[Eldarya] [Lance]Le Sang des Sorcières

Chapitre Trente-Cinq - Le retour du dragon

Les gardiens de Cierna étaient rentrés tard du conseil des Théodosiens et étaient tous épuisés. Lance s'était peu exprimé et s'était reposé sur la route, dans un palanquin spécialement emporté à son intention.

Assis sur un lit dans la salle de soins, le front du dragon était recouvert d'une pellicule de sueur fiévreuse. Florelle pouvait voir qu'il serrait les dents au moindre geste et lui apporta le simple réconfort de sa main. Son visage aux traits tirés et fatigués était crasseux, sa barbe rapeuse et ses cheveux avaient poussé jusqu'à ses épaules et étaient gras et marrons ou noirs de saleté. Gizel lui fit retirer la veste qu'il avait sur les épaules et l'atèle qu'il avait fabriquée avec les moyens dont il disposait : la manche de sa chemise et les lanières de ses bottes. L'odeur était nauséabonde et Florelle fronça malgré elle du nez lorsque Gizel retira avec beaucoup de soin les derniers pans de tissus. Elle tacha de garder une expression neutre en découvrant un torse amaigri, des muscles fondus par l'absence d'activité et un ventre creusé par le manque de nourriture.

— On dirait qu'il reste encore des fibres de tissus et de bois incrustées, constata Gizel.

Les contours de la lésion étaient chauds et enflammés, visiblement infectés. La mine de la soigneuse était préoccupée par la situation, même si elle tentait de ne pas le montrer.

— Ils ont retiré la flèche sans ménagement et je n'ai reçu aucun soin, raconta Lance d'une voix atone. Au début, je recevais quelques vivres mais j'ai été mis à l'isolement.
— Je suis désolée, je vais devoir palper...

Le dragon hocha la tête et se crispa lorsque la sorcière débuta son examen. Il ferma les yeux et serra de sa main valide celle de Florelle qui l'accompagnait du mieux qu'elle pouvait dans cette épreuve. Elle n'avait pas encore prononcé un mot, impuissante à pouvoir aider.

— Le trait est propre, il n'a touché aucun os, aucun vaisseau important. Est-ce que tu peux bouger tes doigts ? demanda patiemment Gizel.

Le dragon remua faiblement ses articulations, rassurant sur l'état de ses nerfs.

— C'est assez incroyable que tu aies survécu si longtemps avec une blessure de cette importance et surtout, l'absence de soin et de nourriture. Le souci est que la cicatrisation des tissus est anarchique et cristallisée autour du point d'entrée.
— Tu peux faire quelque chose ? questionna Florelle.
— Il faut commencer par nettoyer la blessure et diminuer l'inflammation. Après, on pourra y avoir un peu plus clair. On envisagera d'autres traitements par la suite.

Gizel quitta la salle quelques instants, laissant le couple seul. Florelle aida Lance à s'allonger et le recouvrit d'une couverture. Il la remercia laconiquement et ferma les yeux. La soigneuse réapparut, accompagnée d'une jeune femme qui tenait entre ses mains un bol fumant.

— Voici Terry Alister, une recrue en formation auprès des Améthystes, présenta Gizel.

La nouvelle s'approcha timidement et son regard embarrassé croisa celui de Florelle avant de se détourner. Elle portait de longs cheveux noirs dont elle avait rattaché les pointes sur le côté, mais cela ne suffisait pas à cacher entièrement la cicatrice d'une brûlure qui avait ravagé le coté gauche de son visage, jusqu'à son oreille disparue.

— Alister, oui, il me semblait bien avec vu ton nom sur la liste des recrues sélectionnées. Bienvenue à Cierna, la salua Florelle.
— Merci.
— Si Lance le veut bien, elle va m'assister pour tes soins.

Les yeux toujours fermés, le dragon hocha la tête et se laissa faire alors Terry appliqua le plus délicatement possible la préparation à base d'argile blanche.