Partie 6 - La dent.

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Deux mois plus tard.

Il s'arrêta brusquement dans le couloir qui menait à la classe de son petit frère en l'apercevant à côté de sa maîtresse devant la porte de sa classe, en larmes. La maîtresse semblait être en train de lui dire quelque chose d'un air soucieux et il s'élança vers Aurélien sans même répondre à son meilleur ami à ses côtés qui lui demandait ce qu'il pouvoir bien avoir.

« Aurél ! s'écria-t-il en se ruant vers son frère et ce dernier sursauta juste au moment où il posait ses mains sur ses épaules. Aurél ! Eh... Qu'est-ce qu'il y a ?! Qu'est-ce qu'il s'est passé ?! Pourquoi tu pleures ? »

Aurélien releva la tête et quand celui-ci ouvrit les yeux, il plongea son regard dans le sien. Il avait l'air terrorisé.

« Aurél, eh... l'appela-t-il de nouveau, mais il n'eut pas le temps de dire autre chose car la maîtresse l'interrompit.

— Il n'y a rien de grave, Guillaume. Il a seulement perdu une dent de lait. Elle est tombée cet après-midi. »

Il haussa les sourcils en l'entendant dire ça et il attrapa avec délicatesse le menton de son frère pour lui demander silencieusement de lui faire voir. Aurélien s'exécuta et quand il le vit ouvrir la bouche, il aperçut le petit trou qui avait maintenant pris place à la place de son incisive supérieure gauche.

« Eh... Mais c'est pour ça que tu pleures, Aurél ? Ça te fait mal ?

— N-Non... lui répondit son frère en secouant la tête et il fronça légèrement les sourcils en se mettant à caresser son menton de son pouce.

— Qu'est-ce qu'il y a alors ? Pourquoi tu pleures ? Ça fait longtemps qu'elle bougeait cette dent, c'est normal qu'elle soit enfin tombée.

— Je vais... Je vais mourir, n'est-ce pas ?

— Hein ? Mais ça va pas. Bien sûr que tu ne vas pas mourir. Pourquoi tu dis ça ? »

Aurélien ne répondit rien, comme s'il se disait soudainement qu'il venait de dire une bêtise et à ses côtés, Claude s'avança de son petit frère.

« Eh, la crevette. T'as huit ans maintenant, c'est tout à fait normal que tes dents tombent. D'ailleurs, ça doit pas être la première fois alors pourquoi tu paniques comme ça ? »

Il sentit une étrange chaleur l'envahir en entendant le surnom par lequel son ami venait d'appeler Aurélien et quand il vit ce dernier regarder Claude d'un petit air effrayé, il enchaîna :

« C'est vrai ça, Aurél. T'as déjà dû perdre d'autres dents vu ton âge. Celles de devant, là, lui dit-il en montrant ses propres dents et Aurélien le regarda d'un air hésitant.

— Je... sais pas... Je m'en souviens pas...

— D'accord. C'est pas très grave. Mais en tout cas, t'as pas à avoir peur, hein. Ça veut seulement dire que tu es en train de bien grandir. »

Aurélien lui lança un regard inquiet quand il dit ça et il se demanda intérieurement ce que ce regard voulait dire. La maîtresse dit alors au revoir au plus petit et celui-ci vint attraper sa main délicatement de la sienne, faisant rater un battement à son cœur au contact inattendu. À ses côtés, il vit Claude prendre son cartable au sol et il le remercia d'un sourire avant de se mettre à marcher en direction de la cour de récréation. Sa mère devait les attendre à la sortie de l'école comme tous les jours maintenant, lui laissant le soin à lui de venir chercher Aurélien, et il sourit de plus belle en pensant à ça. Il était trop fier.

***

« Aurél ! »

Il se rua dans la chambre de son petit frère en l'entendant pleurer violemment. Il s'était réveillé en l'entendant crier et avait décidé de venir voir ce qu'il avait.

« Je veux pas... Guillaume, je veux pas... » sanglota Aurélien quand il fut près de lui et il s'assit à ses côtés sur son lit après avoir allumé sa lampe de chevet pour pouvoir le voir dans le noir.

Aurélien était en train de trembler sous ses draps et il glissa sa main dans ses cheveux pour l'obliger à le regarder.

« Qu'est-ce que tu ne veux pas, Aurél ? demanda-t-il en plongeant son regard dans le sien et son cœur se serra en voyant qu'il avait les larmes aux yeux.

— Je veux pas... Je veux pas devenir grand, lui dit le plus petit d'un air paniqué et il fronça les sourcils, confus.

— Quoi ? Mais qu'est-ce que tu racontes ?

— J'ai peur... J'ai peur de devenir un adulte, Guillaume... Les adultes... c'est méchant... Ça fait peur... et mal... »

Il comprit soudain ce qu'il avait en l'entendant dire cette dernière phrase. Les adultes, ça fait mal.

« Eh, mon p'tit chat, regarde-moi, dit-il et dans la pénombre faiblement éclairée par la lampe de chevet du plus jeune, il sentit ses joues le chauffer au surnom. Tous les adultes ne sont pas méchants, hein. Papa et maman... ils t'ont jamais fait de mal, non ? lui demanda-t-il et Aurélien secoua la tête doucement. Ni ta maîtresse. Ni la mère de Claude... Donc tu vois que tous les adultes ne sont pas méchants.

— Mais... Pour l'instant. Peut-être qu'ils vont le devenir ? Me faire du mal...

— Non, non, non... Personne ne te fera plus de mal. Je te le promets. Je te protège, hein ? dit-il doucement et Aurélien hocha la tête d'un air hésitant, ses doux cheveux venant frôler ses phalanges au mouvement. Tu vas devenir grand, Aurél. Moi aussi. C'est obligé d'en passer par là, on va pas pouvoir rester enfants toute notre vie. Alors crois-moi, tout ira bien. Et demain, la petite souris t'aura déposé un cadeau en échange de ta dent. Ok ? »

Aurélien hocha la tête doucement et il lui sourit avant de l'amener à se rallonger dans le lit. Il glissa sa main de nouveau dans ses cheveux pour les lui caresser et l'amener ainsi à se rendormir paisiblement, et son sourire se fit plus grand encore en le voyant mettre son pouce dans sa bouche et serrer plus fort son lapin contre lui. Tout irait bien. Parce qu'il était là pour le protéger à présent. Et il tiendrait sa promesse.

Fiction OrelxGringe - Protecteur.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant