Chapitre XXV

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Point de vue de Marie-Félicie

Trois semaines s'étaient écoulées et je n'avais toujours pas envoyé de réponse à Monsieur Morel d'Arleux. En fait, j'avais pensé à lui et à l'avenir qu'il me promettait. J'en avais eu des frissons. J'enviais avec insolence les salons parisiens et les rencontres de haut-rang dont il m'avait parlé. Seulement voilà, il fallait que je tire un trait sur ma vie actuelle. En acceptant qu'il devienne mon prétendant officiel, je faisais une croix sur tous les autres, mais surtout, sur mon amour de jeunesse: Alexandre de Cléry.

Aussi, lorsqu'une idée germa dans mon esprit, j'en informai de suite Louise-Victoire. Effectivement, j'avais pensé à organiser un après-midi avec Louis Morel d'Arleux, Louise-Victoire et Alexandre de Cléry. Mon officier serait déjà là puisque je l'aurais invité à déjeuner, et les de Cléry nous rejoindraient par la suite.
Je me voyais discuter avec les trois, autant que j'envisageais qu'Alexandre pourrait discuter avec Louis, pendant que je demanderai conseil à ma confidente.
Louise-Victoire pourrait nous jouer un peu de pianoforte et je pourrais l'accompagner au chant. Je souhaitais me montrer telle que je suis, afin que le capitaine de la garde nationale à cheval puisse réaliser l'étendue de mes talents.

Piquée par toutes ces suggestions, je laissai mon ouvrage de côté et me précipitai dans ma chambre.
J'ouvris mon secrétaire et pris quelques belles feuilles. Il me fallait écrire trois lettres. La première, je l'adressai à l'homme qui faisait battre mon cœur. Alors, prise d'un las soupir, je trempai ma plume dans l'encrier avant de rédiger ces quelques lignes.

Cher Alexandre,

Nous arrivons bientôt à la Noël et je me suis dit que vous pourriez venir me rendre visite avec votre sœur Louise-Victoire. Mère n'y verra pas d'inconvénient car il y aura à mes côtés, un autre jeune homme. Celui qui souhaiterait me faire la cour.
Je vous en supplie, j'ai besoin de votre avis quand à l'avenir qui va se jouer prochainement pour moi...et pour la suite de notre relation cachée..
Si vous éprouvez de profonds sentiments à mon égard, veuillez me répondre simplement en me faisant parvenir un pigeon voyageur qui portera autour de sa patte, l'affirmation tant attendue.

Tendrement,

Marie-Félicie de Maupertuis

Ma seconde lettre fut écrite à ma seule et véritable amie de cœur: Louise-Victoire.

Très chère Louise-Victoire,

Si je prends la plume aujourd'hui, c'est pour te demander de venir au manoir, accompagnée de ton frère. J'ai terriblement besoin de tes conseils ma tendre amie.

J'ai un nouveau prétendant qui souhaiterait me courtiser et je dois te confier que la vie qui m'attend si je dis oui n'est que pur bonheur.
Si je te demande d'emmener ton frère, c'est parce qu'il sera là aussi. Comme il est officier, peut-être se fera-t-il le plaisir de parlementer avec lui? Et nous pourrions aussi faire un duo: toi au pianoforte et moi au chant. Qu'en penses-tu?

Je n'en n'ai pas encore parlé à Mère, mais je suis sûre qu'elle n'y verra aucun inconvénient.

J'espère de tout cœur que tu accepteras.

Ton amie,

Marie-Félicie de Maupertuis

Enfin, je trempai ma plume dans mon encrier pour la dernière fois, en achevant ma correspondance qui apportait la réponse tant attendue au capitaine Morel d'Arleux.

Monsieur Morel d'Arleux,

Tout d'abord, je tenais vraiment à vous remercier de m'avoir fait découvrir Paris, telle que vous la ressentez. J'ai beaucoup aimé vous suivre dans vos endroits préférés.

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