Chapitre III

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Point de vue de Marie-Félicie

Nous étions arrivés dans les premières familles. Enfin, quand je pensais famille, je me trompais peut-être un peu puisque je n'avais pas de frère et sœur. Mère et moi étions quand même une famille. Même si d'après l'explication qu'elle m'en avait faite dans le carrosse ; elle avait envoyé une lettre à Marie-Caroline de Bourbon-Siciles, la duchesse du Berry qui logeait parfois à Fontainebleau, la quémandant de l'inviter avec sa très chère fille. Autrement dit, moi.

Je découvris le magnifique château où Madame la duchesse s'affairait au bon déroulement de la journée d'aujourd'hui. Et je gardai en tête que lorsqu'elle avait rappelé Mère, elle s'était confondue en excuses grotesques, toutes plus exagérées les unes que les autres.

Nous nous dirigeâmes vers le vaste jardin et tandis que Mère et la duchesse parlaient entre elles, je scrutai les petites têtes qui s'amusaient dehors. De jeunes enfants jouaient aux dominos sur une table, d'autres aux cerceaux, de jeunes garçons faisaient rire des jeunes filles qui s'esclaffaient derrière leurs éventails et des filles de mon âge échangeaient autour de divers sujets. Je soufflai et m'avançai en leur direction. Je me mis un peu à l'écart et j'écoutais leur conversation. Elles parlaient d'une certaine Louise-Victoire. Une jeune fille de mon âge qui n'était pas encore arrivée mais qu'elles attendaient avec hâte.

Je n'écoutai pas vraiment ce qu'elles racontaient. J'aurai mieux aimé courir dans le labyrinthe de buis qui trônait au fond du parc. Ou bien faire l'étoile dans les petits graviers pour dessiner un ange. Je soufflai encore, triturant ma bourse. Je n'avais pas remarqué que les jeunes filles me regardaient.

« Les garçons ~ Vous voulez bien installer le jeu de croquet? »

Madame de Bourbon-Siciles interpella le groupe de jeunes gens et deux des garçons en question se précipitèrent vers la duchesse afin de récupérer ce jeu auquel je n'avais joué qu'une seule fois. Ils allèrent sur la pelouse et commencèrent à planter les arceaux. Je levai les yeux au ciel.

« Toi non plus tu n'aimes pas ce jeu?

Je sortis de ma rêverie et je tournai les yeux vers la voix.

- Oh excuse-moi, je ne me suis pas présentée. Je m'appelle Eléonore de Manville. Et toi?
- Marie-Félicie de Maupertuis.
- C'est la première fois tu viens ici?
- Oui.. Je..je ne suis pas habituée..

Éléonore sourit.

- Ça se voit rien qu'à ta tenue! Je ne sais pas comment tu pourras jouer au croquet avec cette robe..
- Ne m'en parle pas! C'est Mère et son goût pour les apparats.

Nous nous regardâmes et nous éclatâmes de rire ensemble. Elle était plus petite que moi en taille, mais sa tenue semblait plus confortable. Éléonore avait de jolis cheveux châtains et des yeux verts. Elle avait rassemblé ses cheveux en chignon, comme toutes les filles présentes ici. Je me dis que j'étais la seule à avoir une couronne de fleurs et j'allai pour l'ôter.

- Oh non!! Garde la! Elle te va très bien et tu es toute jolie avec.
- Oui mais je ne vous ressemble pas.. Je voudrais être comme vous.
- La prochaine fois peut-être? »

Elle me fit un petit signe d'au revoir et courut retrouver ses amies. De nombreux enfants arrivaient encore. Plusieurs prenaient place sur les chaises et quelques uns se lançaient dans une partie de croquet. J'allais tout faire pour éviter d'y jouer. Je me rapprochai des autres filles mais mon regard se perdit. Je m'ennuyais ici. Tout ça ne me ressemblait pas.

Soudainement, je fus tirée de ma rêverie par une jeune fille. Elle se présenta comme s'appelant Louise-Victoire de Cléry. Un sourire prit place sur mon visage et je fis une mini révérence.

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