Continue de t'en convaincre.

Sans lui, je n'aurais jamais pu m'approcher suffisamment pour lui parler des rébellions sans être entendu par les caméras. J'avais besoin de la déstabiliser pour lui soutirer ces informations. C'était le moyen le plus rapide. Comme si tu n'y avais pas pris ton pied par la même occasion. La ferme.

Mais il est trop tard. Son goût revient sur ma langue, sa peau sous mes doigts et bordel, replonger dans tout ce merdier est une très mauvaise idée.

— L'oisillon est toujours blessé, assure Berlioz. Il tombera de nouveau.

Notre conversation est volontairement codée. Le Guetteur prend ses distances, mais il enregistre toujours.

— Il a déjà volé plus loin qu'il ne l'avait jamais fait.

Reyna nous a déjà donné d'importantes informations confidentielles.

— Mais tu crois qu'il s'en est vanté à ses parents hier ? intervient Isaz.

A-t-elle tout avoué au panel de Sénatrices?

— Évidemment. Tout ce qui concernait son rival, tout du moins.

Tout ce que je lui ai raconté sur moi.

Berlioz nous arrête devant l'infirmerie. Le Guetteur survole nos têtes puis disparaît enfin de notre champ de vision. Les trois autres relâchent enfin leur souffle tandis que mes muscles se détendent de moitié. Je reste toujours sur mes gardes désormais.

Le Mexicain salue ses amis et ouvre la porte, mais je pose ma main sur son bras avant qu'il n'entre.

— Où tu vas ?

ManipulationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant